«A qui doit-on s'adresser ? Qui peut nous renseigner sur notre sort ?» Ce sont des questions qui revenaient sans cesse sur les lèvres des souscripteurs de l'Agence d'amélioration et du développement du logement (AADL) d'Alger orientés vers la CNEP-Banque. Réunis hier vers 10h00 devant le siège de la Caisse nationale d'épargne et de prévoyance de Belcourt, une centaine d'hommes et de femmes attendaient patiemment la sortie de leur représentante reçue par les responsables de la banque. Accrochés à ses lèvres dès son apparition, ils l'écoutent religieusement. Mais la déléguée n'est pas parvenue à rassurer les protestataires. «Les représentants de la CNEP dégagent leur responsabilité. Ils disent qu'ils sont une banque, ils construisent des logements, ils n'établissent pas de listes de bénéficiaires», tente d'expliquer la porte-parole. «Et la solution ?» interrogent les manifestants. La décision est prise très rapidement. «Au niveau du siège de l'AADL, ils nous ont orientés ici et les responsables de la CNEP nous renvoient vers l'AADL. La solution, c'est d'aller directement vers la tutelle», tranchent les contestataires. Direction donc le ministère de l'Habitat rue Didouche Mourad. Durant le trajet, les langues se délient. «On ne comprend pas ce qui arrive. On est ballottés d'une institution à une autre. Personne ne veut prendre ses responsabilités. Personne ne veut trancher définitivement sur notre sort. Arrêtons le suspense», s'emporte un quinquagénaire. Selon les protestataires, toutes les personnes présentes sont des postulants à la formule AADL depuis 2001. «Personnellement, j'ai déposé mon dossier parmi les premiers, dès que la formule AADL a été mise en application. On a étudié et avalisé mon dossier. Début 2003, l'agence AADL me contacte pour payer la première tranche. Ma surprise était grande le jour où je reçus une convocation pour signer la nouvelle convention AADL-CNEP. Devant le fait accompli, j'ai dû signer et accepter une majoration du prix du logement (1% pour les F3 et 2% pour les F4). Depuis, j'attends toujours. Et je ne cesse d'être renvoyé d'une institution à une autre sans avoir une réponse claire», raconte un cadre moyen employé d'un ministère. Après de multiples tentatives pour obtenir une réponse claire à leurs interrogations, les protestataires se réunissent sur le trottoir faisant face au ministère. La déléguée entre au siège de l'institution pour s'enquérir de la situation. La centaine de manifestants est «invitée solennellement» par les policiers présents et ceux venus en renfort à se disperser. Calmes mais résignés, les protestataires décident d'attendre leur représentante. Utilisant un vocabulaire pour le moins peu «courtois», un officier les somme de monter sur des escaliers derrière un mur «pour dégager la voie». «Voyez comment on nous traite. La plupart des gens ici sont des cadres moyens. Il y a de vieilles personnes parmi nous. Le 30 avril dernier, en manifestant calmement, nous avons été tabassés sans aucun ménagement et, aujourd'hui, on tente de nous intimider», s'indigne une dame en tailleur, l'air désabusé. «On demande simplement que le programme présidentiel soit appliqué. Nous avons respecté les lois de la République. On n'est pas responsables de la mauvaise gestion de l'AADL», lance un manifestant. Rappelons qu'en 2003, un nombre important de souscripteurs à l'AADL a été invité à signer un engagement pour être pris en charge dans le programme 65 000 logements location-vente de la CNEP. Lors d'une intervention télévisée, le premier responsable du secteur, M. Noureddine Moussa, ministre de l'Habitat, déclare au sujet des souscripteurs AADL orientés vers la CNEP que «ceux avec qui l'Etat n'a pas de contrat devront attendre la réalisation de projets futurs». De son côté, le directeur général de la CNEP-Immo déclare que son institution n'a aucun engagement à respecter avec les souscripteurs pour de futurs programmes AADL mais que les premiers souscripteurs à la formule location- vente CNEP (ceux ayant participé au sondage 2006) seront invités à constituer leur dossier pour postuler au premier lot de 25 000 logements qui seront livrés à l'échéance 2009 dans une dizaine de wilayas. Les demandes de logement au niveau de la capitale sont estimées à 183 000. Actuellement, deux chantiers seulement sont en cours de réalisation par la CNEP-Banque, à savoir celui de Bousmaïl et de Reghaia. Les responsables de la CNEP ont affirmé hier qu'aucune liste ne sera établie pour ces deux sites avant l'avancée des travaux à un taux de 80%, selon la porte-parole des contestataires. Par ailleurs, les manifestants se demandent où en sont les enquêtes menées par l'AADL concernant les indus bénéficiaires de logements et les désistements. «Comment se fait-il que des gens qui ont déposé leurs dossiers après nous en 2002 ou 2003 aient été logés ? Comment se fait-il que des appartements dans des cités AADL soient loués à des tiers ?» s'interrogent-ils. Vers 12h30, les manifestants ont été sommés par les forces publiques de quitter les lieux. S. A.