Le tribunal londonien de Westminster devra rendre aujourd'hui sa décision concernant la demande algérienne d'extradition de Abdelmoumene Khalifa. Après les auditions des témoins et des avocats des deux parties, le juge Timothy Workman devra donc statuer sur le sort de l'ancien patron de l'ex-groupe Khalifa qui s'est réfugié, rappelons-le, depuis 2003, en Grande-Bretagne, et a été condamné par contumace en 2007 par le tribunal criminel de Blida à la prison à perpétuité. Une décision importante pour laquelle le juge risque de prendre un peu plus de temps avant de se prononcer. Rafik Abdelmoumene Khalifa, qui est maintenu en détention depuis son arrestation le 27 mars 2007 à la suite d'un mandat d'arrêt européen formulé par la justice française devait, dans un premier temps, être extradé vers la France le 29 août 2007. Mais la justice britannique a décidé de suspendre cette décision et de donner la priorité à la demande d'extradition algérienne, introduite à la même période, estimant lors de l'enquête préliminaire que les motifs de demande d'extradition de Khalifa présentés par la France «ne représentaient qu'une infime partie de l'ensemble des crimes avérés contenus dans la demande algérienne». Le juge Timothy Workman, chargé alors de trancher cette question, a commencé en mars 2008 l'examen de ce dossier sur le plan de la forme et du fonds et s'est prononcé pour son acceptation. Les audiences se sont ensuite poursuivies pour l'examen du deuxième volet de la demande, à savoir le volet humanitaire. Des audiences ont alors été consacrées à l'examen du volet relatif aux droits de l'Homme conformément aux dispositions de la loi britannique de 2003. C'est la défense de Khalifa qui, après avoir perdu la bataille du «débat de fond», a demandé l'ouverture de l'aspect humanitaire. Elle a affirmé que le débat de ce volet ne pourra se faire sans la présence d'experts sur les droits de l'Homme. L'avocat de la partie algérienne avait anticipé, lors de sa plaidoirie le 3 juin 2008, en rappelant que, dans le volet humanitaire, le juge doit s'assurer que l'individu -objet d'extradition- puisse bénéficier d'un procès équitable et conforme aux règles des droits de l'Homme en vigueur. Ces garanties sont clairement énoncées dans le préambule de la convention relative à l'extradition de criminels entre l'Algérie et le Royaume-Uni, entrée en vigueur en mars 2007, avait souligné la partie algérienne. Malgré ces rappels et lors de la plaidoirie des avocats de l'ex-milliardaire algérien, ces derniers ont fondé leur exposé sur des arguments de nature à dissuader le juge Workman de renvoyer Khalifa devant la justice algérienne. Ils ont alors évoqué un déni total des accusations d'escroquerie, l'absence d'un procès équitable en Algérie et les risques de mauvais traitement et de liquidation physique que pourrait encourir leur client. La partie civile, représentant le ministère de la Justice algérienne, a tenu pour sa part à rappeler un arrêt de la Haute Cour britannique en février dernier, confirmant la décision d'extradition visant quatre islamistes algériens. Quant à la culpabilité de Abdelmoumene Khalifa, la partie civile a remis sur la table tous les documents contenus dans le dossier d'accusation. Reste aujourd'hui au juge de prendre sa décision. Celle qui fera connaître si oui ou non Khalifa doit être renvoyé en Algérie. H. Y.