Emerveillement Un regard neuf promené dans des rues maintes fois visitées, et c?est l?invitation à une redécouverte des lieux. Que d?occasions ratées dans le passé pour faire connaissance avec les incontournables Champs-Elysées et l?inévitable tour Eiffel, et que d?images emmagasinées et rapportées par les proches et amis? Cela pourrait laisser supposer que la fascination ne serait pas au rendez-vous pour mon premier voyage. Mais ma capacité à m?émerveiller me permet heureusement d?être littéralement sous le charme, ce matin et les journées qui suivront. Enveloppé dans la brume, le boulevard Montparnasse, que j?ai traversé par bus un matin de novembre, n?a pas déçu ma première impression. La même grisaille hivernale qui crée une ambiance magique avec ces lumières scintillantes et ces décorations ornant les rues et les magasins pour les fêtes de Noël et de fin d?année. Le boulevard est animé, les vitrines attirent ceux qui ne lésinent pas sur les moyens pour s?offrir une belle table et un beau décor pour ces deux occasions. La «tête» dans le brouillard, la tour est là, imposante. Un panneau invite les éventuels visiteurs à grimper aux étages supérieurs pour avoir une vue sur Paris. Une bouquiniste sort quelques rayonnages devant son échoppe, mais sans trop d?espoir d?intéresser les passants, pris par d?autres préoccupations à cette période de l?année. Ma promenade me mène au boulevard Saint-Germain-des-Prés où je tombe carrément en extase face à ce «triangle d?or» de la littérature parisienne que sont le café Les Deux magots, le Café de Flore et la Brasserie Lipp, réputés pour avoir été le rendez-vous de l?élite intellectuelle française et universelle pendant la première moitié du siècle dernier. J?avais noté ces détails relevés dans une encyclopédie Microsoft (comme beaucoup d?autres) avant mon départ, et lorsqu?on sait que dans ce quartier précisément ont habité des écrivains et des peintres comme Jacques Prévert, André Breton et Picasso, on ne peut pas traverser le boulevard sans y faire une halte. Un couple de quinquagénaires en fait de même. L?homme explique à sa compagne l?aura intellectuelle dont jouit l?endroit, avec ses cafés et sa brasserie. Sur les ponts et les quais du boulevard Saint-Michel, le froid est glacial. Mais cela n?empêche pas les nombreux touristes de les longer, prenant des photos et filmant la Seine ? traversée de temps à autre par des péniches ? et la cathédrale de Paris. Sur le Quai aux fleurs, je pense inévitablement à l?écrivain algérien Malek Haddad (pour son ?uvre intitulée Le Quai aux fleurs ne répond plus). J?emprunte des rues dont certaines particularités m?attirent, comme ce vieux quartier juif de la rue des Rosiers que ses habitants veulent sauver de la démolition par leurs appels qu?on peut lire sur des pancartes, ou la rue d?Arcole où un petit restaurant ne manque pas de séduire par le décor original de son entrée et par les menus traditionnels qu?il propose. Place de la Bastille, je me surprends à m?étonner du «mariage» entre la colonne de Juillet, l?Opéra et un restaurant kabyle dont la spécialité est le couscous. Je m?apprête à y entrer quand je tombe sur un panneau très particulier : la maison de Victor Hugo est là, tout près, sur la place des Vosges. Sous les arcades de cette place dont les pavillons ont été habités autrefois par des personnalités et des écrivains tels que Richelieu, Mme de Sévigné, Bossuet, Théophile Gautier ou Alphonse Daudet, le numéro 6 indique l?un des hôtels qui a abrité le romancier et poète Victor Hugo pendant 16 ans (de 1832 à 1848). Il est difficile de ne pas être ému lorsqu?on se trouve devant cette bâtisse, on imaginerait presque l?écrivain penché sur sa table, derrière l?une des fenêtres, occupé à écrire une de ses ?uvres. Son ancienne maison est, depuis 1902, un musée qui porte son nom.