Comme il fallait s'y attendre, la hausse des prix du brut fait ressurgir les réflexes des pays consommateurs tendant à imposer aux pays de l'Opep la baisse des prix. Dans ce sens, le cabinet londonien CGES a estimé dans un rapport publié lundi qu'en suggérant qu'elle n'augmentera pas son offre à moins que le baril n'atteigne 100 dollars, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) participe à faire grimper les prix du pétrole. "Malgré le contentement affiché (par l'Opep) de voir les prix dans la fourchette des 70-80 dollars, des commentaires suggèrant que l'Organisation n'agirait formellement pour accroître sa production que lorsque les prix atteindraient 100 dollars, ont renforcé l'atmosphère haussière du marché", écrivent les experts du Centre for Global Energy Studies (CGES). Cet élément est venu s'ajouter aux différents facteurs de hausse des prix, comme "les révisions à la hausse des prévisions de croissance mondiale, des niveaux record d'importations chinoises, et la croyance persistante que la production, en dehors de l'Opep, aurait atteint un plateau", estiment donc les experts du cabinet fondé par l'ancien ministre saoudien du pétrole, cheikh Zaki Yamani. Pour eux, le marché laisse de côté deux éléments qu'ils jugent pourtant essentiels : la croissance actuelle de l'offre en dehors de l'Opep et la stagnation de la consommation dans les pays développés. "Le marché semble ignorer la faiblesse persistante de la demande dans les pays de l'OCDE, ainsi que la forte augmentation des liquides de gaz (le pétrole récupéré dans l'extraction de gaz) extraits par l'Opep et du brut produit hors-Opep", écrit le CGES. Le rapport réfute, par ailleurs, l'idée avancée par l'Opep selon laquelle la consommation connaîtrait un fléchissement chaque année au deuxième trimestre. "Les prix du pétrole sont dorénavant supérieurs de quelque 10 dollars à leur moyenne du premier trimestre et les avertissements de l'Opep sur la faiblesse (de la demande) au deuxième trimestre sont peu convaincants", selon ses auteurs. Pour rappel, le ministre koweïtien du Pétrole, Ahmad al-Abdullah a indiqué lundi que l'OPEP pourrait augmenter sa production si le baril dépasse 100 dollars. Les pays membres sont prêts à augmenter la production si la demande est garantie, a expliqué M. al-Abdullah. Les prix actuels sont satisfaisants aussi bien pour les producteurs que pour les consommateurs, a-t-il ajouté. Aujourd'hui, les cours réagissent plutôt aux fluctuations du dollar et aux attentes des investisseurs sur rétablissement de l'économie qu'aux indices économiques réels, a estimé le ministre koweïtien. Les propos du ministre koweitien du pétrole sont d'ailleurs étayé par la situation du marché. Les prix du pétrole se repliaient à l'ouverture du marché hier à New York, sous la pression des inquiétudes sur la Grèce. Vers 13h05 GMT, sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), le baril de "light sweet crude" pour livraison en juin s'échangeait à 83,20 dollars, en recul de 1,00 dollar par rapport à vendredi. La journée d'hier a été négative, le marché a ouvert en hausse avant d'inverser son cours. Le mouvement a été baissier d'un point de vue technique", a noté Tom Bentz, de BNP Paribas. Le baril avait fini lundi dans le haut de la fourchette restreinte dans laquelle il évolue depuis quelques semaines déjà. "Le marché semble lutter" pour franchir le seuil de 85-86 dollars, a précisé M. Bentz. Le complexe pétrolier était affecté par les inquiétudes sur la dette grecque et les craintes de contagion à d'autres pays de la zone euro et à l'économie européenne. Ravivées mardi, ces craintes poussaient la monnaie européenne en nette baisse, au profit du dollar. S'ajoutant au fort raffermissement de la monnaie américaine, négatif pour les matières premières dont les prix sont libellés en dollars, le marché boursier semblait sur le point d'ouvrir en baisse. De plus "les éléments fondamentaux du marché du brut aux Etats-Unis continuent d'être médiocres", a ajouté Tom Bentz. La différence de prix entre le contrat de référence actuel, pour livraison en juin, et le suivant, pour livraison de juillet, est de plus de deux dollars, reflet des stocks abondants de pétrole aux Etats-Unis, plus particulièrement dans leur principal terminal pétrolier de Cushing, dans l'Oklahoma (sud). Et selon les estimations des analystes interrogés par Dow Jones Newswires, les réserves de brut auraient encore augmenté la semaine passée aux Etats-Unis, de 300'000 barils. Les chiffres du département de l'Energie sont attendus mercredi matin. S.G.