Depuis le 9 octobre dernier, les quelques trois cents travailleurs de la laiterie, privatisée par le gouvernement depuis 2008, sont en grève illimitée pour dénoncer les fraudes dont se serait rendu coupable le repreneur de l'unité et exiger, ni plus ni moins, sa renationalisation. L'exigence des travailleurs étant difficile, voire impossible à satisfaire, c'est le statu quo depuis près de trois mois sans que les pouvoirs publics ni le propriétaire aient pu trouver une solution. Entre-temps, cette unité, qui produit quotidiennement environ 320 000 litres de lait en sachet, continue à être la source des maux de la population en quête d'un sachet de lait subventionné à 25 dinars le litre.Il est vrai que l'Office national interprofessionnel du lait (Onil) n'y est pour rien dans cette crise, d'autant plus que ses services continuent à mettre de la poudre de lait subventionnée à la disposition de la laiterie de Draâ Ben Khedda, même si cette dernière n'est pas opérationnelle depuis le mois d'octobre. Mais le groupe Giplait, auquel est affiliée l'entreprise de Draâ Ben Khedda, ne s'est pas trop empressé de régler ce conflit qui s'est pourtant gravement répercuté sur le quotidien de la population. Les pouvoirs publics, qui ont tenté des médiations et autres dialogues entre les deux parties au conflit, ont brillé par leur timidité dans l'action. Pour le wali de Tizi Ouzou, la coercition n'est pas toujours efficace, même quand la force de la loi est de son côté, après la décision de justice déclarant illégale la grève des travailleurs et leur intimant l'ordre de rouvrir l'unité et reprendre leurs postes. Il se dit plutôt convaincu que le dialogue est le meilleur chemin vers le règlement de tous les conflits. Même l'utilisation de la force publique lundi dernier intervenue en application de la décision de justice rendue le 19 octobre a été lancée sans grande conviction, puisque la résistance des travailleurs qui obstruaient encore l'accès à la laiterie de l'ex-Mirabeau a porté ses fruits après des échauffourées qui ont amené les forces de l'ordre à opérer une retraite.Mais entre-temps, les pouvoirs publics, sentant l'exaspération de la population monter, ont mis sur pied une commission mixte de Giplait et du ministère de l'Industrie qui a effectué le déplacement à l'unité. Les travailleurs de la laiterie, qui ont rendu public un communiqué le jour même pour dénoncer la répression, disent, d'un autre côté, se réjouir de la venue de cette commission mixte «qui a constaté et vérifié la véracité des faits reprochés au repreneur de l'entreprise qui n'a pas respecté les cahiers des charges et qui a multiplié les infractions commerciales et les pratiques frauduleuses». Cette commission d'enquête figure parmi les revendications des travailleurs en grève qui accusent le propriétaire de la laiterie de fraudes et de détournement. Les citoyens de Tizi Ouzou espèrent que cette réaction des travailleurs empreinte de fermeté, dénonçant l'usage de la force publique et de satisfaction, suite à la venue de la commission mixte, suggère une fin proche de ce conflit qui n'a que trop duré. Pour la simple raison que la fermeture de cette unité de fabrication de lait pasteurisé prive la wilaya de Tizi Ouzou de pas moins de 320 000 litres de lait par jour, alors que les besoins de la wilaya sont estimés, en matière de consommation de lait, à 350 000 litres quotidiennement. Donc, il est certainement facile de comprendre que les 100 000 litres produits quotidiennement par les cinq autres petites unités de la wilaya sont loin de suffire à satisfaire une demande de consommation trois fois plus importante. La commission mixte de Giplait et du ministère de l'Industrie est-elle cette porte de sortie de crise que les travailleurs de la laiterie de Draâ Ben Khedda chercheraient depuis que le conflit est dans l'impasse et a exacerbé la patience des citoyens ? C'est le vœu des citoyens, particulièrement les petites bourses, qui en ont marre de payer le lait à 40 dinars ou celui en poudre à plus de 300 dinars. A moins que les travailleurs maintiennent leur revendication de renationalisation de leur unité qui éloignera toute solution proche, alors que le patron de l'unité a toujours soupçonné une main étrangère à l'unité d'être derrière certains employés dans ce conflit.