Ni le marché de la viande rouge ni celui de la viande blanche n'échappent aux fluctuations conjoncturelles de l'offre et de la demande, rendant ainsi les prix sur les étals des plus irréguliers et marqués souvent par des tendances à la hausse subite, notamment à la veille et pendant le mois de Ramadhan. En effet, la consommation de viande fraîche a toujours atteint son pic pendant cette période de l'année. Une donne qui n'a jamais échappé aux acteurs du circuit de la commercialisation des produits carnets frais. Ces acteurs mettent à profit ce mois durant lequel la consommation, et donc la demande, monte en flèche, pour mieux se remplir les poches. Ce phénomène ne date pas d'hier. Il est récurrent et aussi cyclique que le mois qu'il accompagne. Pour cette année, les pouvoirs publics semblent décidés à freiner cette spéculation sur les prix, en optant pour l'importation par le biais d'opérateurs nationaux. Ainsi, pas moins de 5 000 tonnes de viande ovine fraîche seront introduites sur le marché à l'occasion du mois de Ramadhan. «Le but recherché à travers cette mesure étant de réguler le marché», affirme-t-on du côté du ministère du Commerce. A ce jour, et selon des sources proches du dossier, des demandes d'autorisation d'importation ont été introduites par des opérateurs auprès des services vétérinaires du ministère de l'Agriculture et du Développement rural, seule instance habilitée à délivrer un tel document. Quant à savoir le nombre exact d'opérateurs et l'origine des importations, les services concernés n'ont rien laissé filtrer. Toutefois, on peut d'ores et déjà avancer que les carcasses parviendront sûrement de pays où les opérateurs nationaux ont l'habitude de s'approvisionner en viande congelée, et où nos opérateurs ont tissé des relations commerciales qui puissent leur permettre de conclure des achats à des prix très compétitifs. On peut citer par exemple le Brésil, l'Argentine, l'Uruguay et la Nouvelle-Zélande. Pour les importations à partir du Soudan et de l'Inde où, semble-t-il les prix sont très avantageux, les choses ne sont pas encore claires. Il serait difficile pour nos opérateurs de se voir accorder l'aval, compte tenu des conditions d'importation telles qu'exigées dans les cahiers des charges, notamment pour le volet sanitaire. Et sur ce point précis, nos services vétérinaires restent très tatillons et vigilants à l'endroit de l'état de santé du cheptel ovin qui nous est proposé à l'exportation. En effet, toute opération d'importation de viande rouge est soumise à des contrôles rigoureux de la part des services vétérinaires algériens afin d'éviter aux consommateurs tout risque de maladie. Au vu de l'expérience que possèdent des pays d'Amérique du Sud traditionnellement exportateurs de viandes rouges (ovine et bovine) contrairement au Soudan et à l'Inde, il devient donc facile d'avancer que le gros des quantités de viande réfrigérées qui seront importées proviendront de l'Amérique. Toutefois, il existe des partisans de l'importation de viande à partir du Soudan, de l'Inde. Ils défendent leur choix par le fait que le Soudan est plus proche géographiquement (cinq heures de transport en avion- cargo) et que le rapport qualité-prix est très avantageux. On ne pourrait pas en dire autant en ce qui concerne l'Inde. Selon le secrétaire général de l'Union nationale des paysans algériens (UNPA), Mohamed Alioui, qui s'est exprimé sur le dossier, «un kilogramme de viande en Algérie équivaut au prix de trois kilogrammes au Soudan. C'est pour cette raison qu'on a lancé un appel à tous les importateurs pour qu'ils s'intéressent ou du moins prospectent le marché soudanais». Des importations pour ramener les prix à des niveaux raisonnables «C'est avant tout pour lutter contre la hausse des prix de ce produit qui se précise de plus en plus, en période de Ramadhan», explique-t-on du côté du ministère de l'Agriculture et du Développement rural à propos du but recherché à travers ce programme d'importation de viande ovine fraîche. «C'est aussi un moyen pour réguler le marché de la viande dominé par la spéculation», a soutenu le premier responsable du secteur, Rachid Benaïssa, lors de ses dernières sorties médiatiques. Le niveau actuel des prix de la viande rouge fraîche sur les étals de détail oscille entre 650 DA et 750 DA le kilo. C'est une légère baisse, par rapport aux prix appliqués en février et mars derniers, période durant laquelle le gigot de mouton et le bifteck bovin s'écoulaient respectivement à 850 DA et 950 DA. «Pour ne pas revenir à ces plafonds, il est devenu impératif de satisfaire l'excédent de la demande du Ramadhan par l'importation», a souligné le ministre. Pour justifier le bien-fondé de l'opération d'importation, M. Benaïssa dira que «le programme vise à contrer les spéculateurs et les empêcher d'imposer leur diktat sur les prix pendant le Ramadhan mais aussi à réguler le marché dans une période où la demande est importante», et cela dans l'attente de la mise en place permanente d'une série de mécanismes de régulation du marché des viandes à la même enseigne que le Syrpalac pour la pomme de terre. Ce mécanisme pourrait consister, d'une part, au délestage du cheptel, dont une importante partie est destinée à l'abattage, et le mettre sous froid et, de l'autre, mettre à la disposition du consommateur de la viande à des prix relativement abordables. Soulignons, enfin, que des opposants au programme d'importation spécifique pour la période de Ramadhan ne se sont fait prier pour faire savoir au grand public, par la voie des médias, pourquoi ils n'approuvaient pas une telle initiative. En tête de liste de ces opposants M. A. Nouad, expert en matière de production animale et vice-président de la fondation Filah Innove (groupe de réflexion) qui a souligné à plusieurs occasions les dangers que peut représenter l'importation de viande ovine et ses conséquences néfastes sur l'élevage en Algérie. Z. A.