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Des décisions contradictoires prononcées par la même institution judiciaire
Une villa sise à Bir Mourad Raïs, objet de discorde depuis une trentaine d'années
Publié dans La Tribune le 14 - 02 - 2010


Photo : M. Hacène
Par Hasna Yacoub
Par acte notarié établi par devant un notaire d'Alger, Mme Hanifi Taoues a acquis en 1980 une villa sise cité les Vergers, à Bir Mourad Raïs, auprès de deux Français, les Hydulphe. Cette vente s'est opérée sous condition suspensive de la délivrance par la wilaya d'un certificat de non vacance, remplacé par le certificat d'identification. Ce document n'ayant jamais été délivré par le wali d'Alger, Mme Hanifi a engagé alors une procédure devant la Cour suprême d'Alger. Au cours de la procédure, le wali a produit un procès-verbal d'enquête duquel il résulte que ladite villa a été classée en 1977 comme bien vacant. Mais face aux documents de propriété et de succession des Hydulphe qui ont saisi, à leur tour, la justice, Mme Hanifi a obtenu gain de cause en 1990 lorsque la Cour suprême a rendu un arrêté dans lequel elle déclare la villa un bien privé et héritage des deux vendeurs français. La décision de la Cour suprême s'est prononcée sur la base de la loi. Dans cette décision, il est fait référence à l'article n°63/88 du 18 mars 1963 (texte alors en vigueur lors de la rédaction du procès-verbal d'enquête de la wilaya) qui stipule que «toutes les déclarations de vacance devront être constatées obligatoirement par des arrêtés préfectoraux de même que les arrêtés devront être publiés au Journal officiel dans les 15 jours qui suivent la décision de vacance». La Cour suprême a également pris en considération l'article 11 dudit décret puisque les Hydulphe n'ont pas cessé de réclamer leurs droits de propriétaires et ont établi un acte notarié prouvant leur qualité d'héritiers et que l'on ne peut reprocher à l'un des frères Hydulphe, exerçant à cette époque à Alger, d'être absent du territoire national. Les frères Hydulphe, précisons-le, qui ont hérité de cette ancienne demeure de leur grand-mère après son décès, sont deux frères, l'un est professeur d'enseignement qui n'a pas quitté l'Algérie après l'indépendance et le second est un inspecteur des impôts, né en Algérie mais qui est reparti vivre en France. Les deux vendeurs ont en leur possession tous les documents prouvant la propriété de cette villa à leur famille : un acte de propriété de leur grand père, une succession établie en 1968 à leur grand-mère après la mort de son époux et un acte notarié définissant leur part d'héritage dans ce bien.
Après la décision de la Cour suprême, Mme Hanifi établit un nouvel acte de vente, par-devant un notaire en 1991 et qui sera publié en 1992. Mais ses déboires sont loin d'être terminés. Cette dernière a pensé qu'une fois que la justice s'est prononcée, elle pourra faire valoir ses droits pour demander à M. Gritli -qui vivait avec toute sa famille chez la grand-mère Hydulphe- de quitter les lieux. Mme Hanifi soutient que les Gritli ont occupé la maison après la mort de la maîtresse des lieux, en 1976 alors que ces derniers ont en leur possession des documents signés par feu +Mme Hydulphe les considérant comme locataires.
«En réalité, nous n'avons pas payé la défunte mais en contrepartie, ma femme jouait le rôle de gouvernante chez elle depuis 1964. Après son décès et en l'absence de ses petits-fils, nous avons continué d'occuper la villa qui a été déclarée comme un bien vacant en 1976.
Nous avons continué à payer le loyer auprès de l'OPGI de Bir Mourad Raïs jusqu'à ce que cet organisme accepte de nous céder la maison dans le cadre de la cession des biens de l'Etat en 1995», a soutenu M. Gritli.
Mme Hanifi, acte de vente entre les mains, entame, en 1990, une procédure d'expulsion contre M. Gritli. La procédure dure des années et ce n'est qu'en 1998 que le tribunal de Bir Mourad Raïs prononce l'irrecevabilité de cette demande dans le respect de l'article 530 du code civil qui stipule que «le droit de reprise d'un bien ne peut être exercé que si l'acte d'acquisition a date certaine de dix ans avant
l'exercice de ce droit».
Mme Hanifi fait appel devant la cour d'Alger, obtient gain de cause en 2001 et procède à l'expulsion de M. Gritli. Ce dernier ne baisse pas les bras puisqu'il avait obtenu en 1995, un contrat de location auprès de l'OPGI (Office de promotion et de gestion immobilière) dans lequel il est spécifié que les Gritli payaient régulièrement leur loyer à l'OPGI depuis 1977.
La première incompréhension réside dans l'établissement de ce document : comment l'OPGI a-t-il pu établir un document de location d'un bien reconnu cinq ans auparavant comme bien privé par la force de la loi ? Le bon sens aurait voulu qu'en 1990, la décision de la Cour suprême, une fois prononcée, soit transmise à la wilaya et donc à l'OPGI de Bir Mourad Raïs.
Deuxième incompréhension : la direction des Domaines établit un acte de vente en 1999 à M. Gritli sur la base de la décision de la commission de daïra de Bir Mourad Raïs faite en 1997. Dans cet acte de vente, il est noté que le bien est la propriété de l'OPGI de Bir Mourad Raïs en référence à une décision interministérielle faisant état du transfert des biens vacants au profit de l'OPGI, publiée en 1997 ! Comment une décision interministérielle peut-elle être établie en contradiction d'une décision de justice prise 7 ans auparavant ?
Quel crédit donner à l'arrêt de la Cour suprême, la plus haute instance judiciaire algérienne et dont les décisions sont sans appel, qui a établi, des années auparavant, que cette villa était un bien privé ?
Parallèlement à ce procès entre les Hanifi et les Gritli, la direction des Domaines attaque en 2004 devant le Conseil d'Etat en tierce opposition les Hydulphes pour annuler la décision de 1990 prononcée par la Cour suprême en faveur des deux vendeurs français. La direction n'obtient pas gain de cause puisque le Conseil d'Etat considère dans le fond la demande de la direction des Domaines comme infondée.
Mme Hanifi poursuit toujours sa quête et obtient, en 2007, l'annulation de l'acte administratif de vente entre l'OPGI et la famille Gritli. La direction des Domaines poursuit de son côté les procédures de justice et introduit en 2007 une demande d'annulation de la publicité de l'acte de vente entre Mme Hanifi et les Hydulphe. Contre toute attente, le Conseil d'Etat annule la publicité de cet acte alors même que la jurisprudence de ce même conseil dans l'affaire numéro 008207 du 17 décembre 2002 fait état que «l'annulation d'un acte e publicité implique au préalable l'annulation de l'acte authentique». S'agit-il de deux décisions contradictoires ?
Ou bien s'agit-il plutôt d'une reconsidération de la toute première décision du Conseil d'Etat de 1990 et qui établissait que la villa était un bien privé des Hydulphe ?
Possible, si on précise que dans sa requête de 2004, la direction des Domaines, qui demandait l'annulation de la décision de 1990 prononcée par la Cour suprême, a soulevé un point très important : «La non-reconnaissance du certificat de non- vacance établi en 1976 par la wilaya en raison du non-respect de la procédure, à savoir sa publication dans les 15 jours qui suivent dans le Journal officiel, serait un précédent aux conséquences graves sur l'ordre public et ouvre la voie à des recours pour plus d'un million d'actes de propriété ayant fait l'objet d'actes de publicité.».
Ainsi, la décision de la Cour suprême aurait pu devenir une jurisprudence aux conséquences dramatiques mais est-ce la faute des Hanifi ? Ceux-ci ont recouru à la justice algérienne dans le respect des lois et c'est cette même justice qui a prononcé en 1990 une décision en leur faveur avant de l'annuler 17 ans après !
Dans ce conflit, même les Gritli ne sont pas en faute. Il est légitime qu'un père de famille se batte pour garder un toit à ses enfants, notamment après que les institutions de l'Etat l'aient réconforté en lui cédant le bien et en lui offrant par la même occasion un acte de propriété.
Le plus étonnant dans cette affaire enchevêtrée, sont certainement les décisions contradictoires prises par le Conseil d'Etat.
Cette institution a confirmé en 1990 (chambre administrative de la Cour suprême remplacée en 1996 par le Conseil d'Etat) que la villa, objet de discorde, est un bien privé de Mme Hanifi et de ceux qui lui ont vendu le bien, avant de fournir à son adversaire les documents lui permettant d'obtenir son expulsion.
Pour poursuivre l'histoire des déboires judiciaires des deux familles, précisons que Mme Hanifi a introduit un recours de l'annulation de la publicité de son acte de propriété auprès du Conseil d'Etat qui est toujours en instance depuis le 19 novembre 2008 (dossier n° 52449). Pour sa part et après l'annulation de la publication de l'acte des Hanifi, M. Gritli a saisi le Conseil d'Etat pour infirmer la décision d'annulation de son acte de vente avec l'OPGI. Et il a obtenu gain de cause puisque le Conseil d'Etat a invalidé la décision d'annulation prise par la chambre administrative de la cour d'Alger en 2007. Avec ces deux décisions (invalidation de l'annulation de son acte de propriété et l'annulation de la publication de l'acte notarié de propriété des Hanifi), M. Gritli a attaqué les Hanifi auprès du tribunal de Bir Mourad Raïs pour expulsion et a obtenu gain de cause après appel, le 5 novembre 2009.
La famille Hanifi risque ainsi de se retrouver à la rue après plus d'une trentaine d'années de combat judiciaire. Elle risque même de ne pas bénéficier des dispositions de l'article 27 du décret 93/03 qui stipule que «les actes administratifs d'attribution, de location ou de cession des ex-biens vacants, établis conformément à la législation qui leur était applicable, ne sont pas invalidés du fait de l'annulation des actes et décisions à l'origine du classement desdits biens en tant que biens vacants.
(…) Pour toute cession effectuée en application de la loi 81-01, l'administration n'est tenue qu'au versement à l'ancien propriétaire du montant du prix réel de la vente, augmenté le cas échéant, de la contre-valeur des réductions consenties par l'Etat aux ayants droit et des intérêts légaux encourus». La raison est simple, ce décret publié en 1993 vient après la décision de la Cour suprême de 1990 qui a considéré la villa comme un bien privé, en plus du fait que la loi n'a pas d'effet rétroactif. Jusque-là, la décision de la Cour suprême n'a pas été annulée mais c'est juste la publication de l'acte de propriété des Hanifi qui l'a été. Précisons également que la direction des Domaines, lors d'une de ses requêtes au Conseil d'Etat d'annuler la décision de la Cour suprême de 1990, avait proposé l'application de l'article 27 du décret susmentionné mais ce dernier a, dans sa réponse, stipulé que l'article en question n'est pas applicable dans ce cas précis. A qui appartient donc cette villa ? Devra-t-elle être cédée aux Hanifi ou aux Gritli ? Là n'est pas l'objet de cet article mais il s'agit plutôt de mettre en exergue le fait que, dans cette longue procédure judiciaire, il y a des décisions prises par le Conseil d'Etat qui sont incompréhensibles. Cette institution a confirmé une première fois que la villa, objet de discorde, était un bien privé. Le Conseil d'Etat a aussi contredit sa propre décision de 2002, considérée comme un cas de jurisprudence, en acceptant l'annulation de la publication d'un acte sans annuler l'acte authentique !
Il s'agit là donc de décisions de justice inédites. Le Conseil d'Etat, placé au sommet de l'ordre juridictionnel administratif, à côté de la Cour suprême qui, elle, est au sommet de l'ordre juridictionnel ordinaire, doit assurer l'unification de la jurisprudence à travers le pays et veiller au respect de la loi, comme le stipule la Constitution. Institué le 28 novembre 1996, le Conseil d'Etat devait remplacer la chambre administrative près la Cour suprême. Sa vocation est énoncée à l'article 152 de la Constitution qui stipule : «Il est institué un Conseil d'Etat, organe régulateur de l'activité des juridictions administratives.» Pour l'unification de la jurisprudence, il faut sûrement
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