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Les Frères musulmans à l'assaut du pouvoir
Portés par les révoltes arabes
Publié dans La Tribune le 28 - 06 - 2013

Deux événements majeurs vont propulser les islamistes toutes tendances confondues, au devant de la scène internationale : la révolution islamique iranienne et l'invasion russe de l'Afghanistan. Avant ce tournant, les islamistes étaient en phase de théorisation, de propagande, de construction et d'implantation dans les différents pays arabes et musulmans. La déferlante islamiste a inondé tous les pays musulmans, balayant du coup tous les courants de gauche, nationalistes et libéraux qui avaient pignon sur rue et qui étaient même au pouvoir. Ce bouleversement s'explique par une somme de facteurs endogènes et exogènes dont la conjugaison et la succession ont créé des conditions favorables à la montée en puissance du courant des Frères musulmans qui a su s'adapter et affiner sa stratégie de prise de pouvoir. Si le mouvement des Frères musulmans s'est constitué au Moyen-Orient sous l'ordre colonial et protectoral, au lendemain des indépendances, les régimes arabes mis en place ont créé les condition de leur faillite au profit de la mouvance qui a su s'implanter et gagner les faveurs des masses laissées pour compte, exclues et tous les mécontents des pouvoirs oppressifs. Au-delà de la mauvaise gouvernance, le monde arabe n'était pas homogène politiquement d'où les rivalités de leadership entre les régimes progressistes et les régimes conservateurs. Le jeu des alliances internationales allait exacerber ces luttes inter-arabes et les Frères musulmans se rangeront alors du côté des régimes antisoviétiques et pro-capitalistes. Même si les Frères musulmans n'excommunient pas les régimes arabes progressistes, néanmoins, ils les accusent d'être laïcs et socialistes. Dans cette période des années soixante, soixante-dix et quatre-vingts, les monarchies du Golfe allaient soutenir et financer les frères musulmans et même les djihadistes pour faire barrage à la montée de la gauche et au panarabisme du Baâth. Au plan tactique, les Frères musulmans montrent un visage modéré et tolérant, mènent des campagnes de prosélytisme de réislamisation et créent des réseaux d'associations caritatives de toutes sortes avant de s'impliquer dans la sphère économique à travers des petites entreprises soutenues par la finance islamique en vogue et qui a fait de l'internationale islamiste l'une des plus puissantes organisations sociopolitiques du monde.

Aux origines des Frères musulmans
Beaucoup d'analystes et d'historiens occidentaux de l'islamisme ne s'intéressent qu'aux conséquences et risques que constituerait ce courant idéologique et politique sur leur sécurité, leur identité et leur civilisation européocentriste.
Ils omettent, par ignorance ou à dessein, de comprendre les facteurs ayant présidé à l'avènement de ce courant et le processus de son enracinement lent dans un terreau socio-économique généré et entretenu par la politique occidentale à l'égard des sociétés puis des Etats musulmans.
Tout autant que le fascisme qui est la réaction viscérale et atavique contre le mépris et l'exclusion de la France et l'Angleterre qui dominaient le monde au XIXe siècle laissant l'Allemagne et l'Italie en autarcie, l'islamisme est l'expression politique d'une identité bafouée, d'une entité même putative, écrasée et d'une histoire «glorieuse» méprisée par les invasions coloniales de la même France et de la même Angleterre. Les historiens se réfèrent souvent à El Ismaïliya, à 1928 ou 1929 et à Hassen El Benna pour situer la naissance du mouvement islamiste. S'agissant de l'avènement des Frères musulmans, c'est en effet le cas. Cependant, les balbutiements du courant islamiste sont antérieurs à cette date. L'islamisme est un mouvement politique qui se réfère aux préceptes de l'Islam comme fondement idéologique et comme praxis pour changer une situation politique, sociale et économique. Si l'on excepte les chiites qui ont été les premiers islamistes opposants politiques aux Etats sunnites omeyades et Abassides, le mouvement d'idées incarné et dirigé par Ibn Taymiya est incontestablement à l'origine du courant islamiste. Ibn Taymiya est un théologien et un jurisconsulte [musulman sunnite du XIIIe siècle, influent au sein du rite hanbalite. Son époque est marquée par les conflits entre Mamelouks et Mongols, il tente d'organiser le djihad contre ces derniers qu'il accuse de mécréance. Se distinguant par son refus de toute innovation dans la pratique religieuse, rejetant tant El Ghazali qu'Ibn Arabi, tout comme l'ensemble des philosophes, son radicalisme le fait incarcérer à plusieurs reprises par les autorités mameloukes de son époque et il trouve la mort en prison en 1328 à Damas. Ses écrits ont influencé le wahhabisme, le salafisme, le qutbisme et le djihadisme, pour lesquels il représente la principale influence théologique et source juridique. Il est ainsi considéré comme une source d'inspiration importante de l'islamisme moderne. Marginalisée à ses débuts, la pensée d'Ibn Taymiya n'a eu qu'une influence limitée au sein de l'école juridique hanbalite. Elle ne sera remise au goût du jour qu'au XVIIIe siècle par le mouvement wahhabite qui, se référant au salafisme comme matrice idéologique et modèle politique, avait décidé de libérer la presqu'île Arabique de l'occupation ottomane et introniser les Al Saoud, fondateurs de l'Arabie saoudite. A la faveur de l'occupation des territoires ottomans par la France et l'Angleterre, et l'échec des résistances tribales pour chasser l'occupant, des élites religieuses dans différents pays musulmans, notamment au Moyen-Orient et en Extrême-Orient musulman, ont créé des mouvements réformistes se référant aux enseignements et à la pensée d'Ibn Taymiya, notamment «le djihad contre l'occupant impie». L'une des figures de ce courant réformiste est Jamel Eddine El Afghani qui n'a cessé d'appeler à la fondation d'une ligue des pays musulmans pour faire front contre l'occupation. Ses appels sont restés vains tant la majorité des gouvernants musulmans se réjouissaient du statut de protectorat de leurs pays, ce qui leur garantissait la pérennité du pouvoir et des privilèges. El Afghani a eu néanmoins des héritiers en Egypte, comme Mohamed Abdou, et en Syrie, comme Chakib Arslan, et en Algérie, Abdelhamid Benbadis, pour ne citer que ces figures emblématiques du réformisme musulman moderne. Enfin, la pensée d'Ibn Taymiya allait être la source d'inspiration majeure du courant salafiste grâce à Sayed Qotb, transfuge des Frères musulmans auxquels il reprochait la modération, le compromis et le réformisme. Aux yeux de Qotb, les disciples de Hassen El Benna s'étaient résignés et commençaient à s'intéresser au parlementarisme et au participationnisme, reniant ainsi l'objectif immédiat qui était le renversement du régime «impie» de Djamel Abdenasser. Si Ibn Taymiya a justifié ses exégèses et enseignements par la présence étrangère mongole et tatare en terre d'Islam, la résurgence de la pensée salafiste a été favorisée par le colonialisme britannique et français et dont les pratiques ont menacé les valeurs de l'Islam, l'identité des musulmans, leur langue, leur culture et leur personnalité. C'est sur ces éléments, notamment, que les Frères musulmans allaient construire leur mouvement, leurs fondements idéologiques et leurs objectifs politiques. Ce contexte met en évidence à quel point ce mouvement constitue essentiellement une réaction à la domination britannique sous toutes ses formes. Il s'agit de s'opposer à l'occupation militaire mais aussi à la pauvreté -conséquence de l'impérialisme économique, et au «déclin de la moralité» - fruit de l'impérialisme culturel occidental. Face à ce qu'elle considère comme l'échec des institutions issues de la Constitution de 1923 à libérer l'Egypte de la domination britannique, l'organisation prône l'union de tous les musulmans contre l'impérialisme. En ce sens, la pensée des Frères musulmans est dans la lignée de celle de Al-Afghani, l'un des fondateurs du panislamisme. Il convient toutefois de souligner que le mouvement est initialement apolitique. Son action prend avant tout la forme de prêches et d'aide sociale.

La nature des Frères musulmans
Dans tous les pays musulmans où ils sont implantés, les Frères musulmans ont privilégié l'action sociale pour élargir leur base et leur influence. Cette tactique a été mise en œuvre en Egypte, berceau des Frères musulmans qui, profitant du malaise qui régnait entre les deux guerres mondiales, ont proposé une alternative réelle et radicale, et recrutaient dans la masse des déshérités, mais aussi parmi les fonctionnaires, les notables, les étudiants, les commerçants, etc. Après la Seconde guerre mondiale, dans un pays ravagé par le chômage, les Frères ont élargi encore leur audience en organisant un vaste réseau de services sociaux comprenant écoles, hôpitaux, ateliers de formation professionnelle. Le terreau des Frères musulmans a été préparé par une ambiance de terreur, à laquelle tous les groupes politiques participent. Redoutant le mouvement qui prenait de l'ampleur, le régime du roi Farouq a dissous la Société des Frères musulmans et ses barbouzes ont assassiné Hassan El-Benna, en 1949. Contrairement aux salafistes, les Frères musulmans n'ont jamais excommunié les régimes de leurs pays respectifs. Leur degré de radicalisme diffère d'un pays à l'autre en fonction des natures des régimes politiques et des moyens du mouvement islamiste. Cependant, et à l'exception du Hamas palestinien, aucun de ces mouvements réformateurs n'a jamais pris les armes contre l'occupation étrangère. Les Frères musulmans pratiquaient une résistance pacifique non pas à la manière de Gandhi qui appelait ouvertement à l'indépendance de l'Inde, mais par opportunisme machiavélique puisque l'occupation étrangère était leur raison d'être et le facteur de leur développement. L'autre facteur ayant grandement favorisé le mouvement islamiste en général et les Frères musulmans en particulier, c'est la confrontation séculaire entre musulmans et juifs, exacerbée par l'avènement de l'Etat d'Israël au cœur de la terre d'Islam, ensuite l'occupation de la ville sainte d'El Qods. A partir de 1967, date de la première défaite des armées régulières des Etats arabes face à Israël, le courant baâthiste, progressiste et de gauche, allait commencer sa descente aux enfers pour céder le terrain à l'islamisme comme relais de la résistance arabe et le panislamisme comme alternative au panarabisme fumeux. Si dans cette période charnière Houssein Marwa, l'intellectuel libanais, passe de l'islamisme au communisme, il n'aura été qu'un épiphénomène insignifiant en comparaison avec le nombre des militants de gauche et du baâth qui troquent le costume contre le qamis. Cette tendance allait se confirmer et prendre de l'ampleur après la deuxième défaite des Arabes en 1973. Des générations entières de militants progressistes, déçus par l'expérience des courants de gauche et du baâth, s'engagent dans les courants islamistes au large spectre en ces années soixante-dix dont la fin a été marquée par la victoire de la «révolution islamique» en Iran et le début d'une confrontation directe entre Islam et communisme en Afghanistan.

La rupture entre salafisme et réformisme musulman
Certains historiens considèrent que les Officiers libres ayant renversé le roi Farouq appartenaient au mouvement des Frères musulmans. Ce qui est avéré, en revanche, ce sont les relations qui existaient entre les Frères musulmans et ces officiers. Le contact entre eux s'était déjà établi avant 1952, date de la révolution dite nasserienne. Les Frères musulmans étaient, en effet, attirés par le nationalisme et la rhétorique religieuse des Officiers libres. Après la chute de Farouq, Nasser est accusé de trahison par ses alliés islamistes puisque Djamel Abdenasser n'a pas promulgué une constitution islamiste comme il l'aurait promis. Un membre du bras armé du mouvement tente de l'assassiner en 1954. Il s'ensuit une répression violente. Les Frères musulmans sont torturés, internés dans des camps de concentration dans le désert, contraints à l'exil. C'est à partir de ce moment que le mouvement des Frère musulmans allait connaître un débat théorique et théologique interne qui alimentera les divergences idéologiques et principielles devant aboutir à une scission donnant ainsi naissance au courant radical père de l'islamisme salafiste excommunicateur et djihadiste. Une question essentielle s'est alors posée sur l'attitude de Djamel Abdenasser : comment expliquer cette «trahison» ? Deux réponses distinctes sont proposées. Sayid Qotb affirme que ces exactions ne peuvent être l'acte que d'apostats. Il est légitime d'engager une lutte armée contre eux. Ce à quoi Hassan El Hudaybi, leader du mouvement depuis la mort de Hassan al Benna, répond que seul Dieu peut juger de la foi. Bien que l'héritage de Sayid Qotb demeure, aujourd'hui encore, fondamental, la vision plus tolérante de Hassan El Hudaybi, dans la lignée du fondateur Hassan al Benna, l'emporte au sein des Frères musulmans égyptiens. Mais l'exécution de Sayid Qotb en 1966 en fait un martyr et un symbole aux yeux de ses disciples qui, depuis 1954, allaient se séparer des Frères musulmans et former le noyau d'El Hijra we ettekfir (exil et excommunication). Omar Tilimsani, successeur de Hassan El Hudaybi en 1972, confirme son rejet de la violence comme stratégie interne. Durant le mandat d'Anouar el Sadate (1970-1981), les principes défendus par les Frères musulmans changent. Il ne s'agit plus de promouvoir une certaine forme du socialisme, comme avait pu le faire le père fondateur, mais de dire que l'économie de marché est compatible avec les valeurs islamiques. D'autre part, ils revendiquent désormais leur adhésion au pluralisme politique, et plus généralement à la démocratie. C'est ainsi que durant les années quatre-vingt, les Frères musulmans ont pris part aux processus électoraux et ont intégré la vie parlementaire égyptienne. Depuis, ce courant n'a cessé de se frotter au pouvoir sans l'exercer, affinant ses idées, son comportement politique et social. Si les années quatre-vingt et les années quatre-vingt-dix ont été celles de l'islamisme radical au vu de ses performances politiques et violentes en Algérie, en Irak, en Afghanistan, le modèle turc a donné le la aux Frères musulmans qui savent se placer et attendre le moment opportun pour occuper le terrain social et politique, comme c'est le cas dans les années deux mille.

Les urnes et la marche vers le pouvoir
Ce qui est paradoxal et commun à tous les pays ayant connu des révoltes, les Frères musulmans n'ont pas pris part à l'étincelle qui a bouleversé les rapports de forces politiques mais en ont récolté les fruits en Tunisie, en Egypte et au Maroc. Qu'est-ce qui explique ce vent favorable aux Frères musulmans alors que ce sont d'autres forces, structurées ou non, qui ont provoqué la dynamique de changement ? Les urnes. Mais pas seulement. Les Frères musulmans ont de tout temps tissé des réseaux de solidarité et d'embrigadement des masses. Pour Gilles Kepel et Richard P. Mitchell, «les Frères musulmans rejettent violemment les valeurs occidentales pour prôner un modèle de société strictement islamique dont la Charia constitue l'ossature : une sorte de ‘‘guide pour l'action'', largement ouvert à l'interprétation et à l'exégèse, afin de prendre en compte le monde contemporain». Le gros des masses populaires sont perméables à ces idées en raison d'une crise identitaire profonde que les peuples traînent depuis la décadence de l'empire musulman et aggravé par l'occupation coloniale. La paupérisation et la marginalisation des masses ont été exploitées par les Frères musulmans à travers les actions caritatives et autres projets économiques, sanitaires et éducatifs qui leur ont permis de répandre leurs idées et projet de société, perçu comme naturel dans un pays musulman. Pour la majorité des électeurs, le retour aux valeurs islamiques est normal mais sans violence ni déchirement de la société. Le travail de fourmis accompli pendant de longues années par les Frères musulmans était payant. Si les courants modernistes de gauche et de droite ont également été actifs, ils restent méconnus sinon inconnus pour les masses d'électeurs, lorsqu'ils ne sont pas présentés comme une menace pour la cohésion de la «Oumma», par les Frères musulmans qui disposaient de tribunes populaires dans les mosquées contrairement aux autres courants politiques clandestins. En d'autres termes, le mouvement des Frères musulmans n'est pas perçu par les électeurs comme une source de violence, d'insécurité et d'instabilité contrairement au courant djihadiste qui prône le changement par la violence et qui excommunie aussi bien les régimes que tous ceux qui ne partagent pas leurs visions des choses. Les Frères musulmans ont le vent en poupe, c'est une évidence, mais l'expérience récente de la Tunisie et, notamment, celle de l'Egypte ont démontré les limites des Frères musulmans qui font face après leur arrivée au pouvoir à des mouvements contestataires de plus en plus importants. En Algérie, les Frères musulmans se sont inscrits, depuis l'arrivée de Mokri à la tête du MSP, dans l'opposition, dans l'espoir de faire oublier les choix stratégiques de Nahnah lorsqu'il a impliqué le courant dans le pouvoir. La perspective des présidentielles de 2014 explique ce revirement, mais les Frères musulmans restent divisés. Djaballah qui représente une aile de ce courant, semble être mieux placé que Mokri dans la mesure où le premier ne s'est jamais mouillé avec le pouvoir et est perçu par les électeurs islamistes comme plus crédible. Mais les alliances tactiques ne sont pas à exclure d'autant plus que les présidentielles de 2014 s'annoncent aussi incertaines que rudes en terme de compétition.
A. G.


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