L'explosion démographique qu'a connue le pays au cours de ces deux dernières décennies a donné naissance à des projets urgents pour absorber la demande en logements. Une demande devenue au fil des ans très forte dans nos villes, de plus en plus soumises à cette pression démographique. Déjà en 1968, un Algérien sur trois était citadin. Aujourd'hui, 80 % de la population vit en ville, principalement sur le littoral. Cette urbanisation accélérée s'est faite, il faut le reconnaître, dans l'anarchie. Le visage qu'offrent nos villes aujourd'hui le montre clairement. Des immeubles sont érigés sans une aucune esthétique ni homogénéité. L'absence de cohérence entre les constructions et de cachet particulier à chaque ville, a fini par être la règle d'or dans le secteur ; on construit partout et n'importe comment sans suivre un modèle adéquat ou adapté aux conditions sociales et climatiques d'une région. Les cités dortoirs sans vie culturelle, sociale et économique ont fini par s'imposer dans le paysage urbanistique national. Le début de cette anarchie remonte aux années 1980. C'est à cette époque que les cités dortoirs ont commencé à foisonner à travers nos villes. Un phénomène accentué par l'exode rural, conséquence de la tragédie des années 1990. Devant la multiplication des bidonvilles, l'Etat a accéléré la construction de nouvelles cités pour reloger les populations ayant pris refuge dans ces lieux délabrés et dépourvus des moindres conditions de vie. L'exemple de la nouvelle ville Ali-Mendjel est édifiant comme illustration. Baptisée ville nouvelle «Ali-Mendjeli», par décret présidentiel N°2000/17 du 5 août 2000, cette ville, dont le gouvernement cherche aujourd'hui à corriger les incohérences, était lancé dans le souci d'absorber un programme de logements pour plus de 250 000 habitants. Si, en quantité, l'objectif a été atteint en décongestionnant la ville de Constantine, en qualité c'est le désastre
Bouteflika : «L'heure est à l'innovation et la planification» Ce constat n'est pas propre à Ali-Mendjeli, mais à toutes les nouvelles villes construites dans l'urgence sans planification. Et dire que des moyens financiers importants ont été dégagés à cet effet. Un point que n'a pas manqué de relever le chef de l'Etat dans le message adressé, jeudi dernier, aux participants la cérémonie du Prix national d'architecture et d'urbanisme. «La construction de logements s'est souvent limitée à l'aspect quantitatif, une approche qui a donné lieu à l'émergence de cités dortoirs qui n'ont fait qu'élargir les disparités et renforcer les sentiments de frustration et de marginalisation sociales», a indiqué Abdelaziz Bouteflika dans son message. Et de souligner : «La grande pression et l'urgence en raison de la demande toujours croissante en matière de logements, ne saurait nous empêcher d'aboutir au modèle d'habitation auquel nous avons toujours aspiré dans le respect des principes de l'architecture traditionnelle et des normes techniques de modernité». Les architectes et les urbanistes sont appelés, dans ce cadre, à apporter leur contribution pour corriger ce qu'il y a lieu de corriger et pour proposer des idées novatrices. «Nous exhortons dans ce but les architectes et les urbanistes à trouver les remèdes pour panser les plaies des cités de logements conçues dans l'urgence» et à «inventer de nouveaux modèles d'habitats, en réutilisant avec intelligence les architectures et formes urbaines qui assurent la symbiose entre le passé et la modernité en s'inspirant de nos traditions que nous voulons préserver et valoriser», a insisté le chef de l'Etat, pour qui l'ensemble des acteurs devraient se mobiliser «pour assurer le meilleur impact à ces efforts». «L'heure est à la créativité, à l'innovation et à la planification à toutes les échelles», notera encore le chef de l'Etat, Sur le plan législatif, la refondation du cadre légal régissant les opérations d'urbanisme et de construction est nécessaire. Il s'agit donc de «revisiter» dans une perspective globale, les dispositifs qui encadrent et organisent le développement et la gestion du cadre urbain, de les conformer aux exigences de qualité, recommande-t-il.
Les lois urbanistiques seront révisées «Aujourd'hui, la ville algérienne doit faire face à des contraintes multiples et inédites, tels l'étalement urbain, la littoralisation, l'évolution des modes de vie, la nécessaire réhabilitation du patrimoine ancien et, notamment, le respect des impératifs environnementaux», lit-on dans le message du président. Abondant dans ce sens, le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, M. Abdelmadjid Tebboune, a annoncé, par la même occasion, la révision prochaine du cadre juridique régissant les secteurs de l'urbanisme et du bâtiment. Et ce sans toutefois donner de détails ni de précisions. «Je ne peux en dire plus. Le projet est à l'étape de maturation et sera annoncé une fois ficelé», a-t-il déclaré à la presse. Ce qui est clair c'est que l'aspect urgent de la révision est relevé de part et d'autres, répondant ainsi à demande émise dans ce cadre par les experts, selon lesquels les villes nouvelles métropolitaines doivent être, d'une part, pensées de manière à réorganiser toute l'aire métropolitaine et assurer un équilibre entre elles, et d'autre part, la métropole où l'espace de vie ne se réduit pas à ses limites géographiques. Pour les spécialistes en la matière, l'implantation de ces villes exige la prise en charge de tous les facteurs composant les besoins physiques et économiques des populations, de manière à mettre en place un environnement adéquat aux besoins exprimés à tous les niveaux. Les recommandations ne manquent pas à cet effet. Il s'agit à titre illustratif, selon les experts, de freiner l'étalement urbain dont les conséquences sont désastreuses, maîtriser l'urbanisation anarchique qui est un risque majeur pour les inondations et les risques de sismicité, mettre un terme à la consommation des riches plaines agricoles et à la dégradation des écosystèmes les plus sensibles et d'éviter l'asphyxie des grandes agglomérations mais aussi de réguler le flux des populations, par la canalisation et la répartition harmonieuse de ces dernières. Ce n'est pas le cas actuellement puisque le cadre juridique connaît des insuffisances. S. I.
Le Prix national d'architecture et d'urbanisme remporté par le concepteur du ministère des Affaires étrangères Le prix national d'architecture et d'urbanisme (prix du président de la République) a été remis, jeudi à Alger, à l'architecte Abdelhalim Faydi, concepteur de l'actuel bâtiment du ministère des Affaires étrangères (El Anasser), par le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, M. Abdelmadjid Tebboune. La conception du bâtiment est une combinaison entre les types architecturaux moderne et traditionnel pour en faire «un symbole de l'Algérie moderne qui jouit d'une identité culturelle bien enracinée», a indiqué Abdelhalim Faydi peu après la remise du prix. Il a précisé à ce propos, que le bâtiment «le premier de conception totalement algérienne», repose sur l'authenticité afin de «mettre en relief la culture algérienne avec ses différentes composantes et son histoire séculaire». «C'est un honneur pour moi de recevoir ce prix qui m'apporte un véritable encouragement à participer à la promotion de l'architecture nationale», a-t-il encore dit. D'autre part, l'architecte Mohamed Larbi a remporté le prix du Premier ministre d'architecture et d'urbanisme (deuxième prix) pour la conception du bâtiment historique «Larbi Ben M'hidi» (Historial), à Alger. Conçue dans une dimension purement culturelle, la bâtisse, située à Alger-centre, se caractérise par une architecture ouverte sur l'intérieur de manière à en faire un espace privilégié pour abriter les différentes activités culturelles. Le prix du ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme (troisième prix) a été décroché par les architectes Saleh Bakli, concepteur d'une cité à Beni Yezguen (Ghardaïa), et Ismaïl Melaoui, concepteur de l'agence des voyages et tourisme Touring. La cité Tafilalt Tajdidt, à Ghardaïa, se voulait quant à elle une construction conforme au mode traditionnel de la ville. C'est dans cet esprit que les habitants de l'ancienne ville ont, à cet effet, été associés à la conception. Par ailleurs, M. Tebboune a salué cette réalisation en réitérant l'importance de préserver les différentes types d'architectures traditionnels. Le prix du jury est revenu, lui, aux architectes Lounès Messaoudi et Farouk Djamil pour avoir procédé à la restauration de la clinique d'El Biar. Placé sous le slogan «Architecture et valeurs nationales», la 14e édition du Prix national d'architecture et d'urbanisme, à laquelle un montant de 3,5 millions de dinars a été consacré, tend à valoriser le riche patrimoine culturel national. Les cinq lauréats ont été sélectionnés parmi les 35 travaux présentés par neuf régions du pays. Le prix institué en 1994, a été suspendu en 2006 pour être relancé en 2011.