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Les campings sauvages attendent le retour des beaux jours
L'insécurité hante les sites de la côte kabyle
Publié dans La Tribune le 12 - 08 - 2009

De notre correspondant à Tizi Ouzou
Lakhdar Siad
Une bonne décennie de terrorisme et de terreur sociale a suffi pour anéantir les habitudes de pique-niques, de randonnées pédestres, d'excursions, de parties de pêche à la ligne en famille et entre bandes de copains et de camping en plein air soumis à un simple O.-K. de la municipalité. Sans publicité, sans discours sur le développement du tourisme ni programme de réalisation de projets du secteur, le pays était l'une des destinations préférées de touristes venus de tous les pays tous ravis de découvrir cette belle et ensorceleuse contrée appelée Algérie. La Kabylie faisait toujours partie des remarquables notes de voyage emmagasinées par des visiteurs enchantés et décidés à refaire la même halte bienfaisante l'année d'après. Il fallait vraiment le chercher pour pouvoir arriver à supprimer à l'Algérien moyen la part des sorties de détente et de loisirs de ses plannings. Une partie du week-end était toujours celle de la récupération loin de la cité ou de la maison au village. Un bon bol d'air pour déstresser !
Des habitudes nées d'un savoir-vivre hérité d'une culture répandue faite de travail et de repos mérité auquel le commun des habitants avait plus ou moins accès. Puis, arrive la série noire des attentats terroristes, des bombes, des faux barrages, de l'insécurité… Conséquence : plus trace de tentes plantées sur tout espace habitable des abords de la plage et au pied des monts kabyles hantés par des groupes armés au nombre qui reste toujours indéterminé. Des plages, les sites touristiques de montagne et des plaines sont devenus aussi dangereux que les maquis les plus infestés d'Algérie. On étouffe partout sur le territoire algérien. Un vaste territoire aux quatre saisons où les promesses de rétablir l'ordre, la sécurité, la justice et le développement sont restées lettre morte depuis la… première promesse datant de 1962 qui était de faire de notre pays une république démocratique et populaire. Les professionnels du tourisme sont abandonnés et on se permet même d'agresser à coup de décharges d'ordures ménagères et industrielles l'environnement à défaut de le protéger avec peu ou zéro moyen. On rajoute à l'ambiance explicitement malsaine ! Le mois de juillet dernier, Tigzirt, envoûtante ville du littoral kabyle, a craché un feu de colère après des années de silence et d'acceptation des conditions intenables de vie et d'exercice d'activités commerciales sous prétexte sécuritaire.
La corporation des commerçants a appelé et réussi trois grèves successives, la dernière ayant duré trois jours d'affilée. Par la voix de cette catégorie très
touchée par cette politique de sous-développement, les Tigzirtois ont crié «y en a marre» des coupures d'eau potable et d'électricité durant l'été, la seule saison qui fait vivre pendant toute le reste de l'année beaucoup de familles. Ils ont réclamé raccordement au gaz de ville, des structures sanitaires fiables et en quantité suffisante, des navettes régulières à la disposition des estivants et des touristes à destination de Tigzirt, une initiative sérieuse et durable pour la gestion des déchets ménagers, un allégement fiscal avec prise en compte des conditions d'exercice de leur métier, compréhension et «souplesse» dans l'accueil des estivants de la part des services de sécurité et aussi la réouverture de la RN 24 sur 20 kilomètres qui relie leur ville à Dellys.
Autrefois, des groupes d'étudiants, des sportifs de haut niveau, des artistes et des bandes de copains de quartiers ou de villages de Kabylie et d'ailleurs venaient spontanément dès les premiers jours de congé installer leur tente sous des arbustes marins, tout près d'un cours d'eau douce et défrichaient le
maquis alentour à la recherche d'une bonne place pour planter leur camp de fortune et se prélasser à proximité des vagues et du sable qui leur tenaient agréablement compagnie pendant les longues et douces nuits de l'été méditerranéen. La rivière Sidi Khelifa (commune d'Azeffoun) dont le lit coupe le sable de la plage en deux et qui garde toujours un dense filet d'eau douce même durant les semaines les plus chaudes était le plus connu des sites pour camping sauvage. Les habitués des lieux recherchaient la fraîcheur qu'assuraient la verdure alentour et la brise de mer. Un camping-gaz, une poêle, un litre d'huile,
du pain de la veille au minimum, quelques kilos de pomme de terre et des oignons ornaient le décor convivial.
La joie et la gaieté étaient les maîtresses des lieux. «C'est très rare de trouver des campeurs libres dans les alentours, les gens ont perdu cette habitude de s'abriter sous des tentes pour profiter tout le temps des plaisirs de la mer. Les seules personnes que tu vois ici sont des gens des villages de la côte de Tigzirt et, de surcroît, propriétaires des parcelles de terre qui longent la mer. Soit par plaisir ou par nécessité [il y a des marins pêcheurs parmi eux, ndlr] ils tiennent des tentes pour s'abriter», affirme Arezki, un pêcheur de Tigzirt. A qui l'insécurité a-t-elle profité ?


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