Le leitmotiv «le groupe vit bien» des joueurs de l'équipe de France et du sélectionneur s'est fissuré à la lecture entre les lignes de certaines déclarations, avant de voler en éclats : Nicolas Anelka aurait insulté Raymond Domenech à la mi-temps de France-Mexique, selon le journal l'Equipe. Le quotidien français raconte qu'à la mi-temps du match (0-0), le sélectionneur n'avait pas prévu de remplacer Anelka, en dépit de sa pauvre prestation, mais souhaitait juste qu'il arrête de décrocher en permanence, de «dézoner» à volonté. L'avant-centre de Chelsea conteste, Domenech menace de le remplacer. L'insulte aurait alors fusé. «O.K., tu sors», aurait répliqué Domenech, sous le regard médusé des autres joueurs. André-Pierre Gignac joua ensuite la seconde période. Après cet accrochage, la France a encaissé deux buts en seconde période (64e et 79e minutes) et s'est inclinée 2 à 0, compromettant sérieusement ses chances de qualification pour les huitièmes de finale. Dans un communiqué très sec publié à la mi-journée hier, Roselyne Bachelot, ministre française de la Santé et des Sports, a recadré l'intéressé : «La très forte pression qui pèse sur les Bleus n'autorise pour autant aucun dérapage. Les joueurs doivent se rappeler qu'ils portent les couleurs de la France et qu'ils sont considérés comme des modèles par beaucoup de jeunes. Cela les oblige à la retenue et à la dignité.» Anelka a toujours eu des rapports conflictuels avec les sélectionneurs en équipe de France. En août 2003, il avait déclaré dans l'hebdomadaire Paris-Match à propos de Jacques Santini : «Je n'ai pas besoin de l'équipe de France. Qu'il s'agenouille devant moi, s'excuse d'abord, et après je réfléchirai.» L'attaquant avait lancé au début de l'ère Domenech : «Je pense que je ne reviendrai pas en bleu tant que Raymond Domenech sera en place. Même quand il y a 60 000 blessés, il ne me prend pas !» Puis, le joueur avait fait amende honorable et, le 5 octobre 2006, Raymond Domenech l'avait rappelé dans le groupe France. Depuis, le joueur semblait apaisé. Mais sur le terrain, en préparation et en Coupe du monde, il est soudainement redevenu cet individualiste forcené, jouant à contre-courant de l'attaque. Avant la révélation de cet épisode, Jérémy Toulalan, un des rares joueurs à sortir des discours convenus face à la presse, avait admis vendredi : «On est une équipe et forcément dans un groupe, on n'est pas obligés d'être les meilleurs amis du monde.» Pendant la préparation et au début du Mondial, les rumeurs d'isolement au sein du groupe de Yoann Gourcuff ont gonflé, alimentées par certaines déclarations intrigantes, comme celle de Patrice Evra : «Yo, je ne l'entends pas. Pour parler avec Gourcuff, il faut parler à Toulalan. C'est avec lui que je le vois rigoler.» A la mi-journée samedi, ni Raymond Domenech ni aucun joueur n'avaient fait le moindre commentaire. La première réaction est venue du vice-président de la Fédération française de football, Christian Teinturier. «Si les mots ont été employés […] il aurait dû être expulsé [du groupe] tout de suite, ou s'excuser. Sinon, il ne devrait pas réapparaître sous un maillot d'entraînement de l'équipe de France», a déclaré M. Teinturier sur France Info, estimant que Jean-Pierre Escalettes, président de la FFF, devrait prendre la décision d'exclure Anelka du groupe. Michel Hidalgo, ancien sélectionneur des Bleus (1976-1984), a estimé pour sa part qu'Anelka «ne doit plus porter le maillot de l'équipe de France. A mon avis, il ne portera plus jamais ce maillot».