Pour la première fois depuis quatre ans, la quantité de blé produite en 2008 à travers le monde sera supérieure à la consommation. Les dernières estimations faites par le département américain à l'Agriculture (USDA) table sur une récolte mondiale de 670 millions de tonnes, 60 millions de tonnes en plus par rapport à la précédente campagne. Les stocks sérieusement entamés pourront donc être reconstitués. C'est un immense soulagement pour un marché affolé par la disparition progressive des excédentsEn février, un vent de panique s'était emparé des opérateurs, propulsant le boisseau de blé à un pic historique à la bourse de Chicago. Depuis, les cours se sont repliés de 40%. Le boisseau vaut maintenant près de 8 dollars - c'est encore deux fois plus cher que la moyenne historique des prix. En Europe, les cours sont également soutenus autour de 190 euros la tonne, un niveau identique à celui de juillet 2007 lorsque le marché était en pleine ascension vers des sommets stratosphériques. Les récoltes records attendues en France, qui avoisineraient 37 millions de tonnes, mais aussi en Allemagne et au Royaume-Uni sont susceptibles de peser sur les prix. Une " nécessité " aux yeux d'un analyste indépendant qui estime qu'au cours actuel, le blé européen est à peine compétitif face à la concurrence de la mer Noire.Comme d'habitude à cette période de l'année, la météo aura le dernier mot. La pluie tombée par paquet sur l'Europe du nord pourrait rapidement redistribuer les cartes. Car lorsqu'il est trop arrosé, le blé perd ses qualités pour la meunerie. Du coup, une part substantielle des récoltes risque d'être déclassée en blé fourrager. C'est ce qui se profile en Allemagne et au Royaume-Uni. Le phénomène a touché également la Russie et surtout l'Ukraine où 20% seulement de la récolte est panifiable. C'est un facteur de soutien pour le marché du blé de meunerie en revanche, l'écart va se creuser pour le blé fourrager. D'autant plus que la céréale concurrente pour l'alimentation animale, le maïs, est également abondante cette année dans l'Union européenne.Mais la production de céréales fourragères ne couvre que les 60 à 70% des besoins du marché mondial et la tendance va en diminuant. Produire systématiquement trop de céréales panifiables pour couvrir les 100% des besoins même en cas de coup dur, comme l'été dernier, n'est pas raisonnable. Il faut donc maintenir les emblavures de céréales panifiables, mais surtout ne pas les augmenter. Malheureusement, les rendements médiocres des céréales fourragères à l'été 2008, combinés avec une différence de prix exceptionnellement importante lors du décompte 2007, semblent provoquer un abandon massif des cultures de céréales fourragères, orge et blé fourrager en tête, au profit des céréales panifiables. Or, si un tel transfert se confirme, les surfaces de céréales panifiables seront trop importantes et, en cas de conditions climatiques "normales", l'offre 2009 sera largement excédentaire, engendrant une forte pression sur les prix.