Le pain était introuvable à Oran jeudi et vendredi. Les oranais ont eu la désagréable surprise de voir les rideaux des boulangeries baissés. Ainsi les boulangers d'Oran ont décrété, jeudi, «journée sans pain». Ils ont tenu le jour même un sit-in devant le siège de la wilaya pour protester contre «la marginalisation et l'absence d'écoute de leurs préoccupations». Par cette action de protestation, l'association des boulangers d'Oran entend également appuyer ses revendications portant, notamment, sur une «augmentation de la marge bénéficiaire pour compenser les différentes charges liées à la préparation du pain (coûts de l'énergie, hausse des prix de la levure, du sel et de la main-d'œuvre, entre autres)». Le président de cette association, M. Bahidj, a indiqué à la presse, que cette journée de protestation sera suivie par d'autres actions «au cas où les décideurs ne répondent pas» à leurs doléances. L'action aurait été faite sans consultation ni coordination avec l'UGCAA, dont le représentant local, Abed Mouad, affirme que son organisation «se démarque» de cette démarche qu'il juge, d'ailleurs, «inopportune» préconisant, du même coup, la patience. «Nous sommes en négociation depuis trois années avec le ministère du Commerce au sujet des doléances et des problèmes soulevés par la corporation des boulangers. Nous avons informé les boulangers que le ministère annoncera, en mars prochain, des mesures devant répondre aux préoccupations soulevées par cette corporation», a-t-il dit. Le désaccord entre la section locale de l'UGCAA et le syndicat des boulangers ne semble pas s'arrêter à la démarche de grève préconisée, mais c'est sa représentativité qui semble poser problème, puisque M. Mouad a également annoncé qu'une assemblée élective du nouveau bureau syndical des boulangers sera organisée, à la fin du mois de février prochain, à la Munatec d'Aïn El Turck. Autre sujet de désaccord : au niveau de l'association des boulangers, l'on annonce un taux de suivi de 90% de ce mot d'ordre de grève. A contrario, l'UGCAA soutient que ce taux de suivi «n'est que de l'ordre de 25% seulement, sachant que 462 boulangers activent au niveau de la wilaya». Du côté du ministère du commerce, on ne veut pas entendre parler d'augmentation du prix du pain. «Il n'y aura aucune augmentation du prix de la baguette de pain. La question ne se pose même pas», avait affirmé le ministre Mustapha Benbada en marge de la cérémonie d'installation officielle du Conseil national de la concurrence (CNC). Néanmoins, tout en écartant l'éventualité d'une hausse du prix du pain, le ministre a reconnu que «le dossier des boulangers est à l'étude». «Le gouvernement prendra en charge certaines des préoccupations légitimes des boulangers», a-t-il assuré, refusant toutefois de détailler les mesures qui seront prises en faveurs de ces derniers. Les boulangers qui se plaignent, depuis quelque temps, de difficultés financières, revendiquent la hausse de la marge bénéficiaire pour atteindre les 10% au lieu des 2 et 3% actuels et la réduction des taxes fiscales. Le prix du pain, produit subventionné par l'Etat, n'a pas connu de hausse depuis 1996, alors que le coût des autres inputs a depuis augmenté. Depuis 1996, l'Etat a opté pour le soutien du prix du pain ; si l'Etat venait à abandonner ce soutien, la baguette coûterait 25 DA. L'Etat assure donc le différentiel entre le prix à la vente de 8,50 DA et le prix réel de 25 DA. Pourra-t-il continuer à le faire ? D'autant que le budget consacré par l'Algérie à la subvention des produits de première nécessité atteint 300 milliards de dinars annuellement.