Par Hassan Gherab A peine élu à la tête du Mouvement de la société pour la paix (MSP), à l'issue du 5e congrès du parti, début mai courant, Abderrazak Mokri, s'est jeté corps et âme dans la grosse entreprise de réunification du courant islamiste, un vieux projet du défunt leader du parti, Mahfoud Nahnah. Pour mener à bien son entreprise, le nouveau responsable du MSP commencera par prendre langue avec les anciens cadres qui sont entrés en dissidence et créé leurs propres formations politiques. En tête de liste viennent Abdelmadjid Menasra, ancien vice-président du MSP qui a fondé le Front du Changement (FC) qu'il préside, Amar Ghoul, leader de Tajamoû amal el djazaïr (TAJ), et Mustapha Benmehdi du parti El Bina. Mais si avec M. Menasra, qui a gardé un lien avec le MSP par la signature de la charte de l'union avec Bouguerra Soltani, le prédécesseur de M. Mokri, le rapprochement est déjà amorcé, il n'en est rien avec TAJ et El Bina, qui se réserve, pour le premier, alors que le second a décliné l'offre en qualifiant le projet d'union d'«irréalisable». Ce premier échec ne décourage pas pour autant M. Mokri qui, tout en soulignant que le projet d'union «n'est ni contre le gouvernement ni contre les personnes ou autre force politique», affirmera qu'«il y a une volonté sincère de former un parti fort, capable d'opérer le changement dans le pays». Il persiste et signe, d'autant plus qu'il a en M. Menasra un allié qui défend le projet avec grande conviction. Quelques semaines après l'annonce du projet d'union, le président du FC a affirmé l'attachement de son parti à concrétiser le projet d'unité avec le MSP en indiquant qu'«il y a une volonté au niveau des bases des deux partis d'exercer des pressions sur les dirigeants de leur formations respectives pour concrétiser le projet». «Tout un chacun est conscient de la nécessité de circonscrire les différends et de les traiter en évitant qu'ils ne dégénèrent en conflits», ajoutera-t-il. Et pour montrer la voie, il se déclare «disposé à faire toute concession et à tout moment en vue d'unifier le mouvement». Il adressera même un message aux réfractaires en leur disant que «la concrétisation de l'objectif est possible pour peu que la volonté de le faire existe». «Il ne faut pas juger l'expérience avant de l'avoir tenté», a insisté M. Menasra pour qui «une fois les motifs de division éliminés le projet d'unité se concrétisera». L'optimisme du président du FC ne trouve toutefois pas ses attaches dans la réalité du mouvement islamiste algérien qui est atomisé par les divergences de vues et de positions, auxquelles s'ajoutent cette soif de leadership -qui est loin d'être la caractéristique des seuls partis islamistes- qui entretient les tensions et creuse les fossés. Pour l'heure, le seul rapprochement auquel est parvenu ce courant s'est traduit par l'Alliance de l'Algérie verte (AAV), une coalition rassemblant le MSP, Nahda et El Islah, qui n'a pas la prétention d'aller plus loin. Quant à Amar Ghoul, s'inscrivant dans la perspective de la présidentielle, il tergiverse. Il soutient M. Bouteflika si ce dernier décide de se présenter pour un quatrième mandat, mais s'il se retire, TAJ devra tourner casaque, désigner son propre candidat et battre campagne pour nouer les coalitions stratégiques. Le projet du MSP peut, dès lors, figurer sur les tablettes de M. Ghoul, si du moins l'union s'est d'ici-là renforcée. Il en est de même pour les autres formations islamistes qui, même si elles décident d'avoir et de soutenir leur propre candidat, devront revoir leur copie quand s'opérera la décantation. MM Mokri et Menasra qui, désormais, marchent main dans la main, ont d'ailleurs renouvelé leur appel à rejoindre l'union et déclaré que le projet d'union était ouvert à toutes les parties qui souhaiteraient y adhérer. Ils se donnent d'ailleurs le temps de concrétiser ce projet en s'abstenant de fixer une date butoir pour la création de l'union des partis et mouvements islamistes. Pour l'heure, les deux leaders se sont limités à exprimer le souhait de voir les «rangs se resserrer» et à installer une commission mixte qui travaille sur les mécanismes d'élargissement du projet d'union. Pour préciser la position de son parti comme de l'union qu'il défend, M. Mokri dira que sa formation s'inscrit dans l'opposition pacifique et «œuvrera de ce fait, à travers l'Alliance de l'Algérie verte, au rééquilibrage de l'action politique sur la scène nationale aux côtés de toutes les factions politiques du pays». Quant aux objectifs du projet d'union, le président du MSP dira qu'il n'est ni contre le gouvernement ni contre les personnes ou autre force politique. Il confirmera cette position d'ouverture de son parti en affirmant plus tard que le MSP est un parti politique «ouvert» à tous les Algériens et à toutes les alliances. Il a annoncé dans ce sens que le projet de réunification des rangs du parti est en cours et qu'une «commission est en train de réfléchir et de débattre des modalités devant aboutir à la réunification des militants et cadres, nouveaux et anciens, du MSP». Mieux, des alliances vont être contractées par le mouvement avec d'autres formations politiques, ajoutera M. Mokri, qui s'est résolument installé dans la perspective de la présidentielle, en tant que président d'un parti qui compte peser sur la scène politique, et peut être même en tant que candidat ? H. G.