Après cinq ans de monotonie et de platitude, l'Assemblée populaire nationale (APN) vit, ces derniers jours, au rythme de «batailles» rangées opposant les représentants des différentes entités du pouvoir. L'opinion publique assiste, en effet, à une guéguerre qui s'apparente à une véritable lutte des clans du pouvoir dans l'arène de la Chambre basse du Parlement. D'un côté, il y a des luttes partisanes entres les formations politiques composant l'Alliance présidentielle (FLN, RND et MSP) qui sont, de surcroît, partie prenante du gouvernement. De l'autre, il y a une confrontation entre des membres de l'Exécutif et les députés du FLN autour des projets de loi élaborés dans le cadre «des réformes politiques» promises par le président Bouteflika. Ce scénario intrigue plus d'un, d'autant plus que le chef d'orchestre de «ces réformes», applaudies par ces mêmes parties qui s'affrontent actuellement, se contente d'observer la scène sans mot dire. «On entend beaucoup de voix discordantes qui appartiennent pourtant toutes au pouvoir à propos du contenu des réformes voulues par le président, sans que celui-ci n'intervienne pour recadrer tout le monde», commente le politologue, Rachid Grim. Quelle est la finalité de cette bataille ? Qui en sortira vainqueur ? Ces luttes traduisent-elles réellement des divergences au sein du régime, ou bien ce sont de simples mises en scène pour mieux vendre à l'opinion nationale et internationale «des réformes», dont la démarche n'a pas convaincu l'opposition ? Pour tenter de comprendre, il est nécessaire de rappeler les prochains enjeux politiques. Il y a d'abord la fin de la troisième législature, qualifiée de plus mauvaise par les députés même par des partis au pouvoir, et l'approche des élections législatives de 2012. Dans la perspective de cette échéance, les appétits prennent de l'ampleur. Les partis de l'Alliance présidentielle, en particulier le FLN, ne veulent pas perdre leur position de parti majoritaire au sein des assemblées élues. «Le FLN doit garder sa position de formation majoritaire», clamait le secrétaire général de l'ex-parti unique, Abdelaziz Belkhadem, à chacune de ses interventions. Cela explique, en partie, la rivalité actuelle entre ce parti et son frère ennemi, le RND, à l'APN. Ils ne s'entendent finalement sur rien : divergences autour du mode d'élection des présidents d'APC, sur la représentation des femmes au sein des institutions élues, sur le contenu du projet de loi électorale… et sur le projet de loi sur les partis. Ces formations, qui s'efforcent de présenter une entente factice, divergent sur le fond. Et quand on sait que chacun des responsables de ces deux formations représente un clan du pouvoir, on pourrait déduire qu'au sommet de l'Etat, le consensus autour des futurs orientations politiques ne se dessine toujours pas. Le deuxième enjeu est relatif à la présidentielle de 2014. Contrairement à 2009 où la candidature de Abdelaziz Bouteflika à un troisième mandat s'est décidée depuis l'amendement de l'article 74 de la Constitution de 1996 en novembre 2008, rien n'est encore clair pour la joute présidentielle prochaine. Sauf peut-être une chose : c'est qu'il n'y aura pas un quatrième mandat. Dans cette perspective, le positionnement commence aujourd'hui. Les ambitions présidentielles du patron du RND, Ahmed Ouyahia, et du SG du FLN, Abdelaziz Belkhadem, justifient la lutte actuelle pour la conquête des assemblées élues, en particulier le Parlement. Car c'est au sein de cette institution que seront définis les contours de la prochaine Constitution du pays qui devra redéfinir les règles du jeu politique.