Le MSP, qui se voit porté par les courants ascendants de la victoire des partis de la même obédience dans les pays voisins, se proclame déjà chef de file de la tendance islamiste en Algérie. Qu'en est-il dans les faits ? Seules les urnes peuvent donner un aperçu du véritable poids de chacune des formations politiques. En vérité, le parti de Bouguerra Soltani paraît beaucoup plus vulnérable et divisé pour pouvoir aspirer, à lui seul, à diriger le courant islamiste. Il doit faire face à la concurrence de Abdelmadjid Menasra, son ex-dauphin et dirigeant d'une nouvelle formation politique dénommée Front pour le changement national (FCN), non encore agréée, née de la scission du MSP. Ce parti, en devenir, a causé une véritable hémorragie du MSP, puisque le Front pour la prédication et le changement annonce qu'il a été rejoint par 50% des militants, et 28 parmi les 52 députés (53,85%) que compte le MSP.Des chiffres qui restent à vérifier, tant que l'autre partie, celle de Bouguerra Soltani, estime que les sécessionnistes, «sont une minorité non influente». Le vice- président Mohamed Saïdi a, lors d'une rencontre des présidents de bureau de wilaya tenue à Zéralda, affirmé avoir «recensé 48 rapports des bureaux de wilaya concernant nos frères sécessionnistes et nous avons constaté que leur nombre ne dépasse pas les 3%».Quant à ses motivations, le fondateur du Front pour la prédication et le changement, a toujours expliqué son geste par la déviation de la ligne authentique du mouvement. Les dissidents se présentent comme les légataires légitimes et dépositaires authentiques de l'héritage du cheikh Nahnah. «Au MSP, il y a eu une grave dérive des principes de Cheikh Nahnah. Il s'agit bel et bien d'un parti qui commence malheureusement à être privatisé à des fins personnelles. Le parti est dirigé par des intérêts personnels», a-t-il indiqué dans un entretien. Ce que soutient une autre tendance au sein du parti, qui, dans une lettre publiée par la presse et qualifiée de «brûlot» par les observateurs, met en avant les graves responsabilités de Bouguerra Soltani dans la crise que vit aujourd'hui le parti. Treize membres fondateurs parmi les plus influents ont publié une lettre dans un site électronique, pour leur part, annonçant la naissance d'une troisième voie avec d'anciens membres fondateurs du parti et amis de Nahnah. Mais quelle différence y a-t-il entre Soltani et Menasra ? Si les positions de Bouguerra Soltani sont connues, le leader du MPC affirme défendre «les constantes nationales et les principes fondamentaux de la démocratie, avec une base islamique». Soltani, pour sa part, qui se projette dans la perspective des législatives de 2012, et même au-delà, pour les présidentielles de 2014, entreprend un repositionnement, quitte l'alliance présidentielle et fait de l'opposition en votant contre les réformes politiques du président Bouteflika. Mais le parti, dont le premier responsable affirme changer de tactique, électoralement s'entend, n'agit-il pas en retard ? En plus de la perte de crédibilité que cela peut provoquer, qui lui serait fatale pour les prochains rendez-vous électoraux, le MSP risque aussi d'y laisser des plumes, pour cause de dissensions internes. Car les deux leaders paraissent surfer sur la même vague, évoluent dans la même sphère, et convoitent la même base. La différence ne serait alors qu'une question de leadership. A. R.