L'attitude de l'APN face à certaines dispositions des projets de loi de réformes politiques est révélatrice des calculs des partis de l'ex-coalition présidentielle qui se positionnent déjà dans la perspective des prochaines législatives. Le soutien à la démarche du président qui voulait engager des réformes en douceur, sans remettre en cause la légitimité d'une APN mal élue, n'aura été en fin de compte qu'un discours creux, puisque le FLN, majoritaire, a travesti le sens des dispositions les plus importantes, alors que le MSP ne veut pas se mouiller optant pour une abstention qui équivaut à un «wait and see». Quant au RND, il a préféré fonctionner par le compromis afin de ne pas gêner le chef du gouvernement et de préserver un exécutif hétéroclite qui n'a plus de sens et qui n'a plus de raison politique d'être. En crise chronique, le FLN, qui se cherche depuis qu'il a été remis en selle lors du 4e congrès de 1979, n'a toujours pas une ligne directrice qui en ferait un parti basé sur des principes, une doctrine claire et une démarche qui transcenderait les querelles et l'allégeance à un leader proclamé par le «cabinet de l'ombre» d'antan. Sans ce «messie», le FLN est perdu, sans repères et sans objectif commun. Aujourd'hui, le vieux parti est face à lui-même, à ses limites politiques et à ses contradictions historiques qui l'ont enfermé depuis toujours dans un appareil électoral administré et téléguidé. Qui aujourd'hui, au sein du FLN, peut fédérer les rangs ? Ses figures de proue qui développaient des idées politiques ont quitté le parti. Ceux qui se disputent aujourd'hui le leadership n'expriment aucune tendance politique et ne présentent aucun programme alternatif. Aucune lisibilité sur la base de divergences politiques ou idéologiques n'est possible pour l'heure. Le «redressage» du FLN est l'unique argument de ceux qui en sont les dirigeants officiels et de ceux qui remettent en cause la légitimité de la direction actuelle. C'est dans ce contexte de crise et de flou que le FLN se présentera aux législatives de 2012, avec cet espoir de réaliser un score meilleur que celui de 2007. Ses positions vis-à-vis des réformes ne le distinguent pas du MSP qui voit en la victoire d'Ennahda tunisienne un signe sur l'islamisation de la société algérienne qui ferait du parti de Soltani, la majorité parlementaire de 2012. C'est à ce titre que l'abstention est la stratégie des frères musulmans algériens qui lancent un message à son électorat potentiel : «Ce processus de réforme n'est pas le nôtre.» Mais le MSP ne va pas jusqu'au bout de sa logique de rupture avec le système. Il reste dans le gouvernement et joue à l'opposition propre. Enfin, le RND qui reconnaît à demi-mot que l'Alliance est bel et bien finie, joue à l'équilibriste pour éviter une crise politique de nature à souffler le gouvernement. Au moment où les choses changent en profondeur dans la région immédiate de l'Algérie, la majorité hétéroclite de l'APN cherche des compromis qui garantiraient sa pérennité politique au-delà de 2012. Mais les trois partis semblent oublier les pouvoirs du président de la République qui voulait terminer son troisième mandat en plaçant l'Algérie dans la trajectoire d'une démocratie moderne. Bouteflika a dû se rendre compte qu'il a soumis ses projets de réforme à des conservateurs qui pensent plus à leurs intérêts partisans qu'au devenir de la nation dans un contexte d'incertitudes et de risques. A. G.