Photo : Riad Par Wafia Sifouane Présentée dimanche dernier, à la grande salle Mustapha-Kateb, la derrière production du Théâtre national d'Alger Mehieddine-Bachtarzi, Açfar n'ar el barida (les zéros de la flamme froide), inscrite en compétition officielle du 7e Festival national du théâtre professionnel (Fntp) a fait un tabac auprès du public. Un public surpris par un nouvelle approche théâtrale, celle du metteur en scène Haïder Benhssine.Ecrite par le journaliste Saïd Hamoudi, la pièce s'est jouée sur une scène pratiquement nue, où le décor se résume à un banc et quelques objets. La scénographie, également signée par Benhssine, devient accessoire, l'espace se suffit à lui-même, la pièce n'a nullement besoin d'artifices avec une mise en scène aussi insolite que surprenante. La pièce relate l'histoire d'un écrivain tourmenté, il ne sait plus si il doit exister librement ou subir l'autorité du sultan. Interprétée par un groupe de remarquables comédiens, dont Samia Méziane, Hafida Ben Razi, Ibrahim Djabellah et Ahmed Dehame, on constate que tous les personnages portent le nom de Sifr, zéro, un chiffre qui symbolise la non existence, le néant. Joué sur deux niveaux de la scène, au fond on aperçoit Chahrazed, interprétée par Amel Menighed au talent sans égal. Même si le texte est fort poignant et percutant, écrit en prose et pas destiné à être joué sur les planches à l'origine, il devient aussi un prétexte, un accessoire qui sublime la mise en scène. La pièce aurait même pu s'en passer. Audacieux, le metteur en scène s'est focalisé sur l'expression corporelle et scénique de ses comédiens et en leur permettant de s'approprier l'espace, le vide, du jamais vu ! L'éclairage a aussi joué un rôle majeur dans la pièce, ce qui a surpris plus d'un, tout en nous dévoilant une nouvelle approche théâtrale qui reflète une véritable réflexion chez Haïder Benhssine. A l'histoire de l'auteur tourmenté, Chahrazed sort du silence et prend la parole à son tour et se lance dans un véritable réquisitoire. La pièce, qui s'inscrit dans le genre du théâtre expérimental, revêt des allures d'une œuvre abstraite et indéchiffrable, mais, et c'est ce qui est le plus étonnant, malgré sa complexité, Haïder Benhssine a réussi à retenir l'attention du public jusqu'au tableau final, mieux encore, ce dernier a gratifié le spectacle d'une avalanche d'applaudissements. Après plus d'une semaine de compétition, où la qualité s'est fait rare, hormis quelques perles dont les festivaliers continuent de parler, la dernière production du TNA a vraiment fait sensation, même si certains qualifient cette œuvre d'élitiste.