Par Faouzia Belkichi Oui, les "jeunes technos" investissent les couloirs de la renaissance. En ces temps de crise économique locale et mondiale, les esprits s'aiguisent et les analyses foisonnent. Ils sont des dizaines à faire part de leurs théories basées sur les programmes qu'ils ont concoctés pour leurs formations respectives. Depuis le temps qu'on écrit que les partis politiques algériens n'ont ni vision ni programme, maintenant qu'il y en a (des visions et des programmes), on ne va pas être mauvais joueurs. Evidemment, ça n'empêche ni l'analyse, ni le commentaire. Mais il faut tout de même reconnaître ce qui est, et même en tirer fierté : c'est du beau boulot. Qu'il s'agisse des partis majeurs ou ceux considérés comme mineurs, tous proposent des programmes ambitieux et bien construits. Les grands axes sont bien définis (social, économique, culturel, etc.), les objectifs clairs, chiffrés et datés, la démarche cohérente et le nécessaire effort marketing, palpable. Par exemple, quand certains partis annoncent un doublement du PIB en 5 ans, c'est une manière habile et accrocheuse de promettre un taux de croissance annuel de 10% (ce qui est à la portée de l'Algérie, sachant que notre taux de croissance moyen, sur les dix dernières années, est autour de 5%). Et quand on leur demande comment ils comptent s'y prendre, ils répondent par tout un "package" de mesures qui vont de l'économique (favoriser les entreprises créatrices de richesses, notamment par des incitations fiscales) au social (redistribuer quelques milliards de dinars aux nécessiteux afin de booster leur pouvoir d'achat, donc la consommation) en passant par l'éducation (réorienter le système de manière à favoriser les filières où il y a des opportunités de travail). Leur approche multidimensionnelle est la force de ces programmes "new look". Bravo Messieurs, sincèrement ! Hélas, il y a un "mais". Croyez-le, je m'en serais volontiers passé. Mais l'optimisme ne signifie pas l'aveuglement. Et la lucidité, trois fois hélas, nous ramène à notre bon vieux pessimisme. Ces séduisants programmes, en effet, ne véhiculent pas la structure mentale des partis qui les portent. Tout ce qu'ils reflètent, c'est la compétence, le patriotisme et l'ambition légitime de ceux qui les ont conçus : des "quadras" formés aux meilleures écoles, acteurs de premier plan du secteur privé (ou du secteur public, mais à de hauts niveaux de responsabilité technocratique). Que font ces gens-là dans les partis ? Ces derniers (et leurs pareils, parmi les "dinosaures" historiques qui tiennent encore les appareils partisans) se le demandent encore. Certes, ils ont cédé sous la pression de l'époque, et ont fait appel à des "jeunes" (puisqu'il le faut) pour pondre des "programmes" (puisqu'il le faut aussi). Le phénomène de quelques formations politiques avant-gardistes dans ce domaine se généralisera-t-il ? C'est la condition sine qua non pour que ces ambitieux programmes aient une chance de se concrétiser un jour. Et c'est plus que douteux. Les dinosaures attendent leur heure depuis 30 ans, ils ne vont pas s'effacer avec grâce pour "laisser la place aux jeunes". Ceux qui le croient se bercent d'illusions. Les concernés, ces fameux "jeunes", n'y croient pas eux-mêmes. "Il faudra se battre", répondent-ils en soupirant déjà. Sauf qu'à ce jeu-là, ils sont perdants d'avance. Brillants et en phase avec le 21e siècle, ils le sont sans aucun doute. Mais au jeu des tractations politiques, ils ne font pas le poids face à leurs aînés. Seule issue : que le pouvoir en place les soutienne puissamment. Que l'Etat impose ces nouveaux profils à leurs chefs de parti respectifs, quitte à interférer avec le "jeu démocratique".