L'économie algérienne a quitté les rives de l'économie administrée sans encore atteindre l'autre rive, celle de l'économie libérale, de l'économie ouverte, celle du marché ouvert, de la suppression des frontières pour la circulation des marchandises qui proviennent de l'étranger, mais assez difficile pour nos produits qui voudront se placer dans des marchés extérieurs. On ne peut pas faire en quelques années ce que les pays à économie développée ont fait en quelques siècles. Entrer dans l'économie de marché équivaudrait, il à une entrée dans une concurrence sans pitié et où il y a fatalement comme victimes nos entreprises et nos industries ? Une guerre où tout est connu d'avance ? Y aller avec empressement sans mettre tous les atouts de notre côté, c'est comme le mouton qui va à l'abattoir, c'est-à-dire que le résultat est connu d'avance. L'inquiétude ne devrait pas venir exclusivement de l'environnement national interne, mais également et surtout de l'environnement international. Un environnement dit de concurrence, et pas réellement de coopération, malgré les phrases adoucissantes prononcées à notre attention par les pays riches et dont les entreprises internationales ne feront qu'une bouchée de nos entreprises. Qui a dit qu'il s'agit d'une concurrence saine et que la mise à niveau de nos entreprises suffira à faire de ces dernières des entreprises capables de gagner des marchés à l'extérieur ? Il conviendrait plutôt que nos efforts soient axés sur la préservation de notre marché interne pour garantir la survie de nos entreprises, c'est-à-dire garantir les emplois et un certain pouvoir d'achat aux ménages sous peine d'une agitation sociale permanente. Nos entreprises publiques et privées ont raison d'exiger que notre marché intérieur soit protégé et que les citoyens consomment " biladi ". Un comportement patriotique difficile cependant à maintenir sous la pression des prix bas des produits provenant de pays où les normes sociales sont inférieures aux nôtres, ce qui se traduit par des coûts de production très faibles qui rendent leurs produits beaucoup moins chers par rapport aux nôtres. Il ne s'agit pas de nous retirer du marché. Est-il trop tard pour la mise en œuvre de la stratégie industrielle ? En principe, elle vient trop en retard, et en plus , elle n'est qu'au niveau intellectuel et pas au passage à l'acte. pour tenter au moins de rattraper les retards dans le développement industriel, notamment dans les filières qui servent à transformer le pétrole, les industries pétrochimiques par exemple, qui auront à se développer sur la base d'intrants nationaux disponibles chez nous, à condition de protéger cette industrie qui sera mise en place, ce qui parait bien difficile à faire compte tenu de nos engagements par des accords d'association de libre échange et l'adhésion à l'OMC. Nos entreprises auront-elles vraiment le temps d'apprendre à resserrer leurs coûts, à rogner sur leurs marges pour survivre, à investir dans la recherche et développement pour améliorer la qualité et les performances des produits, à faire comme les autres entreprises orientées vers le seul profit et qui investissent là où il y a des parts de marché à prendre et où la main d'œuvre ne coûte pratiquement rien. Pourrons-nous réellement soutenir que les entreprises qui seront intégrées dans la nouvelle stratégie n'ouvriront pas leur capital au secteur privé étranger, c'est-à-dire à la privatisation, bien qu'elles soient pour le moment retirées de la liste des privatisables ? N.B