Photo : S. Zoheir Par Salah Benreguia S'il y a effectivement du bonheur à fêter l'Aïd El Adha (la fête du sacrifice), «le prix de revient» de cette fête reste une véritable saignée pour les bourses moyennes. Depuis quelques années déjà, le budget fixé pour l'achat du mouton de l'Aïd dépasse largement le montant du salaire de la majorité des Algériens. Et cette année également, les prix frisent l'irrationnel. Toutefois, cet état de fait ne dissuade guère les citoyens. Pour eux, le sacrifice du mouton est… sacralisé. En effet, afin de suivre le rite d'Abraham, qui n'est pourtant qu'une tradition «bénie» et non un devoir «canonique», beaucoup d'Algériens vont faire (certains l'ont déjà fait) les acrobaties les plus spectaculaires pour s'offrir le fameux mouton de l'Aïd. Peu importe si l'on doit emprunter les jours d'après. Il n'est nullement question d'ignorer cette dépense, facultative comme explicitée par les exégètes de l'islam, mais perçue tel un impératif domestique ingénieusement sacralisé par une tradition séculaire. Hélas, l'anarchie qui règne dans les marchés hebdomadaires, conjuguée au laisser-aller des pouvoirs publics, ont laissé les maquignons profiter de cet état de fait. Ils ont sauté à pieds joints sur l'occasion pour prendre à contre-pied tous ceux qui espèrent acquérir le mouton à un prix raisonnable. Ils ne se gênent pas, en effet, d'exposer «leur marchandise» dans les endroits les plus imprévisibles, (autoroutes, places publiques…), notamment dans les grandes villes, cherchant à «vaincre» les dernières hésitations des éventuels acquéreurs, mais sans manquer de placer la barre très haut. Cette année, le prix d'une bête moyenne oscille, à quelques jours de ce cérémonial, entre 25 000 et 40 000 DA. Motif avancé : le mouton est toujours cédé en fonction du prix de l'orge, estimé à 2 500 DA le quintal, et du fourrage, cédé à environ 1 000 DA le quintal, soit des prix hors de portée des éleveurs. La cause de ces augmentations vertigineuses est, selon les spécialistes en la matière, la spéculation tous azimuts qui marque généralement cette période et l'intérêt accordé par ces éleveurs… improvisés. Cela dit, malgré la fébrilité et la tension dans les marchés hebdomadaires et quelques boutiques aménagées pour la circonstance, on ne ménage aucun effort pour faire face aux impératifs de cette fête par laquelle on est censé renforcer davantage sa foi en la religion musulmane. «Pour le rituel, il faut des sacrifices.» A elle seule, cette phrase, qui revient ces jours-ci sur toutes les lèvres, montre à tel point les Algériens sont attachés à leurs moutons. Bonne fête quand même !