Résumé de la 5e partie n Elisabeth Cochrane se fait passer pour une folle. elle est internée dans l'île de Blackwell où elle commence son reportage pour le World... Un jour qu'elle est à la promenade, c'est-à-dire en train de tourner avec les autres dans une cour aveugle, pieds nus, avec une méchante robe en drap pour tout vêtement, elle entend une infirmière lui dire : — Nelly Brown, sortez des rangs ! Elle a pâli. Est-ce pour lui infliger une punition quelconque, en vertu de l'arbitraire qui règne dans l'asile, voire pour l'envoyer à la section 6 ? Sans un mot, l'infirmière lui fait signe de la suivre, et elle se retrouve devant un homme en costume élégant, qui lui dit simplement : — Je viens vous sortir d'ici... Le reportage que tire Nellie Bly de son séjour à l'île de Blackwell a un retentissement extraordinaire. Pour la première fois, l'opinion est informée de ce qui se passe dans les établissements psychiatriques du pays. Le scandale est énorme. Des enquêtes officielles suivent la sienne et des réformes énergiques sont ordonnées. Grâce à son courage – on peut même dire son héroïsme –, Nellie Bly a sauvé, après les miséreux de Pittsburgh, des milliers de malades mentaux dans tout le pays. Pour elle, c'est la gloire ! Plus question de pseudonyme féminin cachant en réalité un homme. Sa photo, parue dans le World, est reproduite dans tous les journaux. Elle est devenue une héroïne nationale. Les Etats-Unis sont le pays de la démesure. On inscrit son nom sur des casquettes, des foulards, on baptise «Nellie Bly» une marque de chewing-gum, de machines à écrire et de stylos. Tout cela lui rapporte une fortune. Il est loin le temps où elle partageait avec sa mère un misérable appartement de Pittsburgh. Elle offre à celle-ci une villa à la campagne et elle-même fréquente la plus haute société de New York. Elle est la journaliste la mieux payée du World, ce qui n'est pas peu dire. Pulitzer lui a fait un pont d'or, persuadé qu'elle ne va pas tarder à lui proposer une autre idée sensationnelle. Il ne se trompe pas. C'est début novembre 1889 que Nellie Bly vient trouver son patron. Elle a beau avoir les nerfs solides, l'univers des fous succédant à celui des miséreux de Pittsburgh l'a tout de même éprouvée. Elle a envie de changer d'air, de découvrir de nouveaux horizons et, comme toujours, elle voit les choses en grand. — Alors, Nellie, vous avez trouvé quelque chose de nouveau ? — Oui, faire le tour du monde. — Je vois : une sorte de grand reportage. — Non, une course. Je veux réaliser l'exploit de Jules Verne et même le battre ! Jules Verne, Le Tour du monde en quatre-vingts jours : aux Etats-Unis comme dans le monde entier, chacun connaît. Mais le livre est considéré comme un récit d'anticipation. De l'avis général, l'exploit de son héros, Phileas Fogg, est irréalisable. C'est dire que le projet de Nellie Bly est d'une folle audace et cela ne refroidit pas Joseph Pulitzer. Lui aussi est l'homme des défis. Il en a relevé beaucoup avec succès au cours de son existence. — Extraordinaire ! Tous nos moyens sont à votre disposition. Quand comptez-vous partir ? — Le plus tôt possible. Le temps de faire mes préparatifs. (à suivre...)