Uranium, nickel, coton, argent, sucre... Avant leur flambée actuelle, les marchés des matières premières ont déjà connu des heures chaudes. Entre bulles spéculatives et craintes de pénurie, retour sur les moments forts de leur histoire.Aujourd'hui :la mastiha PRODUITS AGRICOLES. Dernier volet avec la mastiha, résine de la mer Egée dont les cours s'envolent. Quel changement de vie pour Roula! L'année dernière à cette même heure, elle assistait à Athènes à d'interminables réunions au sein de la grande société dont elle faisait partie. Aujourd'hui, elle est paysanne à Chios, en mer Egée. Assise à même la terre, elle ramasse la mastiha -ou mastic- dans sa propriété. La cause de ce nouveau départ? L'essor que connaît cette résine, ancêtre du chewing-gum, qui s'écoule des petits arbres de l'île. De 32 euros en 2001, le kilo est passé à plus de 90 euros, suscitant de nombreuses vocations. Comme celles de Roula et Vassilli, son mari, informaticien. "On venait souvent en vacances à Chios. On n'aurait pas tout lâché à Athènes pour cultiver des pastèques! Mais pour la mastiha, on a tenté le coup", explique-t-elle. Les arbres à mastiha, les lentisques, poussent sur tout le pourtour méditerranéen. Mais l'île de Chios -et plus particulièrement 24 villages du sud, les mastichochoria- est la seule région où les arbrisseaux donnent une résine aussi pure, aromatique et abondante. Les chiffres parlent d'eux-mêmes: 80 tonnes ont été produites en l'an 2000, plus du triple en 2007. Utilisation multiple Ce succès est avant tout l'œuvre d'un homme, Yannis Mandalas, qui a cru et parié sur l'avenir de ce produit oublié. "Ma mère et ma grand-mère la mâchaient, mon père buvait sa liqueur et à Pâques on en faisait une pâtisserie -le tsoureki- mais c'était tout", se souvient-il. Adulte, il rejoint l'association des producteurs et se rend compte que les exportations augmentaient de plus en plus. Avant de se demander ce qu'en faisaient tous ces gens "qui nous l'achètent à prix d'or et réservent même des quotas de production d'une année sur l'autre?". Et d'aller vérifier sur place. "C'était incroyable, chaque peuple avait une utilisation différente: les Bulgares comme dentifrice, les Jordaniens dans le café, les Indiens dans la cuisine, les Arabes comme encens, les Américains comme fil chirurgical, les Japonais en tant que crème, les Turcs en pâtisserie..." De là est venue son idée de fonder les Mastihashop. A la bourse Le succès fut immédiat. Emballée dans des boîtes en métal très stylisées, avec des photos nostalgiques de la vie d'antan à Chios, la mastiha se décline en de nombreux produits: douceurs, essences, produits de beauté. Le premier magasin ouvert sur l'île en 2002 réalise pour 600000 euros de ventes annuelles. Depuis, quatre autres ont ouvert dans le pays, mais aussi à Chypre, en Arabie Saoudite, à New York et bientôt à Paris. La société Méditérra qui commercialise des produits culinaires finis à base de mastiha est même entrée en bourse. Aujourd'hui deux usines emploient environ 2500 personnes sur l'île pour la production de bonbons et chewing-gums. Une école de cuisine dédiée à la précieuse résine est même en construction. Fiche signalétique: la mastiha Les Romains en parfumaient même leur vin! Décrite par Hippocrate comme le meilleur remède contre les maux de ventre, la mastiha - ou mastic- fut ensuite utilisée par les belles du sultan pour parfumer leur haleine. Sa résine est connue pour ses vertus antibactériennes, astringentes, expectorantes, analgésiques et diurétiques. On peut l'utiliser dans la cuisine, la pâtisserie, la cosmétique, elle sert en médecine... Cette substance aromatique et résineuse suinte du tronc et des branches principales du lentisque, ou arbre à mastic. Cet arbuste à feuilles persistantes de 2 ou 3mètres de hauteur peut vivre jusqu'à cent ans. Cette sécrétion est aidée par des éraflures qui sont pratiquées à l'aide d'outils pointus. Le sol autour de l'arbre est aplani et raclé pour former des cercles concentriques appelés "tables": quand le mastic tombe sur le sol ainsi nettoyé, il obtient un bel éclat et sèche plus facilement. Chios a une particularité unique: il s'agit du seul endroit au monde où le tronc et les branches du lentisque pleurent. Sa production a lieu de mai à septembre. La mastiha : une sève aux mille et une vertusQu'est ce que c'est ? Uniquement récoltée sur l'île grecque de Chios, la mastiha est la sève d'un arbuste appelé lentisque ou arbre à mastic. Elle suinte du tronc et des branches en formant des espèces de stalactites, plus poétiquement appelées " larmes de lentisque ". Seuls 24 villages cultivent cette sève aux nombreuses vertus. Du chewing-gum aux shampoings Vous ne vous imaginez pas la variété de produits existants à base de mastiha ! Le chewing-gum a été l'un des premiers éléments commercialisés avec. Des boulangers s'en servent pour parfumer leurs gâteaux, biscuits et galettes. Cela leur donne un arrière-goût de fleur d'oranger. Certains l'utilisent pour épicer leurs plats. D'autres en font de la confiture ou des friandises. Vous pouvez aussi retrouver la mastiha dans des produits cosmétiques : shampoings, gels douche, crèmes, démêlants, masques... L'essence de la mastiha est même utilisée comme parfum et fixateur de parfum ! Et si vous êtes amateur d'art, sachez que cette sève est un excellent stabilisateur de couleurs souvent employé dans la peinture. De multiples bienfaits A l'Antiquité, Hippocrate conseillait déjà de prendre la mastiha pour lutter contre les maux de ventre ! Elle facilite en effet la digestion et prévient les ulcères.Les élégantes du XIXème siècle, quant à elles, s'en servaient pour blanchir leurs dents et garder une haleine fraîche. Aujourd'hui encore, vous pouvez utiliser cette précieuse sève pour renforcer vos gencives. Elle vous assurera également une bonne hygiène buccale. Autre pouvoir bénéfique de la mastiha : le traitement de certains problèmes dermatologiques. Vous vous êtes brûlée ? Il est fort possible que vous utilisiez une crème contenant cette sève dont les bienfaits sur la peau ont été scientifiquement prouvés. Les vertus de la mastiha sont telles que de nouvelles études sont actuellement en cours dans plusieurs universités du monde. Les premiers résultats tendraient à démontrer ses effets bénéfiques sur le diabète, le cholestérol et les triglycérides. Et il y a fort à parier que les chercheurs trouveront dans peu de temps de nouvelles vertus à cette précieuse " larme "...