Photo : S. Zoheir Par Badiaa Amarni Depuis l'annonce par le ministre de l'Habitat de la dissolution des EPLF (Entreprise pour la promotion du logement familial) ou du moins de leur réorganisation sous une nouvelle forme, employés et responsables de ces organismes sont dans le désarroi et le flou total. Même les bénéficiaires ne savent plus où donner de la tête. La situation est d'autant plus compliquée qu'aucune information n'a encore filtré depuis l'annonce de cette information quant au sort des nombreux chantiers confiés à ces organismes. Plusieurs postulants ont paniqué pour le devenir de leurs projets dont beaucoup traînent déjà en longueur depuis plusieurs années. C'est à l'exemple des 200 logements socio-participatifs (LSP) de Larbaa dans la wilaya de Blida, confiés à l'EPLF de Boumerdès depuis 2002. L'inquiétude des bénéficiaires ne fait que grandir chaque jour davantage. Un projet à l'arrêt depuis 2002 Pour en savoir plus sur cette affaire, nous nous sommes déplacés sur les lieux et nous nous sommes entretenus avec les concernés qui n'ont pas hésité à faire part de leur peine et de leur longue attente qu'ils n'arrivent pas à comprendre et à s'expliquer. Ils disent avoir frappé à toutes les portes pour régler leur problème, voir redémarrer leur projet et le finaliser pour qu'ils prennent possession de leur logement. La genèse du problème remonte à l'année 2001, date retenue pour le lancement du projet. Ce dernier l'a été officiellement en 2002. Selon nos interlocuteurs, les premières démarches ont été entreprises et des documents ont été signés, engageant ainsi les deux parties qui se sont mises d'accord sur le prix de 1,2 million de dinars. Les postulants confient qu'ils ont même payé la première tranche estimée à 300 000 dinars. Peu de temps après, les travaux ont été lancés pour s'arrêter à la suite du séisme de Boumerdès en 2003, la région ayant été ébranlée. Les postulants signalent qu'ils étaient solidaires, dans une première phase, avec leurs compatriotes sinistrés au malheur desquels ils avaient compati suite à ce tremblement de terre. Par la suite, ont-ils insisté, les choses ont traîné encore et le pire est que l'EPLF a exigé que nous payions un complément. C'est-à-dire, font savoir nos interlocuteurs, «au lieu des 1 200 000 DA prévus initialement, le coût du logement passe à 1 800 000 DA, chose que nous avons refusée. Après beaucoup de réunions consacrées à ce problème, nous sommes parvenus à un compromis, celui de fixer le prix du logement à 1,65 million de dinars». Mustapha, l'un des bénéficiaires du projet, dit que, depuis, «c'est le statu quo et ce, malgré toutes les démarches que nous avons entreprises auprès des instances concernées par ce projet». Même s'il reconnaît que les autorités locales de la wilaya de Blida, à leur tête le wali, «ne sont pas restées les bras croisés devant ce problème», il relève le fait que les choses traînent encore. Et de rappeler que «des écrits ont été transmis au ministère de l'Habitat et même à la présidence de la République mais le projet est encore à l'arrêt». Un chantier à l'abandon Sur les lieux, nous avons pu vérifier de visu les propos tenus par nos interlocuteurs. Le chantier est à environ 30% de taux d'avancement. Mis à part la plate-forme, une première dalle et des murs érigés, il reste beaucoup à faire avant d'achever ce projet tant attendu par les bénéficiaires se disant «lésés» et sollicitant les plus hautes instances du pays d'intervenir pour mettre terme à leur «calvaire» qui n'a que trop duré. Pis, ce chantier est dans un état de délabrement avancé et fait l'objet «d'actes de sabotage», comme nous le confirment nos interlocuteurs. Pour appuyer leurs propos, ils se dirigent vers «une cachette» entre deux murs pour faire sortir et nous montrer des barres de fer cisaillées et destinées, qui sait, «peut-être à la vente illicite», commentent-ils. Mustapha nous confie : «En me déplaçant un week-end sur site, j'ai trouvé des jeunes occupés à cisailler du fer.» Les quelques postulants qui nous ont fait visiter ce chantier font part de leur inquiétude devant cette situation qui ne trouve pas encore de solution. «Nous en avons assez d'attendre l'achèvement de nos logements et nous refusons de payer les frais de ce retard qui ne nous incombe pas», dit un autre citoyen. «Le prix fixé à 1,2 million de dinars était pour nous, fonctionnaires, plus ou moins raisonnable. Mais maintenant que l'EPLF exige une autre somme, nous sommes dans l'incapacité de la payer», poursuit-il. Et de faire savoir sur un ton d'amertume qu'«à l'époque, l'are coûtait entre 100 000 et 120 000 DA à Larbaa. Si on avait acheté 2 ares, nous aurions peut-être pu construire nous-mêmes nos logements au lieu de rester les otages d'une situation que nous n'avons guère choisie». Sur les démarches qu'ils comptent encore faire pour que leur projet voie le jour, les bénéficiaires des logements LSP de Larbaa disent qu'ils ont été jusque-là pacifiques mais ne savent pas ce que «peut provoquer leur colère à l'avenir». Meftah et Bougara, même problème Présent sur le chantier, un jeune garçon interrogé sur cette situation confirme que c'est là un ancien chantier. Pointant du doigt une cité voisine (des logements sociaux), il nous dira que «les travaux avaient démarré bien après et les citoyens habitent depuis un certain temps déjà». Beaucoup d'autres citoyens de la wilaya se sont demandé comment et pourquoi ce projet a été confié à l'EPLF de Boumerdès et non à celle de Blida qui a lancé en même temps un autre projet de logements LSP qu'elle a achevé en 2004. Ce problème doit trouver une solution pour permettre à des centaines de citoyens de trouver un toit pour eux et leur famille. Combien d'autres chantiers des EPLF sont encore en souffrance ? Et combien d'autres citoyens, voire de familles ne savent plus où donner de la tête ? Sûrement qu'ils sont nombreux, et l'annonce de la dissolution des EPLF les a plongés dans le doute et l'incertitude quant au devenir de leurs projets. Déjà, à Blida, nous apprenons que ce problème de retard ne concerne pas uniquement les postulants de Larbaa mais aussi ceux de Meftah (54 logements LSP) dont les travaux sont à 85%, et ceux de Bougara (60 logements LSP) dont le taux d'avancement est de 60%, comme nous le confirme le directeur du logement et des équipements publics (DLEP) de la wilaya de Boumerdès. Les services concernés, de même que les autorités locales, se doivent d'agir pour booster ces chantiers et permettre aux citoyens de prendre possession de leurs logements. B. A. EPLF de Blida : les projets déjà lancés se poursuivent Le P-DG de l'EPLF de Blida dit qu'«aucun projet relevant de son organisme n'est en souffrance». Même avec la décision du ministère de l'Habitat de dissoudre les EPLF, «les chantiers en cours de réalisation se poursuivent en travaux». Bien sûr, poursuit M. Bousbaine Rabah, «suite à cette décision, les projets finis en étude et dont les appels d'offres sont prêts sont à l'arrêt». Cela, en plus de la commercialisation de tous les produits, à savoir la vente des logements, villas et locaux. «Tout est gelé pour l'instant», affirme le P-DG de l'EPLF de Blida, ajoutant que «nous sommes dans l'attente des décisions à mettre en œuvre pour la réorganisation de ces organismes». Notre interlocuteur n'a pas omis de dire que l'inquiétude est grande chez les employés et les entreprises qui gravitent autour de l'entreprise, «même si nous essayons de les tranquilliser et ce, depuis le mois d'août, date depuis laquelle nous nous sommes mis en attente». Sur un ton d'optimisme, notre interlocuteur confie : «Nous savons que les EPLF resteront en vie sous une autre forme, mais tant que l'initiative n'est pas encore libérée, la situation reste problématique.» Interrogé sur les déclarations des hauts responsables, selon lesquelles les EPLF n'ont pas participé à la réalisation du projet du million de logements initié par le président de la République, M. Bousbaine dira que lui-même avait sollicité qui de droit pour lui confier des programmes mais en vain. «Personnellement, j'ai sollicité les autorités concernées pour y prendre part mais elles n'ont malheureusement pas répondu favorablement à ma demande. B. A. La DLEP de Blida : «Le projet sera transféré» Contacté par téléphone, le directeur du logement et des équipements publics (DLEP) de la wilaya de Blida, Baaziz Makhlouf, pour répondre aux préoccupations des bénéficiaires des 200 logements LSP de Larbaa, a indiqué que toutes les démarches sont en train d'être prises pour trouver une solution à ce problème. Il explique que les domaines ont poursuivi en justice l'EPLF de Boumerdès qui a tranché en leur faveur. Et d'ajouter que, suite à cela, la wilaya devait récupérer le projet et le transférer aux promoteurs publics de la wilaya, soit à l'OPGI soit à l'agence foncière. Une cassation pour mieux se défendre a été introduite par l'EPLF de Boumerdès, explique encore M. Baaziz. Et d'ajouter qu'entre-temps il y a eu la décision de dissolution des EPLF. «Malgré cela, et pour le bien des citoyens, nous avons fait une autre réunion avec le nouveau directeur de l'EPLF de Boumerdès qui s'est déplacé chez nous et s'est montré très coopératif. Nous sommes maintenant au stade de la préparation de la décision de transfert du projet». Il faut savoir que les projets en souffrance, laissés en suspens par l'EPLF de Boumerdès, sont les 54 logements de Meftah dont les travaux sont à 85%, ceux de Bougara au nombre de 60 dont le taux d'avancement est de 60% et ceux de Larbaa à moins de 30%. B. A. Projet de Larbaa : toutes les démarches auraient été entreprises
Une source au niveau de la wilaya de Blida, qui a préféré garder l'anonymat, nous a fait savoir que les autorités locales ont tout fait pour débloquer la situation quant au chantier en souffrance de Larbaa. «Depuis la venue du nouveau wali, plusieurs réunions ont été tenues avec l'EPLF de Boumerdès autour de ces logements en souffrance», nous a dit notre interlocuteur, sans donner plus de détail sur «ce dossier qui est devant la justice», conclut-il. B. A. Les EPLF n'ont pas beaucoup contribué à la réalisation du million de logements Dans l'entretien qu'il a accordé à la Tribune dans son édition du 6 septembre dernier, le ministre de l'Habitat a expliqué que les EPLF sont des opérateurs publics. Ce sont des entreprises publiques économiques dont le capital est détenu à 100% par l'Etat. Le bilan fait a démontré que, dans leur forme actuelle, les EPLF n'ont pas contribué pour beaucoup à la réalisation du million de logements. Leur contribution a été limitée, marginale, et il a donc été décidé de mettre fin à cette situation en préservant, bien sûr, le patrimoine de ces entreprises et également l'avenir de leurs travailleurs puisqu'on a besoin des compétences dans le domaine de la promotion immobilière si on veut développer cette dernière, ce qui est le cas justement. C'est une autre forme d'organisation qui va intervenir et qui prendra en charge tous les actifs et le patrimoine de ces entreprises et qui préservera les intérêts des travailleurs.