Le limogeage du P-DG d'Algérie Télécom, M. Djaziri, a été une surprise pour de nombreux responsables du monde des télécommunications. Beaucoup d'entre eux, rencontrés lors de la journée parlementaire sur les technologies de l'information et de la communication, organisée hier à l'APN, se sont refusés à tout commentaire concernant cette affaire. Certains se sont contentés de dire que la décision revient au ministre qui «est le seul habilité à nommer et à limoger qui il veut». D'autres nous ont confié qu'il s'agit là «de décisions politiques et que personne ne peut y échapper». M. Younes Grar, président de l'Association algérienne des fournisseurs des services Internet et président-directeur général de GECOS, a, quant à lui, estimé que le limogeage devait se faire normalement sur la base de résultats. «Il ne faut pas que ça soit des décisions précipitées, car on est dans un secteur qui avance, et on voudrait que toutes les décisions prises, que ce soit pour les nominations ou les limogeages, soient basées sur des critères de résultat.» «Il faut que ça soit clair et qu'on apprenne à travailler dans la clarté et la transparence», ajoute notre interlocuteur. «En tout cas, je n'ai pas d'explications à ce qui est arrivé.» Et d'ajouter : «Il est vrai qu'on a été assez critique vis-à-vis des responsables du secteur, à commencer par le ministre. Pour ma part, je dis qu'ils ont une part de responsabilité dans le fait que le secteur ait stagné, il n'y a pas eu de résultat, on a pris un retard qui s'accentue de plus en plus et il faut que les responsables prennent les décisions qui conviennent». Ce n'est pas le changement des hommes qui compte le plus, mais le changement des programmes et la manière de travailler, dit M. Grar. Bien sûr, dès qu'«il y a un changement de personnes, on espère une amélioration, mais il faut qu'il y ait derrière ce changement d'hommes un changement de politique et de stratégie, de la transparence». Pour sa part, M. Ali Kahlane, président de Satlinker (Satellite Solutions Provider), donne une lecture des évènements suivant ses connaissances de ce secteur et des administrations de l'Etat. Si on voit uniquement ce que dit la presse sur le limogeage de M. Djaziri et ce que dit le ministre, il n'y a que des questions sur toute la ligne. «On ne comprend pas du tout comment un P-DG peut tout d'un coup refuser d'honorer une facture datant de 2005, selon ce qui est rapporté. Pourquoi cette facture est-elle toujours là, pourquoi il l'a lui présente à ce moment, et pourquoi refuse-t-il de l'honorer. Et du coup, pourquoi le ministre le convoque-t-il et le limogé en invoquant un ordre d'en haut.» Tous cela, explique notre interlocuteur, «est d'une opacité incroyable qui rappelle les années de plomb, à un moment où ces pratiques étaient tout à fait normales. Je dirais même qu'elles étaient érigées en système de gouvernement». Il est clair qu'en 2008, «on ne peut plus accepter ce genre de choses, surtout au niveau d'un secteur à la pointe de la technologie, comme les TIC, où on est supposé manipuler l'information et la communication et être à la pointe de tout. Mais, au contraire, on se retrouve pratiquement au bon vieux temps du clanisme et du clientélisme où chacun fait ce qu'il veut». Et de poursuivre : «Moi, je pense que c'est effectivement ce qu'a dit Djaziri à demi-mot, parce que, malheureusement, il n'a pas tout dit. C'est clair, qu'il y a du vrai dans cela, mais il n'a pas tout dit. On aurait aimé et on est en train de tout faire pour qu'il le fasse, qu'il aille au fond des choses. Pourquoi il l'a fait et qu'est-ce que c'est que cette injonction qui vient d'en haut. Est-ce que cette facture gêne des gens quelque part. Puisqu'il a donné 90% des informations, pourquoi garder le reste. Il s'est déjà avancé, pourquoi ne pas aller jusqu'au bout ?» B. A.