Photo : Riad Par Amar Rafa Le ministre d'Etat, ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales, Noureddine Yazid Zerhouni, a qualifié de «théâtre japonais de kabuki», avec un souffleur qui dicte aux marionnettistes les paroles, les accusations du général français à la retraite François Buchwalter sur l'assassinat en 1996, par les groupes terroristes du GIA, des moines de Tibhirine, et la campagne qui s'en est suivie.«Pour moi, cela me rappelle un genre de théâtre japonais : le kabuki, qui consiste à faire danser des marionnettes et, à l'arrière-salle il y a un souffleur qui leur dicte les paroles de l'histoire», a déclaré en substance M. Zerhouni, hier, en marge de la cérémonie de finalisation de stations sismologiques, au Centre de recherche en astronomie, astrophysique et géophysique (CRAAG) à Alger. «La scène se déroule, bien évidemment, là-bas à Paris mais pas en Algérie», a-t-il ajouté. Cette déclaration est la première réaction officielle d'un membre du gouvernement algérien depuis le déclenchement de cette affaire suite aux «pseudo-révélations» faites devant la justice française par un général français à la retraite, treize ans après les faits. Cette déclaration vient, en fait, lever le voile sur les manipulations autour de cette affaire, en raison de la qualité de son auteur, en l'occurrence, le ministre d'Etat et ministre de l'Intérieur, Noureddine Yazid Zerhouni. Etant l'un des proches ministres du président de la République et non moins ex-officier supérieur des services de renseignement ayant géré le dossier sécuritaire dix ans durant, ses «sorties» médiatiques ont, à chaque fois, permis de rétablir des vérités sur nombre d'affaires. En témoignent, entre autres, ses déclarations au sujet de l'affaire des deux Algériennes violées et droguées par un agent de la CIA en poste à Alger.Zerhouni aura connu tous les ministres français de l'Intérieur de ces dernières années, y compris Nicolas Sarkozy, avec lesquels il coordonnera l'action sécuritaire. En se rendant en visite officielle en France, il n'y a pas si longtemps, ce n'était certainement pas pour parler des kabukis. Jusque-là, les autorités algériennes, aussi bien que la classe politique nationale, se sont refusées à tout commentaire de ce qu'elles considèrent comme une affaire franco-française, relevant d'une guéguerre interservices de ce pays. Les déclarations autour de l'affaire ne seraient que l'œuvre d'un militaire en retraite en recherche de notoriété, lui-même manipulé par des milieux nostalgiques de l'Algérie française. Ses pseudo-révélations sont remises en cause chaque jour davantage par d'anciens ministres français, dont celui des Affaires étrangères, M. Hervé de Charrette, selon lequel, les revendications du GIA de l'enlèvement et de l'assassinat des 7 moines de Tibhirine (Médéa) avaient été «authentifiées par les services spécialisés français». «Je n'impute à aucune autorité algérienne d'avoir trempé dans tout cela et je crois personnellement que c'est bien le GIA qui en est le responsable», a encore affirmé M. de Charrette. Concernant la note que le général François Buchwalter a prétendu avoir envoyé à l'époque où il était en poste à Alger comme attaché militaire auprès de l'ambassade de France en Algérie au ministère français de la Défense, Hervé Morin, a indiqué mardi dernier, pour sa part, qu'«aucune note de l'ex-attaché militaire français en Algérie sur le massacre des moines de Tibhirine n'a encore été retrouvée par le ministère de la Défense». Enfin, l'ex-ministre français de la Défense, Charles Millon, de 1995 à 1997, à l'époque de l'assassinat des moines, a affirmé n'avoir pas été informé de la piste d'une bavure de l'armée algérienne.