Le 9e sommet annuel sur la finance Islamique se tiendra le 23 février prochain à Londres. C'est l'occasion idéale d'entendre les discours de praticiens d'entreprises leaders, sur les perspectives de cette forme de financement. Cela permettra d'exposer les réflexions des spécialistes de la charia sur les fetwas éditées dernièrement. Les économistes et les régulateurs passeront en revue le climat économique actuel, l'environnement réglementaire en constante évolution et leurs influences sur le monde des marchés financiers, ainsi que les nuances de la réglementation financière islamique. Enfin, les obstacles au développement futur de l'industrie seront débattus par des hauts dirigeants de banques et de professions juridiques ainsi que d'autres praticiens et des intervenants clés impliqués dans l'industrie. Il faut dire que la finance islamique brasse des flux de 840 milliards de dollars avec une croissance annuelle d'environ 15 %. Selon Anass Patel, président de l'Aidimm, le marché de la finance islamique mondiale pourrait atteindre les 1 000 milliards de dollars dès 2010 et beaucoup plus par la suite d'après les spécialistes. Plus de la moitié de ce marché est détenue par les banques commerciales. Le reste du marché est composé des boutiques de banques d'affaires pures comme les fonds de capital-investissement ou immobiliers, des fenêtres islamiques des banques conventionnelles internationales et des produits islamiques tels que le takaful (assurance), des sukuk (titres d'investissement). Le potentiel du marché bancaire islamique est estimé à 4 200 milliards de dollars par le cabinet d'expertise Standard & Poor's et les fonds islamiques pèsent, à ce jour, 500 milliards de dollars, bénéficiant d'une croissance annuelle moyenne de 15%. Selon une autre estimation, les flux financiers hallal atteignent actuellement 840 milliards de dollars. Il existe aujourd'hui environ 345 institutions de finance islamique répertoriées dans quelque 70 pays. Il faut dire que la finance islamique promeut l'investissement dans des actifs tangibles : les investissements doivent être adossés à des actifs réels. Au-delà de ce premier critère discriminant, les financiers musulmans ne dérogent pas à une règle d'or : le banquier n'est pas prêteur mais co-investisseur et donc partenaire du projet financé. Ses revenus correspondront à une quote-part des résultats issus du projet financé. L'exigence d'un audit approfondi des potentiels projets à financer ainsi que l'accompagnement des entrepreneurs pendant les phases de recherche, de lancement et de vie de projet permettent d'éviter une dilapidation de capitaux reçus et une gestion qui s'est, jusqu'alors révélée salutaire. Le très célèbre principe des 3P (Partage des Pertes et Profits) conduit de manière systématique, le banquier (investisseur) à une vigilance accrue quant à la pertinence du projet financé. La différence de comportement entre l'investisseur " islamique " et l'investisseur " classique " en matière de bourse pourrait être explicitée en deux points. Le premier est investisseur à moyen et long termes, l'autre est, le plus souvent, spéculateur de court terme, profitant des écarts de cours sur un titre. D'ailleurs certains savants musulmans ont pu émettre l'idée de cycle d'investissement concernant l'achat d'actions. La durée de détention d'un titre de société intervenant dans le domaine agricole pourra par exemple correspondre au temps nécessaire pour semer, récolter et commercialiser. La décision de vente du titre sera alors justifiée par une véritable stratégie d'investissement mesurée par le retour sur investissement post-cycle de récolte. Dans leur ensemble, les principes majeurs de la finance islamique, sans se targuer d'être des antidotes absolus pour l'ensemble des maux, constituent un corpus de normes dont la vocation profondément éthique permet de fixer de solides garde-fous aux acteurs de la sphère financière. L'un des défis majeurs de la finance islamique, où du moins de celui de ses partisans, sera celui de résoudre un paradoxe qui semble être un véritable casse-tête pour les hommes modernes que nous sommes : allier croissance vertigineuse à exemplarité morale.