«Après l'agression, j'ai pensé rentrer chez moi» Comment traiter dix jours d'émotions faits de deux déplacements transcontinentaux, deux matches combat, deux nuits blanches et deux revanches sur le sort et sur l'adversaire ? En jouant un match de foot. C'est le traitement que l'entraîneur du Borussia Mönchengladbach, Michael Frontzeck, a préconisé pour Karim Matmour vendredi soir. Alors que ce dernier était arrivé à Francfort en provenance d'Alger et s'était dirigé, par correction, vers le lieu où son équipe était au vert, en prévision de son match du lendemain face à Eintracht Frankfurt afin d'informer le coach qu'il était très fatigué et qu'il ne se sentait pas capable de tenir sa place dans le match, il a été surpris de se voir rétorquer : «Dors bien ce soir et demain. Au petit-déjeuner, tu me diras si tu peux jouer ou pas.» Contre Frankfurt, il a été titularisé et désigné homme du match Matmour a donc passé une bonne nuit de sommeil et, samedi matin, il a dit à Frontzeck qu'il se sentait mieux que la veille. Le coach l'a alors informé qu'il sera titularisé et qu'il le sortirait lorsqu'il verra qu'il ne pourrait plus tenir physiquement. «A la mi-temps, l'entraîneur m'avait dit qu'il allait me garder encore sur le terrain durant un quart d'heure. Les quarts d'heure se sont suivis et je suis resté sur le terrain jusqu'au coup de sifflet final. Là, j'étais mort ! J'étais physiquement lessivé», nous a-t-il raconté après le match. Auteur de la passe décisive délivrée pour le premier but et un but inscrit, mais refusé pour hors-jeu, il a été félicité par ses coéquipiers et les médias. «Ils sont venus vers moi pour me congratuler et me dire que j'ai été l'homme du match. Franchement, je ne m'y attendais pas», avoue-t-il. Frontzeck voulait le désinhiber de l'euphorie Frontzeck a réussi dans son entreprise : remettre Matmour vite dans le bain du championnat afin qu'il ne reste pas longtemps inhibé par l'euphorie de la qualification de l'Algérie à la Coupe du monde. Il est vrai que le joueur a trouvé un accueil digne des grands à son arrivée à l'hôtel. Tous ses coéquipiers se sont assurés qu'il était sain et sauf, car ayant bien sûr eu des échos de l'accueil spécial réservé par les supporters égyptiens aux joueurs algériens au Caire. En dépit de son nouveau «statut» de Mondialiste, il garde les pieds sur terre et fait montre de la même humilité vis-à-vis de ses coéquipiers et des supporters. Des images d'Alger lors de la causerie d'avant-match Hasard ou coïncidence ? Lors de la causerie d'avant-match, et alors que l'entraîneur de Mönchengladbach présentait le plan du jeu, la télévision a diffusé des images d'Egypte-Algérie des festivités l'ayant suivi, notamment le retour triomphal des joueurs, et tout le monde s'est mis à regarder. «Ici, tout le monde a suivi le match. On me l'a dit. D'abord, parce que je jouais. Ensuite, parce que l'affaire du Caire a fait tellement de bruit en Europe que le match d'appui a presque éclipsé les matches de barrages en Europe», raconte Matmour. Les premiers à le féliciter ont été ses amis et complices au club, le Français Jean-Sébastien Jaurès, le Belge Logan Bailly et le Brésilien Dante Bonfim, sans oublier l'Américain Michael Bradley, déjà qualifié à la Coupe du monde avec les Etats-Unis. «En voyant cette marée humaine à Alger, j'avais senti que tous les Algériens formaient une seule nation» Au-delà des compliments et des félicitations, Matmour a tenu à témoigner l'immense ferveur populaire qui a gagné toute l'Algérie après la qualification. «Ils ont vu des images de la fête, mais je leur ai montré des extraits vidéo que j'ai tournés et leur ai dit : ‘‘Même si vous remportez 4 fois la Coupe du monde, vous ne ressentirez jamais ce que nous avions ressenti à Alger.'' Et d'ajouter : «Oliver Neuville m'a approuvé car il avait vécu cela avec l'Allemagne. Rien que d'y repenser et de vous en parler, j'ai la chair de poule. Au moment où nous étions arrivés devant le jet d'eau (à la place du 1er-Mai, ndlr), c'était carrément impressionnant : les gens, hommes et femmes, les drapeaux, les fumigènes… A ce moment-là, j'ai senti que nous n'étions pas seulement Algériens, mais que nous ne faisions qu'une seule et unique nation.» Ce qui est certain, c'est qu'à Mönchengladbach, on a vraiment ressenti à quel point la qualification au Mondial était importante pour Karim puisque même les employés du club sont venus spontanément le féliciter, hier, à son arrivée au stade pour le décrassage d'après-match. C'est dire que, désormais, du moins jusqu'à juin prochain, plus rien ne sera plus comme avant pour Matmour… F. A-S. ------------------ «En 10 jours, j'ai grandi de 10 ans» «Après l'agression, j'ai pensé rentrer chez moi» * Lorsque nous sommes venus vous voir à Mönchengladbach une dizaine de jours avant le match Egypte-Algérie, vous nous aviez déclaré que vous alliez vous mettre dans votre bulle et ne pas faire cas des provocations égyptiennes. Vous attendiez-vous, à ce moment-là, à vivre ce que vous aviez vécu au Caire ? Non, pas du tout. Ce que j'ai vécu ne m'a pas seulement surpris. Cela m'a carrément choqué. A la sortie de l'aéroport, nous avons vu un groupe de supporters algériens et cela nous avait fait très plaisir, mais le cauchemar a vite suivi. C'est la vitre où j'étais assis qui a reçu la première pierre, puis il y a eu un déluge. Lorsque nous sommes arrivés à l'hôtel et que nous sommes descendus du bus, nous étions perdus. Nous ne savions pas quoi faire. Le reporter de Canal+ m'a dit : «Tu es tout blanc.» C'est vrai, j'ai eu peur à ce moment-là. Sur le coup, j'ai pensé rentrer chez moi. Je me suis dit qu'il était impossible que la FIFA fasse jouer le match dans ces conditions, surtout que les officiels qu'elle a délégués ont constaté sur place ce qu'on nous a fait subir. Cependant, nous nous sommes résolus à jouer le match. * Vous êtes-vous senti plus en sécurité par la suite ? Nous avons tout le temps senti qu'on voulait nous mettre sous pression. Déjà, comment expliquer que pour aller de l'hôtel vers le stade pour l'entraînement la veille du match le bus ait mis une heure et vingt minutes ? Il roulait à 30 km/h ! Après l'entraînement, il n'a fait qu'un quart d'heure pour le retour. C'est vous dire que c'était prémédité afin de mettre nos nerfs à l'épreuve. Autre exemple : pour aller de l'hôtel à l'aéroport après le match, nous avons fait une minute et demie, alors qu'à notre arrivée, pour rejoindre l'hôtel, le bus a mis un quart d'heure, avec les lancers de projectiles qui l'ont accompagné. Ce sont autant d'anomalies qui nous ont fait comprendre que les Egyptiens faisaient tout pour jouer sur nos nerfs. * Le jour du match, avez-vous été impressionnés en entrant sur le terrain ? Non, pas du tout. En deux jours, cela allait mieux au niveau du moral et nous étions déterminés à faire un résultat. Et puis, ce n'est pas la première fois que nous voyions un stade rempli. Le fait de voir des supporters algériens dans le stade nous a fait plaisir. Nous avons été énervés et déçus que, comme par hasard, lorsque l'hymne national a été entonné, les hauts-parleurs n'ont pas fonctionné afin qu'on n'entende que les sifflets des supporters égyptiens. Cela nous a un peu sortis du match. La preuve : lors des premières minutes, nous avons plus subi qu'autre chose, avec le but égyptien à la clef. Ce n'est qu'après que, peu à peu, il y eut du jeu. Mais je peux vous dire qu'aussi bien au Caire qu'à Khartoum, il y a eu sur le terrain un combat plutôt qu'un match de football. * Vous avez été auteur d'une première mi-temps mitigée. Etait-ce parce que vous aviez peur ? Non, ce n'est pas ça du tout. Si j'avais eu peur, je l'aurais dit honnêtement à l'entraîneur. C'est juste que ce jour-là, j'étais en-dessous de mon niveau habituel. C'était peut-être à cause de la tension du match, mais cela n'avait rien à voir avec la peur. * A la fin du match, avec le deuxième but inscrit par les Egyptiens, nous vous avions vus tous abattus, que ce soit sur le terrain ou dans le bus, à votre sortie du vestiaire. Etait-ce de la frustration, de l'abattement ou du désespoir ? Non, ce n'était pas du tout du désespoir. C'était juste de la déception par rapport au scénario du match. Quand même, passer à côté de la Coupe du monde pour une minute, c'était frustrant. Mais le président de la FAF est venu nous remotiver. Le président de la République, quant à lui, nous a carrément boostés en envoyant des supporters à Khartoum. * Vous avez été mis au courant de l'arrivée des supporters ? Ah, oui ! A chaque fois que l'un de nous avait un chiffre, il le communiquait aux autres. «Hé, aujourd'hui, il y a eu 5 avions qui sont arrivés.» ; «Aujourd'hui, il y en a eu 12 !» Vous ne pouvez pas imaginer à quel point cela nous a fait du bien. Et puis, trouver des centaines de supporters lors de notre première séance d'entraînement nous a vraiment remontés le moral. Là, nous nous sommes dits : «Il n'y a plus de peur. Il faudra à présent nous venger sur le terrain.» * Est-ce vrai que vous ne regrettez pas de ne pas avoir obtenu la qualification au Cairo Stadium ? Nous avons joué pour nous qualifier, mais avec du recul, en apprenant ce que les supporters algériens ont subi à la fin du match, nous nous sommes dit que c'était peut-être mieux comme ça car peut-être y aurait-il eu un carnage si nous nous étions qualifiés au Caire. Ce qui arrivait aux supporters nous touchait au plus haut point. * Au retour, vous avez fait une bonne rentrée en deuxième mi-temps. Etait-ce aussi pour vous racheter de votre match raté au Caire ? Je le répète : je n'étais pas si mauvais que ça au Caire. C'est juste que je n'avais pas joué sur mon véritable niveau. A Khartoum, j'étais surtout motivé pour contribuer à arracher la qualification. Nous avons tous donné le meilleur de nous-mêmes dans un esprit de corps extraordinaire et nous avons eu la qualification. * Vous avez déclaré au Buteur après l'agression du bus que vous étiez des amis et des coéquipiers, mais que vous êtes devenus des frères après l'incident. Le pensez-vous toujours aujourd'hui ? Plus que jamais ! Cette épreuve nous a vraiment soudés. Je n'ai jamais ressenti un tel esprit de corps. C'est d'ailleurs l'image que m'a laissée la dernière conférence d'avant-match du sélectionneur, Rabah Saâdane. Ce n'était plus le sélectionneur qui parlait. C'était, le grand-frère, le père… Ce n'était plus une question de match ou de qualification, mais une question d'honneur. C'était un discours si émouvant qu'il restera à jamais marqué dans mon esprit. * Que retenez-vous de ces deux matchs ? Je retiens ce que j'ai dit à ma mère au téléphone : en 10 jours, je suis passé par tous les sentiments qu'un être humain pourrait ressentir : la peur, la tristesse, l'injustice, la rage, la confiance, le bonheur, la solidarité, l'amour, la liesse, la béatitude… Tout cela en quelques jours ! C'est pour ça que je dis que ces 10 jours me serviront beaucoup dans ma carrière. * A ce point ? Oui, à ce point. En 10 jours, c'est comme si j'ai grandi de 10 ans. J'ai beaucoup appris de la vie et, surtout, de moi-même. J'ai appris qui j'étais, mes forces, mes faiblesses, mes angoisses, et cela me servira pour mieux grandir. * Est-ce à dire que Karim Matmour va changer ? Le footballeur, peut-être, mais pas l'homme. D'ailleurs, j'ai dit à ma famille, à ma mère et mes frères entre autres, que s'ils voyaient que je changeais dans le sens négatif, qu'ils n'hésitent pas à me remettre sur le droit chemin. Ils m'ont assuré qu'ils le feraient, quitte à utiliser un gourdin (rires). Entretien réalisé à Mönchengladbach par Farid Aït Saâda ------------------ Dante : «J'ai vu le match chez moi et j'ai vibré pour Karim» wLe Brésilien Dante Bonfim est toujours souriant, il a le don de faire rire Karim Matmour, surtout lorsqu'il parle les quelques mots et expressions arabes qu'il a apprises lors de son passage à Lille auprès des ressortissants maghrébins de la ville du Nord de la France. C'est avec beaucoup de bonheur qu'il félicite les Algériens pour la qualification au Mondial. «Vraiment, ça m'a fait plaisir. J'ai suivi le match chez moi et j'ai vibré pour Karim et pour tous les Algériens. J'ai réagi comme un vrai supporter», nous a-t-il raconté, tout en soulignant qu'il a été «parmi les premiers à le féliciter». Pour lui, cette qualification ne va pas changer Matmour. «Je sais qu'il restera le même.» F. A-S. ------------------ Frontzeck (ent.) : «Le Mondial, c'est bien pour un jeune comme lui» D'habitude distant, Michael Frontzeck, l'entraîneur du Borussia Mönchengladbach, a accepté volontiers de nous parler de la qualification de l'Algérie et de Karim Matmour pour la Coupe du monde 2010. Il est vrai que ce week-end, à Mönchengladbach, c'était presque «portes ouvertes sur Matmour» tant le joueur algérien a été l'objet de toutes les attentions. * Je suis journaliste algérien et j'aimerais vous parler de… Karim Matmour, c'est bien ça (sourire) ? Si vous êtes algérien, c'est seulement pour lui que vous êtes venu. * C'est bien cela. Un commentaire sur sa qualification, avec la sélection algérienne, pour la Coupe du monde en Afrique du Sud ? J'en suis très content. C'est un joueur jeune, mais plein de talent et très sérieux. Il a beaucoup de qualités et le Mondial, c'est bien pour un jeune comme lui. Preuve de son sérieux : même rentré fatigué, il a joué hier (samedi, ndlr) et fait un bon match. * Pensez-vous qu'une participation au Mondial favorisera sa progression ? Je l'espère bien. Il a encore beaucoup à apprendre, mais comme il est sérieux, je sais qu'il gardera les pieds sur terre. Une participation en Coupe du monde est également une bonne chose pour le club et pour l'équipe. Nous avons deux Mondialistes : Matmour et l'Américain Mike Bradley. C'est une bonne nouvelle pour le club. * Peut-être que cette qualification motivera davantage Karim pour la suite de la saison… Je ne raisonne pas ainsi. Ce serait insulter les joueurs que de raisonner de la sorte. Un joueur professionnel doit être motivé tout au long de la saison, quelles que soient les circonstances, qu'il soit en Coupe du monde ou non. Je suis convaincu que Matmour sera autant motivé qu'il l'a toujours été. Entretien réalisé par Farid Aït Saâda ----------------- Trois images le marqueront à jamais L'épreuve qu'a vécue la sélection algérienne en Egypte et au Soudan a soudé le groupe et les a fait réagir comme une seule famille. Karim Matmour gade de nombreuses images fortes de ses coéquipiers, mais il en retient surtout trois. «Dans le bus, tous les joueurs étaient à terre» La première image est celle de l'agression subie par le bus des joueurs sur le chemin vers l'hôtel. «Nous nous sommes tous baissés et, en relevant légèrement la tête, j'ai vu tous mes coéquipiers à terre, face contre le sol. C'était comme si nous étions en situation de guerre. Personne ne pouvait se relever sans risquer de recevoir une pierre», raconte-il. «A Khartoum, nous nous sommes remis à sourire» La deuxième image est celle du premier entraînement à Khartoum. «Ce n'est que lorsque l'avion a décollé du Caire que nous avons senti la tension baisser. En arrivant à Khartoum, nous avons trouvé des gens plus accueillants et, à l'occasion de notre premier entraînement dans la capitale soudanaise, j'ai vu mes coéquipiers sourire et rigoler pour la première fois depuis plusieurs jours. La présence des supporters y était pour beaucoup. Là, j'ai senti que la confiance était revenue.» «Les Algériens en pleurs après le coup de sifflet final, un moment bouleversant» La troisième et derrière image, «la plus forte», insiste-il, est celle de la joie au coup de sifflet final. «Certes, nous voulions nous qualifier et nous ne nous posions pas la question de savoir ce qui arriverait une fois qualifiés, mais là, lorsque j'ai vu tous les joueurs, membres du staff technique, membres du staff médical, accompagnateurs et mêmes journalistes en pleurs, j'ai senti quelque chose de très fort. C'était même bouleversant. J'ai compris que nous revenions de loin et c'était surtout une victoire commune contre l'injustice et l'arbitraire. F. A-S. ----------------- Le cadeau de la chaîne de M'gladbach Une interview en… français Hier, un reporter de la chaîne Web du Borussia Mönchengladbach attendait Karim Matmour pour une petite interview. Rien de plus banal. Sauf que le reporter a demandé au joueur algérien de s'exprimer en… français. «Depuis le début de saison, je vous parle en allemand. Pourquoi en français aujourd'hui ?», leur a-t-il demandé. «Parce que vous êtes qualifié pour la Coupe du monde. En guise de cadeau, nous vous permettons de vous exprimer en français et nous nous débrouillerons pour faire la traduction et faire un doublage», lui a-t-on répondu. Matmour, amusé par la proposition, a répondu en français aux questions posées dans un français plus approximatif par le reporter. ----------------- Un supporter algérien et sa fille au stade avec le drapeau algérien Hier, Karim Matmour a eu l'agréable surprise de voir un supporter algérien débarquer avec sa fille au stade de Mönchengladbach. Mourad Gherbi, résidant dans la ville, a tenu à saluer le retour de l'attaquant algérien en ramenant avec lui un maillot de l'Algérie et un drapeau algérien. C'est avec beaucoup de plaisir que Matmour a signé sur le maillot et le drapeau et qu'il a pris des photos souvenir avec Mourad et sa fille, Lina. Un moment que le reporter de la chaîne Web du Borussia Mönchengladbach a immortalisé avec sa caméra. «Nous avons suivi le match dans un café» Originaire de Baraki, Mourad Gherbi nous a affirmé qu'il y avait des Algériens à Mönchengladbach, «même s'ils se font plutôt discrets. Nous avons suivi le match dans un café, entre Algériens, et nous avons fait la fête à la fin. Même des Allemands ont partagé notre joie, sachant qu'il y avait Matmour sur le terrain», assure-t-il. ----------------- Son vœu : aller à Tiaret en décembre Non seulement Matmour n'a pas pu encore voir sa maman, mais il n'a même pas eu le temps d'exaucer un autre vœu : faire un tour à Tiaret, d'où sont originaires ses parents. «Mon père m'a demandé de l'accompagner, mais je n'ai vraiment pas le temps. J'espère le faire en décembre, à l'occasion de la trêve hivernale.» Même la femme de ménage l'a félicité A son retour au Borussia Park hier, tout le personnel administratif du club (du moins ceux qui travaillent le dimanche) a félicité Matmour pour la qualification. Cependant, les félicitations auxquelles il ne s'attendait pas ont été celles de la… femme de ménage. «La bonne vieille femme était contente pour moi comme elle le serait pour son fils. Elle m'a dit que je méritais d'aller en Coupe du monde.» Matmour avait alerté la presse allemande Après l'agression contre le bus de la sélection algérienne, Karim Matmour a pris l'initiative d'appeler des journaux allemands pour les informer de ce qui s'était passé, nous a-t-il révélé hier. «Pour moi, il était hors de question de taire pareils comportements, sinon, l'Egypte poursuivrait sa campagne d'intimidation impunément. Personnellement, j'ai appelé tous les grands journaux allemands et je les ai informés de la situation. J'ai également alerté mes coéquipiers de clubs qui étaient en contact avec moi.» «Zidan n'est qu'une fillette pleurnicheuse» Karim Matmour n'a pas apprécié les accusations portées par l'attaquant égyptien Mohamed Zidan à l'égard de Anthar Yahia, où il est question de supposées insultes envers sa mère. «Je peux dire d'ores et déjà une chose : je suis certain que Zidan n'a rien à voir avec sa mère.» Et d'ajouter : «Quand on se fait insulter, on ne va pas pleurnicher comme une fillette devant la presse, comme se plaindrait une élève à sa maîtresse. Lorsque nous avons été insultés par 80 000 supporters égyptiens et par quelques-uns de leurs joueurs, est-ce que nous nous sommes plaints ? Nous nous sommes tus et nous sommes promis de répondre sur le terrain. Apparemment, Zidan n'a pas su répondre sur le terrain et il se met à présent à pleurnicher comme une fillette.» Déjà, la tête à la CAN La page des qualifications pour le Mondial s'est refermée. Matmour pense déjà au prochain objectif : la Coupe d'Afrique des nations. Il juge le groupe de l'Algérie abordable, même s'il reconnaît ne pas connaître la sélection du Malawi. Pour lui, c'est un objectif important pour confirmer au monde entier que l'Algérie du football est bien de retour. «Bouteflika m'a dit : que dis-tu de l'accueil ?» Matmour se dit honoré d'avoir été reçu, avec ses coéquipiers, par le président Abdelaziz Bouteflika. Il se rappelle même de l'échange qu'il a eu avec lui. «Il m'a demandé : que dis-tu de l'accueil ? Je lui ai répondu que nous étions heureux de trouver le peuple dehors. Il m'a rétorqué que c'est parce que nous avons rendu le peuple heureux qu'il nous rend la pareille.» Sauvé par son… portable La première pierre lancée par les supporters égyptiens en direction du bus des Algériens a brisé la vitre du siège où était assis Karim Matmour. C'est miraculeusement qu'il y a échappé. En fait, il le doit à son… portable. «Mon téléphone portable était tombé et c'est au moment où je me suis penché pour le ramasser que la pierre est passée par-dessus ma tête. Sinon, elle m'aurait sans doute fracassé le crâne», raconte-il, encore sous le choc. «Dieu a voulu que je ne sois pas atteint grâce à ce portable qui m'est tombé des mains.» Les invitations pleuvent sur lui Avant même la qualification pour le Mondial, il ne se passait pas une semaine sans que Karim Matmour ne reçoive la visite de supporters pour prendre des photos et l'inviter chez eux. Avec la qualification, les invitations ont redoublé de plus belle. Pour cause d'agenda chargé (il n'a même pas eu le temps d'aller voir sa mère), Matmour a refusé poliment, mais il a été très touché par ces marques de considération. Pas encore eu le temps de voir sa maman Au sortir d'une dizaine de jours de folie, Karim Matmour a été dans quatre pays (Italie, Egypte, Soudan et Algérie), mais n'a pas encore eu le temps d'aller voir sa maman à Strasbourg, tellement il est sollicité. Après la sélection nationale, c'est son club qui l'a mis à contribution. A présent qu'il bénéficie de deux jours de repos, peut-être pourra-t-il aller la voir, surtout qu'il est très attaché à elle.
