De notre envoyée spéciale à Tamanrasset Karima Mokrani Apprécier la musique, comprendre le sens des mots, aller dans les profondeurs de la chanson et y mettre toute son âme, la place est à la sérénité. Elle est à la sagesse. Le public de Tamanrasset se plaît dans son rôle d'observateur de ces troupes folkloriques qui défilent sur la scène. Quatre troupes pour ouvrir la compétition : trois de Khenchela et une autre d'Oum El Bouaghi. La salle de spectacle de la maison de la Culture est pleine. Des hommes et des femmes de tous les profils y prennent place. Les sages se concentrent. La compétition a donc commencé samedi dernier, avec un jour de retard pour cause de problèmes techniques. Le Festival de la chanson et de la musique amazighes suit son cours sans obstruction mais l'absence de la ministre de la Culture, Mme Khalida Toumi, ne laisse pas indifférent. La ministre a-t-elle boycotté la manifestation qu'elle a initiée elle-même ? C'est la question qui revient sur toutes les lèvres. En fait, la réponse est simple : la ministre est en déplacement officiel en Egypte. Et dire qu'il s'agit du premier festival national qui rassemble les Amazighs de toute l'Algérie pour la promotion de la chanson et de la musique amazighes et, bien sûr, avec elles, toute la culture et l'identité amazighes ! N'y a-t-il pas là une grande contradiction entre les déclarations et les faits ? Heureusement que le public est là. Un public chaleureux… débordant d'énergie… et plein d'émotion. La troisième soirée du festival était une grande fête, l'excitation à son extrême. Le public est enragé ! Des artistes amateurs de Tizi Ouzou et de Boumerdès le mettent en euphorie. L'ambiance est tout simplement magnifique. Chanter, danser… et rien que le chant et la danse. Et n'importe comment ! Personne ne critique, personne ne juge. Un voyage musical dans les profondeurs de l'âme… Laisser faire ! Laisser aller ! La joie est au rendez-vous… et avec elle tout ce qui est beauté et créativité dans l'homme. Un régal pour ces habitants de Tamanrasset que le silence et l'étendue du désert initient grandement aux voyages dans l'âme. Ce vide qui n'est jamais vide arrache l'homme à son existence matérialiste. Ce qui est bas est bas. La grandeur est dans l'âme. Elle est dans l'être. Voyager dans les profondeurs de son âme, reconnaître son appartenance à ce grand univers, à cette nature qui est nous-mêmes, c'est un grand moment de joie. Les habitants de Tamanrasset, ces amoureux du désert, en connaissent les secrets. Voilà pourquoi ils dégagent la joie et la sérénité malgré les difficultés de leur existence matérielle. Les nombreux habitants du Nord qui se sont décidés à s'installer pour une longue durée dans ce grand sud du pays en connaissent aussi quelque chose. Le Festival de la chanson et de la musique amazighes se poursuit donc à un rythme soutenu. Quelques fausses notes sont à signaler mais elles ne sont pas de grande importance. L'essentiel est que le principe de son organisation soit acquise -le festival est institutionnalisé et une somme de 22 millions de dinars lui a été consacrée- et sa réussite possible. Une réussite qui permettra son internationalisation à l'avenir.