Photo : Sahel Par Mekioussa Chekir «Le problème essentiel est de déterminer qui a revendiqué le multipartisme et qu'en a-t-il fait ? La réponse est que ceux-là ont renoncé à la pratique démocratique dès que la Constitution le leur a permis.» C'est par ces termes que le président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Bouguerra Soltani, a entamé hier son analyse politique de deux décennies d'expérience démocratique, soit depuis exactement la promulgation de la Constitution du 23 février 1989, laquelle consacre le multipartisme. Il intervenait au forum du quotidien Echaab consacré à la commémoration de cet événement. Pour l'intervenant, la Constitution amendée de 1989 a été précédée d'un climat malsain : «Ça a été comme une césarienne, une démocratie née dans la rue et non à travers les institutions. Elle n'a pas été le résultat d'un débat d'élite et une évolution graduelle vers cette phase.» Et d'estimer qu'à l'époque, il n'y avait pas «de pont entre le parti unique et le multipartisme», ce qui a conduit à la douloureuse expérience qu'était la décennie de la tragédie nationale. En énumérant les facettes négatives de ces 20 dernières années, Soltani cite un multipartisme limité à l'action politique, à l'absence d'une formation politique gouvernante distincte et d'une formation politique de l'opposition tout aussi claire en ce sens que les deux peuvent être simultanément dans les deux bords. Il citera, par ailleurs, le caractère dictatorial qui prévaut au sein des partis, l'absence d'alternatives politiques évidentes, l'activité politique se limitant souvent aux bureaux, exception faite pour les partis d'obédience islamiste, l'élargissement du fossé entre le discours politique prometteur et les revendications sociales de la population, l'échec des jeunes élites à se présenter en alternative et, enfin, la politisation à outrance du mouvement associatif. S'agissant des acquis des deux dernières décennies, Soltani évoque la refondation de l'Etat algérien avec la promulgation de ladite Constitution, l'organisation d'élections… De même que la promulgation de la loi sur la concorde civile, laquelle a été suivie de celle portant réconciliation nationale, ces dernières ayant permis de gérer la crise sécuritaire qui prévalait. Pour le secrétaire général du Front de libération nationale (FLN), Abdelaziz Belkhadem, la Constitution de 1989 est la seule qui n'était pas «idéologique». Et de revenir sur les nombreuses péripéties ayant prévalu à la préparation et à la rédaction de ce texte fondamental. Invité de la conférence, l'universitaire et enseignant à la faculté des sciences politiques d'Alger, Mustapha Saidj, a développé une analyse académique de cette période en en situant, à son tour, les points forts et les carences qui les ont marquées. Parmi ces dernières, il citera le faible taux des dernières législatives qui appelle à méditation, de même que la faiblesse de l'impact de la classe politique. Il relèvera, néanmoins, l'évolution de la démocratie de la phase de «désordre» à celle de «cadrage», se demandant si l'Algérie a connu une étape de «transition» démocratique ou bien de «mutation» vers ce système de gouvernance.