Pour relancer la libéralisation du commerce mondial, la balle est dans le camp des Etats-Unis, selon le commissaire européen au Commerce, Karel De Gucht. Dans une récente interview au " Wall Street Journal ", il affirme : " Doha a besoin d'une relance et c'est aux Etats-Unis de venir avec de nouvelles idées. " Tout en s'interrogeant sur la position des parlementaires démocrates, traditionnellement plus réticents que les républicains en matière de libre-échange : " C'est un accord que le gouvernement Bush a refusé. Comment peut-on s'attendre à ce qu'un gouvernement démocrate (…) conclutl'affaire ? ", s'est-il demandé. L'Union européenne et de nombreux pays en développement ont, ces derniers mois, pointé du doigt le manque de volonté politique des Etats-Unis qui seraient, selon eux, la cause des blocages actuels. Des batailles qui rendent bien lointaine la perspective d'un éventuel accord sur le cycle de Doha, lancé au Qatar en 2001. Notons que le commerce mondial a connu une embellie à + 25 % sur les trois premiers mois de 2010, selon l'Organisation mondiale du commerce. Les pays émergents s'en sortent bien mais les Etats-Unis et, surtout, l'Europe restent à la traîne. Sur les trois premiers mois de l'année 2010, la valeur du commerce mondial des marchandises a fait un bond de 25 % sur un an par rapport à la même période en 2009, selon les derniers chiffres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). L'embellie est portée par des exportations et des importations mondiales en hausse respectivement de 27 % et 24 % sur l'année. Ces bons résultats sont tirés par une forte demande en Asie, par la hausse des prix des matières premières et par les exportations de l'Afrique et du Moyen-Orient. Pour l'OMC, qui table sur une progression du commerce mondial de 9,5 % cette année, c'est " la lumière au bout du tunnel ". En 2009, le commerce mondial avait plongé de 12,2 %, une chute sans précédent depuis la Seconde Guerre mondiale. " Ces résultats sont un très bon signe, mais il ne faut pas crier victoire ", tempère Patrick Messerlin, professeur d'économie et directeur du Groupe d'économie mondiale (GEM) de Sciences po Paris. Car, si les pays émergents caracolent en tête, l'Europe et les Etats-Unis n'affichent pas une situation superbe. Plus que les Etats-Unis d'ailleurs, " l'Europe intracommunautaire suscite pas mal d'inquiétudes ", insiste Patrick Messerlin. La tendance annuelle est à la hausse avec + 16 % -signe que la reprise arrive -mais l'évolution sur le dernier trimestre est hésitante, avec un recul de 4 % des échanges (contre - 2 % aux Etats-Unis). " Il y a des hauts et des bas, on est en phase de sortie de crise, mais pas en phase de sortie absolue ", ajoute-t-il. Un mauvais chiffre européen qui, selon lui, traduit une Europe qui " commence à faire face à ses problèmes bancaires et qui est en retard pour mettre en place les tests de robustesse des banques (" stress tests "), contrairement aux Etats-Unis qui s'en sont préoccupés dès 2009 ". Car l'absence de données fiables sur les banques perturbe le financement du commerce européen. R.I.