Photo : Riad De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi Les portefeuilles minces vont devoir trouver des parades pour jeûner sans contraintes financières ou plutôt sans crédits. De fait, le Ramadhan qui s'annonce cause déjà des soucis financiers surtout aux faibles revenus qui ne savent plus où donner de la tête avec des rétributions qui n'évoluent pas, un pouvoir d'achat qui se dégrade de jour en jour. Certains recourent aux prêts alors que d'autres se contentent de leurs maigres ressources pour faire face aux dépenses du mois. Ce n'est pourtant que le début de la saga d'été en matière de finances puisque l'Aïd et la rentrée sociale prendront le relais. Des dépenses qui ne seront pas non plus de moindre importance. Une situation minée par la spéculation et l'instabilité des prix des produits de consommation tous azimuts. Les pouvoirs publics voient à chaque fois leur effet répressif freiné par des courants… incontrôlables.Les marchands affûtent leurs armes et les bourses moyennes font des calculs pour parvenir à gérer leur maigre budget. C'est l'équation qui revient à chaque arrivée du mois sacré de Ramadhan. Une tradition amère qui n'a pu s'estomper malgré les moult promesses des pouvoirs publics de réguler un marché chaotique. «C'est la même chanson qui revient chaque année. Cela dit, le gouvernement annonce des mesures répressives à l'encontre des spéculateurs et leur enjoint d'inonder le marché en produits à la portée de tous, ne dépassant pas les marges bénéficiaires autorisées par le commerce, en vain», se désole un père de famille qui a eu le tournis en sillonnant les étalages dans un marché. A peine la population a-t-elle essayé de tirer profit de son modeste congé annuel, voilà qu'elle se trouve face à un défi religieux soumis à une mercuriale folle. Il n'empêche que les ménages se sont rués, cette semaine, dans différentes superettes pour faire le plein en denrées alimentaires. Là non plus, il ne faut pas croire que les prix soient assez abordables ou concurrençant largement ceux proposés par les épiciers de quartier. C'est une baisse infime qui appâte la clientèle. Avec la suppression du crédit à la consommation, il est des familles qui recourent à l'hypothèque pour ne pas tomber dans le besoin. Tandis que d'autres croisent les doigts dans l'espoir d'une baraka supplémentaire à leur rémunération en deçà de la moyenne et aggravée par les surcoûts de quelques produits indispensables en ce mois de jeûne. «On ne peut pas se permettre quotidiennement de la viande, qu'elle soit blanche ou rouge, avec ces prix dépassant toute logique», s'inquiète un père de famille. En ce qui concerne la viande importée récemment de l'Inde, d'ores et déjà les résidants qu'on a accostés pour s'enquérir sur le sujet affichent un niet quant à voir cet aliment dans leur chorba ou leurs autres mets durant le mois sacré. «Je ne comprends pas pourquoi l'Etat a recouru à ce pays asiatique pour en importer de la viande. Alors que d'autres contrées sont bien meilleures en élevage bovin. Cela est-il tributaire du rapport qualité-prix ? Seuls les décideurs détiennent une réponse à cette question», s'interroge un consommateur qui préfère manger de la dinde que de s'approvisionner en veau d'Inde. Plus ironique, un autre résidant estime que l'Inde est réputée pour ses films et non pour ses viandes… «S'il est des nations qui s'y approvisionnent, on estime que ce ne devrait pas être le cas pour nous. Il faut chercher un bon fournisseur, du moins connu…» a-t-il jugé. A vrai dire, cette réticence manifestée à l'égard de la consommation des produits s'est installée bien avant. Elle remonte déjà au feuilleton et au doute ayant accompagné l'importation de la pomme de terre il y a quelques années. «Ce n'est pas aussi vital pour moi de manger de la viande congelée, encore que son prix et sa provenance ne soient pas persuasifs», lance un autre consommateur près d'une boucherie de marché. Il ajoute qu'il faut savoir se retenir et gérer son budget. Après tout, c'est la seule alternative pour les bourses moyennes et les familles nécessiteuses.Sur un autre chapitre, les commerces constantinois ont connu autant de perturbations, notamment au mois de juillet où le pain s'est fait tant désirer. Et les vendeurs à la sauvette à la rescousse des retardataires ont été chassés par le service d'ordre. Avec la fermeture de quelques boulangers pour congé annuel ou pour travaux dans la perspective de renouer avec le mois de Ramadhan, les citoyens peinent jusqu'à ce jour à trouver une baguette de pain. Un manque qui aura fait le bonheur des vendeurs de galettes artisanales ou industrielles aux côtés du pain maison cédé à 30 DA le quart. De plus, la régulation et l'application du service minimum garanti des boulangers semblent avoir été piétinées. Ni la DCP ni l'UGCA ne sont parvenus à imposer leur règle pour éviter aux citoyens le calvaire au quotidien. Cette pénurie de pain est liée évidemment aux congés des boulangers. Mais avec un peu de conscience et de bon sens, la tension n'aurait pas lieu d'être. Le Ramadhan s'annonce difficile non seulement par l'éventuelle montée du mercure en ce mois d'été mais aussi par la flambée des prix qui vont être difficiles à digérer lors du rite.