Photo : Riad Par Faouzia Ababsa Le tribunal d'El Affroun près la cour de Blida a clos hier les débats sur l'affaire dite OAIC/SIM par la lecture des résumés établis par les deux experts. Lesquels n'ont conclu à aucun préjudice occasionné à l'Office algérien interprofessionnel des céréales. Tout comme ils ont lavé le P-DG de l'OAIC par rapport à l'accusation de passation de marchés non conformes à la réglementation dans le but d'octroyer des privilèges injustifiés. Les deux experts ont voulu pour preuve le statut d'EPIC (entreprise publique à caractère industrielle et commerciale) de l'Office qui n'est pas soumis au décret sur les marchés publics. Par conséquent, les conventions signées avec le groupe SIM ne sont pas illégales. Comme ne sont pas contraires à la règlementation les remises dont a bénéficié l'entreprise privée dès lors que le P-DG de l'OAIC a eu le quitus du chef de gouvernement de l'époque et de sa tutelle (ministère de l'Agriculture dirigé alors par Saïd Barkat), en vertu d'un décret disposant de la remise de fidélité. De plus, les rabais ne concernaient pas le blé tendre qui est subventionné par l'Etat, mais le blé dur. En revanche, les deux experts ont constaté que le blé orienté vers l'alimentation du bétail n'a pas été comptabilisé ni enregistré sur procès-verbaux. La parole fut ensuite donnée à la partie civile (le ministère de l'Agriculture) qui a déclaré qu'elle n'avait aucune requête à formuler, voire qu'elle se retirait puisque aucun préjudice n'a été subi par l'Office. Ce qui ne manqua pas d'étonner l'assistance et de provoquer le courroux du procureur qui lui succédera pour formuler ses réquisitions. Il se demandera, sans le citer, comment le département dirigé par Rachid Benaïssa ose conclure à l'absence de préjudice alors que «140 000 tonnes de blé se sont volatilisés». Il enchaînera en se déclarant insatisfait des conclusions des deux experts. Les rapports sont superficiels, lancera-t-il calmement. Il haussera le ton lorsqu'il s'adressera directement au P-DG de l'OAIC et à ses coaccusés. Il les accusera d'être à l'origine de la faillite des ERIAD, fleuron de l'industrie céréalière en Algérie. Le procureur troquera sa robe de représentant du ministère public contre celle d'avocat : «Si vous les aviez aidées comme il vous a été demandé par le chef de gouvernement et qui a émis deux instructions, elles seraient aujourd'hui en activité et ses travailleurs en poste.» «Ces entreprises ont prouvé leur compétence et les Algériens étaient fiers du produit qu'elles commercialisaient.» Et le représentant du parquet d'ajouter : «Vous avez la faillite et la fermeture des ERIAD sur la conscience. Parce que vous avez privilégié une entreprise privée en ne lui vendant que du blé de bonne qualité et avez refilé le mauvais aux ERIAD pour qu'elles ne soient pas concurrentielles, elles ont fini par mettre la clé sous le paillasson et se sont séparées de leur personnel (départ volontaire, inscription à la caisse d'allocation chômage).» Abordant les manipulations manuelles du blé sous prétexte que les balances étaient déréglées, il dira tout simplement : «Même si vous aviez des balances électroniques, vous auriez trouvé le moyen de les détraquer pour accomplir votre forfait.» Et de questionner : «Ce n'est que lorsque l'affaire a éclaté que vous avez comme par enchantement trouvé la solution.» Le représentant du ministère public conclura par des demandes pour le moins dures pour certains et indulgentes pour d'autres. C'est ainsi qu'il a requis 7 années de prison ferme et 1 million de dinars d'amende à l'encontre de Kacem Mohamed, P-DG de l'OAIC, et 5 ans fermes pour le patron du groupe SIM avec confiscation de ses biens pour couvrir le montant du préjudice subi par l'Office lorsque le tribunal l'aura évalué. Il demandera 5 années de prison et 1 million de dinars d'amende à l'encontre des trois autres cadres de l'OAIC. Les autres peines demandées varient entre 1 à 3 années de prison ferme et 20 000 à 200 000 dinars d'amende. Les articles de loi sur lesquelles s'est appuyé le procureur général pour formuler ses requêtes sont essentiellement les articles 26 et 29 de la loi relative à la prévention et à la lutte contre la corruption, lesquels disposent pour le premier que «sont punis d'un emprisonnement de 2 à 10 ans et d'une amende de 200 000 à 1 000 000 DA tout agent public qui passe, vise ou révise un contrat, une convention, un marché ou un avenant en violation des dispositions législatives et réglementaires en vigueur en vue de procurer à autrui un avantage injustifié». Et pour le second : «Est puni d'un emprisonnement de 2 à 10 ans et d'une amende de 200 000 à 1 000 000 DA tout agent public qui soustrait, détruit, dissipe ou retient sciemment et indûment, à son profit ou au profit d'une autre personne ou entité, tout bien, tout fonds ou valeurs, publics ou privés, ou toute autre chose de valeur qui lui ont été remis soit en vertu, soit en raison de ses fonctions.» Les avocats ont entamé leurs plaidoiries hier. Elles ne s'achèveront qu'aujourd'hui. Suite à quoi, le président de l'audience fixera la date du verdict.