Photo : S. Zoheir Par Billal Larbi à l'instar des années précédentes, la solidarité a été au rendez-vous des cœurs charitables durant ce Ramadhan. Des services sociaux aux APC en passant par le Croissant-Rouge algérien (CRA) et les restaurateurs privés, le Ramadhan reste le mois où se conjuguent tous les efforts pour apporter un peu de baume au cœur des nécessiteux, et l'occasion, par excellence, de démontrer que la chaîne de solidarité est toujours aussi forte. Les éléments du CRA, un des maillons forts de la chaîne de la solidarité nationale, accomplissent un véritable travail de titan en vue d'apaiser la faim de cohortes de citoyens vivant dans un dénuement sans cesse croissant. Il est midi en ce vendredi, 19e jour du mois sacré de Ramadhan. Une pluie fine commence à s'abattre sur la capitale avec un vent léger. Comme à pareille heure durant le mois de Ramadhan, les rues et ruelles sont quasiment vides. Des fidèles déambulent dans l'attente de se diriger vers les mosquées en vue d'accomplir la prière du vendredi. Au Croissant-Rouge algérien sis rue Mulhouse, une ambiance bon enfant régnait. Elle contrastait terriblement avec le temps maussade qui régnait dehors. Au niveau de la cuisine, un groupe de personnes s'affairait à préparer le repas qui sera offert aux jeûneurs une fois l'heure du f'tour arrivée. Les tâches étaient minutieusement réparties. Une personne découpait la viande, une autre râpait la pomme de terre et les carottes tandis qu'une autre encore coupait les oignons. Tous les ingrédients nécessaires à la préparation du repas étaient disponibles. Une vieille dame, assise sur une chaise, épluchait les oignons. «Je ne fais pas partie du staff chargé de la préparation et de la distribution des repas. A vrai dire, je suis une femme démunie en quête d'aide de la part des agents du CRA. J'ai proposé à ces jeunes de les aider dans leur travail car je ne peux pas prendre quoi que ce soit sans contribuer ne serait-ce que de manière symbolique», nous dira-t-elle. Dans la foulée, elle nous informera que ses 2 enfants, âgés respectivement de 49 et 45 ans, sont au chômage. Cette dame constitue certainement un échantillon représentatif des 500 personnes environ qui viendront tout à l'heure rompre le jeûne, des personnes faisant partie des pans les plus démunies de la société, et que la récession économique (et son corollaire, le chômage) a poussées au dénuement. Pour en revenir à l'équipe chargée de préparer le repas, Nouredine Abdelghafour, cuisinier en chef, nous fera savoir que le travail commence tôt dans la matinée. «L'approvisionnement en denrées alimentaires se fait la nuit. Le matin, dès notre arrivée, nous commençons par couper la viande et préparer les différents légumes inclus dans le menu. Ce sont des gestes mécaniques que nous faisons depuis pas mal de temps déjà», nous dira notre vis-à-vis, non sans nous informer que, pour ce qui le concerne, il a une expérience de quatre ans dans le domaine de la préparation des repas au Croissant-Rouge. Il nous fera savoir également que tous les jeunes (ayant travaillé au sein du Croissant-Rouge algérien) qui convolent en justes noces lui demandent de leur préparer le repas le jour de leur mariage. Avant de prendre congé de lui, notre hôte nous informera que le menu de la journée est constitué de chorba, kbeb, salade et poisson. Les étudiants, l'autre ressource intarissable du CRA A côté du «chef», deux jeunes, tout sourire, visiblement timides, coupaient les légumes tout en les mettant dans deux grands récipients. Nous sûmes, de prime abord, qu'il s'agissait d'étudiants. «Nous travaillons ici à titre bénévole. Il y a beaucoup d'étudiants activant au sein du Croissant-Rouge algérien, particulièrement durant le mois de Ramadhan. Personnellement, j'estime qu'il y a plusieurs manières de montrer sa solidarité envers les personnes qui sont dans le besoin. Certes, donner de l'argent constitue la meilleure chose que l'on puisse faire à l'adresse des nécessiteux. Mais pour celui qui n'a pas d'argent, à l'image de nous autres étudiants, il peut toujours donner de son temps ou de son énergie. Si beaucoup d'entre nous ont la chance de manger en famille, de surcroît autour d'une table copieusement garnie, il ne faut pas perdre de vue que nombreux sont ceux qui n'ont rien à se mettre sous la dent à l'heure de la rupture du jeûne. En tout cas, je vous dirais qu'en m'adonnant à pareil acte, consistant à venir en aide à autrui, je n'aspire qu'à me rapprocher de Dieu, d'autant que la conjoncture [mois sacré] s'y prête. Mettre un peu de baume au cœur des nécessiteux procure un plaisir inégalable», nous dira, affable, un jeune étudiant à la faculté d'Alger. Lui emboîtant le pas, une jeune dame, s'affairant à râper la pomme de terre, nous parlera de son expérience dans le bénévolat. «J'ai déjà travaillé en 1998 comme bénévole au sein du Croissant-Rouge. J'estime que depuis ce temps-là peu de choses ont changé. L'on se rend compte que de nombreux pans de la société n'arrivent pas à joindre les deux bouts et c'est pour cette raison que nombre d'entre eux viennent manger au siège du CRA», soulignera-t-elle. Et afin d'avoir de plus amples informations sur l'aspect financier de cette opération solidarité pendant le mois sacré, nous nous sommes dirigés vers la direction générale du Croissant-Rouge algérien sise boulevard Mohamed V. Nous avons vainement attendu qu'un responsable daigne nous informer. Le lendemain (samedi), nous retournerons sur les mêmes lieux en vue de terminer notre travail. Mais, il était dit quelque part que nous resterions sur notre faim car le responsable en question était toujours aux abonnés absents. En fin de journée, à quelque 20 minutes de l'appel du muezzin annonçant la prière du maghreb et la rupture du jeûne, le réfectoire du CRA est plein comme un œuf. Des personnes de tout âge étaient attablées attendant l'heure du f'tour. Même si l'ambiance était quelque peu différente de celle prévalant au sein de la cellule familiale, il n'en demeure pas moins que les gens mangeaient dans un esprit de fraternité et de convivialité bien particulier. Les formules de politesse et les sourires des jeunes serveurs, des étudiants universitaires pour la plupart d'entre eux, qui, faut-il le souligner, ne mangeront que bien après l'heure fixée pour la rupture du jeûne, étaient à eux seuls suffisants pour mettre du baume au cœur de ces personnes que les vicissitudes du temps n'ont pas épargnées.