Synthèse de Ghada Hamrouche Le président yéménite Ali Abdallah Saleh, dont le départ est prévu par un plan des monarchies du Golfe, a menacé de ne pas signer cet accord et accusé le Qatar de «complot», dans une déclaration publiée hier. «Les contacts sont en cours pour la signature lundi à Riyad [...]. Mais nous avons des réserves sur certains médiateurs du Conseil de coopération du Golfe (CCG), impliqués dans un complot», a déclaré M. Saleh dans une interview à la chaîne «Russia Today», publiée par les médias locaux. Le président yéménite a cité nommément le Qatar : «C'est l'Etat du Qatar qui finance actuellement le chaos au Yémen, ainsi qu'en Egypte et en Syrie et partout dans le monde arabe.» Il n'hésitera pas à menacer de faire faux bond à la cérémonie prévue à Riyad la semaine prochaine. «Nous nous réservons le droit de ne pas signer si des représentants du Qatar sont présents» à la cérémonie, a menacé M. Saleh. Les chefs de la diplomatie du CCG (Arabie saoudite, Bahreïn, Emirats arabes unis, Koweït, Oman et Qatar) doivent se réunir demain à Riyad pour finaliser les dispositions du plan sur une transition du pouvoir au Yémen, avant de le soumettre en principe à la signature du régime et de l'opposition yéménites. Les monarchies du Golfe, inquiètes de l'instabilité au Yémen, parent pauvre de la péninsule Arabique, ont élaboré un plan prévoyant la formation par l'opposition d'un gouvernement de réconciliation nationale, puis la démission un mois plus tard, avec une garantie d'immunité, du président Saleh. Une élection présidentielle devrait ensuite avoir lieu dans les soixante jours. La médiation du CCG, lancée début avril, avait provoqué alors une crise diplomatique entre Doha et Sanaa, qui avait rappelé son ambassadeur au Qatar pour protester contre une déclaration du Premier ministre qatari, cheikh Hamad Ben Jassem Al Thani, appelant au départ de M. Saleh. «Ils (les Qatariotes) ont beaucoup d'argent et ils sont peu nombreux [...]. Ils veulent s'imposer comme une grande puissance dans la région [...] grâce à la chaîne Al Jazeera», a-t-il dit dans une attaque virulente contre le Qatar. La chaîne Al Jazeera du Qatar, qui a révolutionné l'audiovisuel dans le monde arabe depuis sa création en 1996, assure une large couverture des mouvements de protestation dans le monde arabe, qui ont déjà balayé les présidents tunisien et égyptien et menacent beaucoup d'autres dictateurs dans le monde arabe. Les manifestants, quant à eux, ne réclament rien d'autre que le départ du président Saleh, au pouvoir depuis trente-deux ans. Sur le terrain de la contestation justement, la liste des victimes de la répression continue de s'allonger. Deux autres personnes ont été tuées dans la nuit de jeudi à hier dans des heurts avec les forces de sécurité. Les manifestations se sont également poursuivies au même rythme. Des dizaines de milliers d'opposants au président yéménite ont manifesté à l'issue de la prière, hier, pour lui demander à nouveau de quitter le pouvoir, tandis que ses partisans ont défilé aux cris de : «Le peuple veut Ali Abdallah Saleh».