Le Conseil national économique et social (CNES) a organisé hier un work shop pour discuter des systèmes d'évaluation des politiques publiques. Y ont pris part des membres du conseil consultatif, des représentants de départements ministériels et des experts de la Banque mondiale. L'évaluation est aujourd'hui un mouvement mondial né aux Etats-Unis et est de tradition prévalente au Canada. Et l'Algérie veut y souscrire, a souligné Mohamed Babes. L'institution qu'il dirige travaille sur cinq réflexions lourdes : le développement humain, la lutte contre la pauvreté, la gouvernance, les libertés économiques et l'économie fondée sur l'intelligence. Dans une allocution introductive, le président du CNES a avancé que nous en sommes à l'entame de monter un système d'évaluation et que l'on veut aller à la connaissance des bonnes méthodes, des meilleures approches en la matière. Son vœu est qu'il y ait dans chaque département ministériel une cellule d'évaluation, que l'on enracine une culture d'évaluation sectorielle, sous-sectorielle, programmatique… Ce faisant, on pourrait contribuer à l'assise d'une démocratie participative, à la réforme de l'Etat, a-t-il expliqué. Mohamed Babes a résumé que l'on est en apprentissage paritaire, que les experts de la Banque mondiale auxquels on fait appel se frottent aux Algériens. Ce que l'on veut, c'est de l'interactivité, a-t-il ajouté. Ce n'est pas le cas, a priori. Explications : les experts de la Banque mondiale invités au work shop dont il est question ne semblent pas être à la hauteur de ce à quoi croyait le CNES. Ils ont fait des exposés sur les systèmes d'évaluation qui se distancient de ce que veut l'institution que préside Mohamed Babes. Et ce dernier n'a pas été tendre avec eux. Il a dit les choses comme elles sont, tout en mettant les formes. «Il y a une erreur de casting, une entrée dans l'exercice qui me gêne un peu», a-t-il déclaré sèchement à l'adresse des deux experts. Et d'ajouter «Il faut aller au-delà de tout cela, [comprendre du contenu des exposés que ceux-ci avaient faits], j'ai aimé voir un cours magistral porté à telle hauteur de vue». Mohamed Babes a souligné qu'au CNES on a dépassé tout cela et que l'institution qu'il dirige s'était fait représenter par une équipe haut de gamme dans le MAEP (système africain d'évaluation par les pairs), qu'elle y était une partie prenante. Mais à qui la faute ? M. Babes a essayé de resituer les débats en soulignant que c'est le CNES qui est responsable de ce glissement, parce qu'il aurait pu déterminer les termes de référence, de réflexion dès le départ, définir la méthode. L'un des exposés objet de critique a tourné autour des «cantines scolaires» dans certains pays en voie de développement. Il a été présenté par Damien de Walque, de nationalité belge, économiste au département recherche et développement à la Banque mondiale. Celui-ci a expliqué la méthode appliquée à l'évaluation de l'impact des cantines scolaires dans le système d'éducation, expliquant à l'assistance comment réaliser une évaluation d'impact et ce qui la rend valide. Sommairement, c'est la nécessité de tirer des enseignements de ce qui donne des résultats et de ce qui n'en donne pas, a-t-il ajouté. Son collègue, Najy Benhassine, économiste Senior dans le département régional Moyen-Orient-Afrique du Nord de la Banque mondiale, était de la rencontre d'hier. Il a estimé que les approches dont on voulait parler sont les mêmes, qu'il s'agisse des moustiquaires dans les pays subsahariens ou de l'informatique en France ou aux Etats-Unis. Et de détailler que les standards d'évaluation s'appliquent à une intervention délimitée dans une politique globale. Selon lui, on ne peut pas, par exemple, évaluer le plan de soutien à la relance économique (PSRE) lancé en 2001, ou celui de soutien à la croissance économique mis en œuvre en 2005. Najy Benhassine a relevé que, souvent, et dans beaucoup de pays, y compris ceux de l'OCDE, l'évaluation est portée sur les réalisations. Notre objectif, nos méthodes, c'est d'aller au-delà de ce qui a été réalisé, d'en mesurer l'impact. Y. S.