Les fonds souverains sont, depuis des mois, l'objet de bien des commentaires et risquent fort, dans les mois qui viennent, de mobiliser bien des attentions. Ces fonds d'Etat sont constitués surtout par des pays émergents. Ils renflouent des entreprises et des banques occidentales en crise. Certains s'en réjouissent, d'autres s'en alarment. La planète compte près de quarante "fonds souverains". Ce terme abscons et un peu inquiétant se réfère à des investisseurs étatiques hétéroclites dont la puissance financière est estimée à plus de 3 000 milliards de dollars (2 035 milliards d'euros). Les premiers seraient nés au début des années 1950, au Koweït en premier lieu puis, à partir d'une taxe sur les exportations d'engrais instituée par la possession britannique, à l'époque des Kiribati dans le Pacifique. La grande majorité de ceux qui apparaissent dans le montant évoqué ici a été créé à partir du milieu des années 1970, avec comme support la production pétrolière, y compris le "Government pension fund-global " apparu en 1996 en Norvège et qui serait, avec plus de 300 milliards de dollars, au deuxième rang des fonds souverains. Cependant, le fonds chinois, créé en 2007, "China investment corp", n'appartient pas à ces fonds d'origine pétrolière mais serait, dores et déjà, au niveau du fonds norvégien. Les fonds souverains, pour rappel, gèrent l'épargne nationale et l'investissent dans des placements variés (actions, obligations, immobilier, etc.). Dans une acception restreinte, ils désignent spécifiquement "les avoirs des Etats en monnaie étrangère". Dans une acception plus large, ils désignent tous les fonds d'investissement. Ils tirent leurs ressources des réserves des Banques centrales (Chine), des réserves pour les retraites (Norvège) ou des fonds tirés de l'exploitation de matières premières (Norvège, Russie, Qatar) par exemple. Les fonds alimentés par le pétrole représentent deux tiers des montants gérés par ces fonds. Ils gèrent un volume d'actifs estimé entre 2 200 millards $ selon Standard Chartered6 et 2 500 milliards $ (2007), d'après la banque Morgan Stanley7. En octobre 2007 ils représentaient environ 1,3 % du total du marché des actions, obligations et dépôts bancaires, soit deux fois plus que les fonds gérés par les hedge funds ou le capital-investissement. Selon Morgan Stanley, ils pourraient atteindre 12 000 milliards en 2015, tandis que Steffen Kern de Deutsche Bank estime qu'ils pourraient gérer 5 000 milliards en 2012. Ils ont joué en 2007-2008 un grand rôle dans le secteur financier international, en refinancant plusieurs banques de premier plan affaiblies par la crise des subprimes. Government of Singapore Investment Corporation a participé à un apport de 12 milliards $ à UBS en décembre 2007 et, au même moment, China Investment Corporation a pris 9,9% du capital de Morgan Stanley. Avant la crise, le même fonds avait déjà pris une part de 3 milliards $ dans Blackstone, un fonds d'acquisition par emprunt (LBO). Les différents fonds utilisent des méthodes d'investissement variables ; Certains refusent de prendre des parts importantes du capital des entreprises étrangères comme le fonds norvégien. A l'inverse, d'autres sont plus activistes et recherchent surtout des parts importantes comme le fonds de Singapour ou les fonds chinois qui ont envisagé de prendre des parts dans Blackstone ou Bear Stearns. Le manque de transparence de certains de ces fonds souverains est également régulièrement critiqué. Si des mesures obligeant ces fonds à être plus transparents étaient passées, elles devraient s'appliquer également aux fonds d'investissement et aux fonds spéculatifs. Le journal britannique "The Economist" remarquait par ailleurs dans son numéro du 19 janvier 2008, que les pays dans lesquels les réactions avaient été les plus virulentes contre ces fonds étaient également les pays dans lesquels ils étaient les moins présents, comme la France ou l'Allemagne. En Algérie, l'idée de la création d'un fonds n'est désormais plus d'actualité. Commentant l'exposé du ministre des Finances présenté, hier, dans le cadre des auditions annuelles, le président de la République s'est attardé sur ce volet, une option qu'il a qualifiée d'aventure. Dans ce sens, le président a déclaré que le pays a besoin d'investissements intérieurs, dans tous ses secteurs d'activités. Il considère que, même si les prix du pétrole se stabilisent à 140 $ sur les dix prochaines années, l'économie nationale va monopoliser toutes les ressources financières du pays, y compris les subsides complémentaires liés à la hausse des prix du pétrole. Selon Bouteflika, l'idée de la création d'un fonds souverain est donc tout simplement incongrue. Le président réaffirme au contraire la nécessité pour l'Algérie de recourir à des partenariats et à des investissements étrangers afin de couvrir son déficit dans les dix prochaines années.