La politique étrangère de l'Algérie, basée sur le principe de la non-ingérence, a toujours été observée par les pouvoirs publics et exécutée par la diplomatie. Si la répression des révoltes populaires en Tunisie et en Egypte a été grandement limitée par l'attitude noble et responsable des armées des deux pays, et dont les positions ont accéléré la décantation et la chute des dictateurs des deux pays, la situation en Libye est tout autre. Il ne s'agit pas d'une répression policière classique qui n'est pas moins condamnable. Une partie de l'armée libyenne, soutenue par des mercenaires étrangers et par des milices locales, mène un génocide en règle contre les populations désarmées et tout silence sur ces crimes contre l'humanité constituerait un crime pour non-assistance à peuple en danger de mort. A ce titre, la réprobation des crimes que commet Kadhafi contre le peuple libyen par vengeance pour avoir remis en cause son règne sans partage n'est pas le monopole de l'Occident, mais le devoir en premier lieu des Etats du Maghreb. Au nom des liens historiques, identitaires et de solidarité entre les peuples, l'Algérie est appelée à jouer un rôle de premier plan pour l'assistance et la protection du peuple libyen qui se soulève pour recouvrer sa liberté, sa dignité et décider de son destin. Au-delà des déclarations de principe qui ne doivent souffrir aucune ambiguïté quant à la condamnation du génocide que commet Kadhafi contre le peuple libyen, l'Algérie, le Maroc, la Tunisie et la Mauritanie doivent agir en urgence pour reprendre l'initiative dans l'espace maghrébin afin d'assister les Libyens dans leur détermination à se libérer d'un tyran. L'Algérie et la Tunisie, pour des raisons géographiques, doivent ouvrir leurs frontières aux exilés libyens qui ne peuvent, pour quelque raison que ce soit, tenir tête à la machine criminelle de Kadhafi et qui redoutent une guerre civile dans ce pays. C'est justement face au spectre d'un déchirement réel de la Libye que les quatre pays de l'UMA, en concertation avec des voix autorisées de la Libye, doivent tenir en urgence un sommet extraordinaire pour prévenir le chaos programmé en Libye. Enfin, face à ce risque sérieux d'éclatement de la Libye et des convoitises sur ses richesses naturelles, une ingérence internationale n'est pas à écarter, y compris une intervention militaire occidentale qui pourrait faire de la Libye un autre Irak et un autre Afghanistan au Maghreb, d'autant plus que l'ONU a qualifié le génocide contre le peuple libyen de crime contre l'humanité. Les pays de l'UMA sont de facto face à leur responsabilité historique et à un défi sérieux dont les conséquences constituent un risque gravissime pour toute la région. Les pays de l'UMA n'ont pas le droit de tergiverser, ni de se contenter de formules diplomatiques incompatibles avec la gravité de la situation dans un pays membre du projet régional. Il est temps que l'UMA honore les peuples et cesse d'être un syndicat des gouvernements. A. G.