«Le spectacle du jour», «Les films de la semaine», «Les livres du mois»,... c'est ainsi que se décline l'agenda culturel dans un pays où les arts sont au menu quotidien de tous. Car, les chanceux -dans ce domaine du moins- habitants des grandes villes ne devraient pas être les seuls à pouvoir lire un bouquin, voir un film, admirer une exposition, savourer un spectacle... Tout citoyen, où qu'il soit et quelle que soit sa condition, son âge ou son rang, est en droit de disposer des moyens de s'offrir des moments distractifs et pédagogiques, la dimension socioéducative de l'art n'est plus à démontrer. C'est sans doute l'un des objectifs premiers que le ministère de la Culture, sous la direction de sa nouvelle timonière, Nadia Labidi, doit atteindre. L'objectif devient même une mission puisque figurant au programme du président de la République, que le gouvernement est en charge de concrétiser, qui fait de «l'accès des citoyens aux activités culturelles en tirant pleinement profit du dense tissu d'infrastructures culturelles réalisées et en cours de réalisation à travers l'ensemble du territoire national», un des axes majeurs pour la promotion de la culture. Il s'agira donc d'exploiter tout le potentiel infrastructurel existant, et le renforcer, pour une réelle socialisation de la culture. Une infrastructure n'est cependant vivante et active que par ceux qui la dirigent et l'animent. Aussi, le choix des responsables au niveau des 48 wilayas auxquels les artistes, les animateurs, les porteurs de projets ou d'idées, les associations auront affaire est-il de première importance. Mais le défi ne se résume pas à l'ouverture des portes à deux battants pour laisser s'engouffrer tout et n'importe quoi. La quantité ne doit en aucun cas primer sur la qualité. Or, c'est souvent le cas. On a même eu à entendre des expressions comme «a le mérite d'exister» et «l'écriture de l'urgence» pour justifier la médiocrité d'une production ou d'une œuvre qui ont été présentées à des moments de vide culturel ou dans des espaces d'où la culture a été chassée ! Comment peut-on prétendre redonner aux arts la place qu'ils méritent au sein de la société en produisant et promouvant de l'anti-art ? C'est là un autre grand défi qui attend Mme Labidi : chasser les opportunistes, les squatteurs et les clandestins de la culture qui hantent toutes les institutions et gravitent autour de tous les responsables essayant de gagner leurs grâces, leur soutien financier et leur coup de pouce. Et le meilleur moyen de retirer cette mauvaise monnaie qui chasse la bonne, c'est «le soutien à la production et l'industrie culturelle sous toutes leurs formes» qui doit être destiné aux authentiques artistes et créateurs, ainsi que «la formation et le perfectionnement aux métiers de la sphère culturelle et artistique», comme édicté dans le programme présidentiel. Quand -on se refuse de dire si-, tout cela est fait, il restera toutefois le très gros travail à entreprendre, le chantier des chantiers : amener le citoyen algérien à devenir un consommateur de culture, l'éducation artistique. Et cette entreprise exige une collaboration intersectorielle. Le ministère de la Culture devra travailler de concert avec celui de l'Education, ce qu'on peut considérer comme acquis au vu des profils des deux premières responsables de ces secteurs. Il faut espérer que les pesanteurs, les boulets et les forces d'inerties seront annihilés et neutralisés pour que Mmes Labidi et Benghebrit, si elles s'accordent sur la noble mission qui est la leur, puissent faire ce bout de chemin ensemble sans devoir rencontrer à chaque pas ces écueils et obstacles que sèment tous les réfractaires au changement. H. G.