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Quincaillerie culturelle
17E édition du Salon international du livre d'Alger
Publié dans La Tribune le 03 - 10 - 2012


Photo : M. Hacène
Par Lyès Menacer
La dix-septième édition du Salon international du livre d'Alger (Sila 2012) qui a opéré son retour cette année à la Safex, n'a pas dérogé à la règle des précédentes éditions. Outre la chaleur suffocante à l'intérieur des locaux incommodants de la Safex, les organisateurs se sont illustrés par un terrible manque d'imagination concernant l'organisation interne du salon. Les éditeurs-exposants ne sont pas exempts de critiques. Ils sont plus à blâmer que les responsables du Sila qui n'avaient pas pensé à organiser cette édition par disciplines, mélangeant littérature, livre religieux et livre parascolaire, à tel point qu'il est difficile de s'orienter. Ce qui est frappant en fait, c'est la transformation d'un salon pour la promotion de la culture du livre, donc de la culture et du savoir, en un véritable bazar qui ne diffère en rien du marché d'El-Hamiz. Les éditeurs-exposants ont affiché un comportement qui ne diffère en rien de celui des «beggaras» qui ont transformé le Sila en un marché de pièces détachées. Au cœur de cette quincaillerie culturelle, les livres sont amassés à même le sol, dans les minuscules espaces d'exposition. On se comporte avec le livre comme on se comporte avec un produit quelconque. On le déballe, on le dépose n'importe comment et n'importe où dans l'espace loué pour l'exposition, sans jamais prendre le soin d'organiser les ouvrages par thème ou par genre. Certains stands ressemblent aux étals improvisés dans les rues squattées par les vendeurs à la sauvette qui installent quelques échantillons de leurs produits sur une petite table, derrière laquelle le représentant de l'édition est assis enregistrant ses commandes, remplissant ses factures tout en demandant à ses collègues d'aller chercher les cartons stockés au dépôt. Disons que les étals des marchands des fruits et légumes exposent mieux leur marchandises que ces éditeurs qui ont trouvé le livre comme un moyen d'enrichissement.Il est vrai que le livre a intégré le circuit commercial depuis longtemps et que dans les pays développés il est devenu un produit marchand de grande importance. Mais il continue cependant d'avoir la place qui lui sied. Les éditeurs apprennent leur métier d'éditeur comme le médecin apprend d'abord à connaître le corps humain avant d'acquérir le savoir nécessaire pour soigner son malade. Autrement dit, les authentiques éditeurs sont d'abord des lecteurs et des imprimeurs qui savent déceler ce dont leur lecteur a besoin. Or, il s'en trouve qui n'aiment ce métier d'édition que parce qu'il leur rapporte beaucoup financièrement.Ce qui est aussi frappant, lors de ce 17e Sila, c'est ce manque d'animation flagrant au niveau des stands des éditions à vocation littéraire. Dans le stand de Gallimard qui était présent avec son distributeur algérien, tous les livres qui ont marqué la rentrée littéraire de septembre en France ont été exposés. Mais aucun auteur n'a été invité pour rencontrer ses lecteurs. Pourtant, à entendre les discussions des lecteurs, dans les allées de ce stand, on comprend à quel point la littérature éditée en France est très suivie ici en Algérie. Le constat est quasiment le même chez nos éditeurs locaux qui organisent des ventes-dédicaces sans jamais penser à changer la formule du déroulement de cette vente. C'est-à-dire installer un auteur dans un salon où il peut discuter avec ses lecteurs tout en leur dédicaçant son ouvrage. On continue donc à coincer un auteur derrière une table, qui symbolise une frontière imaginaire, et il signe son livre pour son lecteur qui s'en ira pour laisser le champ libre au suivant.D'un point de vue esthétique, les panneaux délimitant l'espace de chaque exposant sont laissés tels qu'ils ont été installés par les organisateurs du Sila. Aucun panneau d'affichage collant avec l'esprit de cette 17e édition n'a été installé pour cacher la laideur des contre-plaqués mis en guise de cloisons de séparation. Des efforts seront-ils donc consentis pour les futures éditions pour redonner au livre sa vocation de lieu de rencontres humaines, même s'il doit garder sa valeur marchande ? Le 18e Sila changera-t-il de configuration ? Les éditeurs auront-ils le génie d'attirer les lecteurs, pas seulement avec l'argument du prix, mais aussi en animant leurs stands au lieu d'étaler des livres que l'on peut trouver dans une librairie avec un meilleur accueil des libraires ? Il faudra attendre septembre prochain pour le savoir.


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