Scène n L'association culturelle El-Afsa de Tlemcen a présenté, mercredi, en compétition, sur les planches du TNA, Rendez-vous avec… Adaptée par Abelkrim Gheribi de la nouvelle l'Arbre, de Slawomir Mrozek, la pièce lauréate du grand prix au Festival régional du théâtre professionnel de Sidi Bel Abbes, a été mise en scène par Ali Abdoun et Yahia Ben Amar. Elle raconte l'histoire de deux hommes qui se rencontrent un soir. L'un est bavard et expansif, l'autre est, en revanche, silencieux et réservé. Le premier, qui tente de mettre fin à sa vie mais qui n'en a pas le courage, s'engage dans une discussion à sens unique. Son soliloque se résume à raconter sa vie, ses expériences existentielles, mais aussi ses malheurs et ses désespoirs. Il parle et raconte sans interruption, sur un ton prolixe, sans que l'autre bronche, restant silencieux et figé, dans une posture de marbre. Puis soudain, il sort de son mutisme. La conversation s'engage : tous deux échangent des propos et des expériences dans un discours existentiel. Si le premier veut mettre fin à sa vie, le second a, finalement, lui aussi, la même intention. Si ce dernier est convaincu de son acte, le premier, toujours bavard, n'en est pas certain. Il hésite. Il a peur de la mort. Le discours existentiel rythme la pièce qui revêt une portée philosophique. Plus tard, une présence féminine intervient, telle une apparition – serait-elle réelle ou une illusion ? –, détournant l'attention de celui qui a un caractère faible et craintif, mais laissant le second à la forte personnalité insensible. Cela démontre que l'un est foncièrement attaché à la vie mais pas l'autre. Celui-ci fait preuve de retenue, de sagesse et de philosophie. Le jeu, fluide et aisé, se poursuit, mais, cette fois, à trois. Il se déroule dans un lieu sinistre et isolé, froid, uniforme et triste. Un lieu où ceux qui n'ont plus foi en la vie s'échouent, espérant avoir le courage de mettre fin à leurs jours. Si la conversation entamée par la jeune femme – qui veut, elle aussi, mettre fin à ses jours – avec celui qui est convaincu de son acte suicidaire, est lourde de sens et soutenue, celle engagée en direction de celui qui a peur de la mort est prosaïque et sans aucun intérêt intellectuel ou philosophique. La jeune femme, belle et fine dans ses propos, évalue et mesure le discours de chacun. La pièce, soutenue par un langage démonstratif, est d'un tempérament fort et à forte charge émotionnelle. Des sentiments intenses la ponctuent et rythment le mouvement du jeu par lequel les comédiens se sont illustrés dans une interprétation convaincante. L'ambiance feutrée et aux teintes crépusculaires rend compte de cette atmosphère sombre et funèbre. Elle illustre le désespoir ressenti par chacun des protagonistes. Tout est dans la lumière et les nuances qui s'en dégagent.