La commune d'El Atteuf, l'une des deux zones les plus touchées par les crues de l'oued M'Zab, a réussi en quelques jours seulement à rétablir toutes ses fonctionnalités de base grâce à la chaîne de solidarité nationale d'une "ampleur exceptionnelle", selon de nombreux témoignages recueillis auprès de la population locale. La position géographique d'El Atteuf, le premier ksar construit en aval de la vallée du M'Zab qui abrite une pentapole de ksour médiévaux depuis le début du 11e siècle, fait de lui une sorte de déversoir de toutes les eaux de l'oued. Le ksar historique, "Tadjnint", n'a pratiquement pas été touché par la déferlante des eaux fluviales, a-t-on constaté, du fait qu'il ait été bâti au sommet d'un monticule rocailleux. La configuration urbaine du ksar, ayant servi de modèle aux autres ksour de la vallée, a pour point focal la mosquée autour de laquelle s'enguirlandent les habitations jusqu'au pied de la colline, à la limite de la palmeraie mais sans jamais s'approcher du lit de l'oued. "Respecte l'oued et il te respectera : c'est la règle cardinale enseignée par nos aïeux", rappelle Ahmed Bakelli, auteur de "La nuit du silence", un roman inspiré de sociologie ksourienne. Sur le flanc sud du ksar, le mausolée de Sidi Brahim qui a fortement inspiré l'architecte-urbaniste de renommée mondiale Le Corbusier pour dessiner les courbes de l'église de Ronchamp, dans le Vaucluse (France), "n'a pas été égratigné", a souligné un représentant du président d'APC pour faire valoir la règle millénaire du bâti. Quand le fleuve en colère déborde sur son espace naturel C'est par contre la zone d'extension du ksar, particulièrement le long des deux rives de l'oued, qui ont été ravagées par la crue dont les eaux ont par endroits débordés jusqu'à 150 mètres du lit mineur du fleuve. "Nous avons construit dans le lit de l'oued parce que nous faisions confiance à la douceur de ses crues saisonnières", a indiqué un habitant dont les eaux ont totalement détruit sa demeure. "Dire cela, c'est mal connaître l'histoire de l'oued, et les crues de cette ampleur catastrophique sont prévisibles. Il n'y a pas d'excuses, quand on viole le domaine de l'oued, il finira toujours par nous rejeter", reconnaît un commerçant qui pourtant lui-même a construit sur l'espace fluvial, perdant un grand volume de ciment, stocké dans son garage à des fins commerciales. Le président de la fédération des sports aériens (FASA), basée à Alger, Dadi Hamou Belhadj, qui est un ancien président d'APC d'El Atteuf, ne partage pas cet avis, estimant que le "rétrécissement du lit de l'oued et l'agression de son espace n'est pas la principale cause du drame". A ses yeux, quand bien même les crues de cette ampleur seraient cycliques, l'important est de respecter le système traditionnel de régulation et de partage des eaux pour briser la force des crues. M. Belhadj a construit une maison à proximité du lit de l'Oued. Celle-ci a été inondée par le fleuve en colère, et l'ancien maire d'El Atteuf a subi d'énormes pertes matérielles. Le tableau des dégâts, constaté le long de la rive droite, en parallèle à la rue Chahid Ahmed Taleb, a pris les couleurs moroses de la désolation. Toutes les maisons ont été inondées, et El Atteuf riveraine de l'Oued a connu un cauchemar de trois jours, rapportent les habitants de cette commune de 16.000 âmes. L'autre constat est que de nombreux habitants et commerçants interrogés sur l'ampleur des dégâts n'ont pas souscrit d'assurance contre les risques de ce genre. Ainsi, des dizaines de voitures ont été emportées, du bétail décimé, des espaces agricoles ravagés, mais, par miracle, selon l'expression des membres de la cellule de crise instituée localement, aucune vie humaine n'a été perdue. Les familles sinistrées ont été évacuées. Selon l'APC, des chalets seront construits pour abriter celles qui en exprimeront le besoin, à Hamrayet, un ksar relativement récent construit sur les hauteurs de l'autre rive de l'Oued.