Un "consensus" existe au sein de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) pour maintenir les quotas de production lors de sa réunion aujourd'hui à Vienne, a déclaré le ministre équatorien du Pétrole, Wilson Pastor-Morris, mercredi. "Il y a un consensus entre les membres" de l'Opep pour maintenir les quotas, a affirmé M. Pastor-Morris devant des journalistes. "Les quotas seront maintenus. Aucun changement n'est prévu", avait-il déclaré un peu plus tôt à son arrivée à son hôtel dans la capitale autrichienne. Le ministre équatorien a aussi ajouté que le prix de l'or noir, échangé entre 70 et 80 dollars le baril cette année, devrait "rester stable" à ce niveau. Le secrétariat de l'Opep a "parlé d'une fourchette de 72-82 dollars pour donner une petite impulsion aux prix, pour être optimiste", a ajouté M. Pastor-Morris. L'Equateur assure cette année la présidence de l'organisation, qui pompe environ 35% du brut mondial, et ses membres se réunissent jeudi pour décider s'ils doivent changer leurs niveaux de production. Autre représentant sud-américain de l'Opep, le Venezuela est également "satisfait du marché pétrolier" a déclaré son ministre du Pétrole Rafael Ramirez devant des journalistes à Vienne. Mais le pays espère "une hausse l'année prochaine des prix entre 90 et 100 dollars le baril", a-t-il précisé. Avant les ministres sud-américains, plusieurs représentants de pays membres, dont le ministre saoudien Ali al-Nouaïmi, ont exprimé leur satisfaction avec le prix actuel du pétrole. "Le marché est très bien équilibré, tout le monde est satisfait, les consommateurs comme les producteurs", a déclaré le ministre du plus important pays producteur du cartel. S'exprimant depuis Doha, son homologue qatari Abdullah bin Hamad al-Attiyah a jugé les prix actuels "confortables" et que l'Opep devrait maintenir ses quotas jeudi, une position partagée par la Libye. Le ministre de l'Energie et des Mines, Youcef Yousfi, a estimé, lundi qu'"un prix du baril compris entre 90 et 100 dollars est raisonnable", par rapport au niveau actuel de production des pays membres de l'Opep. Il a affirmé que la question du niveau de production sera examinée à l'occasion de la réunion de l'Opep et que "tout dépendra de l'ensemble des pays pour décider d'un éventuel changement". Le président de la Compagnie nationale de pétrole de Libye (NOC), Chokri Ghanem, qui représente son pays dans les réunions de l'Opep, a indiqué à Londres que l'organisation ne devrait pas changer ses quotas de production. "Je ne pense pas qu'il faille s'attendre à un changement" de la politique de l'organisation cette semaine, a déclaré M. Ghanem, soulignant que "l'Opep va attendre, et qu'elle refera le point à sa réunion de mars prochain pour voir" où en est le marché. Le secrétaire général de l'Opep, le libyen Abdallah Salem El-Badri a estimé, mi-septembre à l'occasion de la cérémonie marquant les 50 ans de l'organisation, qu'"un prix compris entre 72 et 82 dollars convient au contexte actuel". La décision d'un maintien de l'actuel plafond de production des pays de l'Opep est confortée par la prévision à la hausse de la demande mondiale pour l'année 2010, selon le dernier rapport de l'organisation qui table désormais sur une hausse de 1,3% tout en laissant inchangés ses pronostics pour 2011. Comparé à 2009, il attend une croissance de 1,3% ou 1,13 million de barils par jour (mbj) pour atteindre un total de 85,59 millions de baril par jour sur l'ensemble de 2010. L'organisation misait auparavant sur une hausse de 1,2% ou 1,05 mbj. Ce relèvement est motivé par une "croissance plus forte que prévu au premier semestre de cette année, soutenue par les programmes de relance économique", a souligné le rapport. Pour 2011, la demande mondiale devrait progresser de 1,2% à 86,64 mbj, a ajouté l'Opep confirmant ainsi sa prévision antérieure. De leur côté, les experts pétroliers, à l'instar des ministres des pays de l'organisation pétrolière, s'attendent également à un maintien du niveau de production lors de la réunion de jeudi à Vienne. "Si on regarde les prix, cela a été une année très réussie pour l'Opep. Autre chose qu'un statu quo sur les quotas de production apparaîtrait comme une surprise majeure", relevaient cette semaine les analystes du cabinet viennois JBC Energy. La récente hausse des cours de l'or noir, qui ont atteint cette semaine leur plus haut niveau depuis cinq mois (86,02 dollars pour le Brent) grâce à un affaiblissement du dollar, ne devrait pas changer la donne. "Le pétrole n'a plus beaucoup d'élan pour accroître ses gains et cet accès de fièvre devrait s'épuiser de lui même dès que le marché se tournera à nouveau vers les fondamentaux" de l'offre et de la demande, soulignait Andrey Kryuchenkov, analyste de VTB Capital. La fourchette des 70-80 dollars "satisfait tout le monde, les producteurs comme les consommateurs, et apparaît adaptée aux fondamentaux du marché du pétrole jusqu'en 2011, à condition que l'Opep maintienne une bonne discipline", renchérissait Christophe Barret, du Crédit Agricole. Cependant, le manque de discipline et l'abondance de l'offre sur le marché et l'importante production des pays hors-Opep, notamment par la Russie (premier producteur mondial), "laissent peu de marges à l'Opep pour augmenter sa propre production", précisait M. Barret. Aussi, "de nouvelles coupes dans les quotas ne feraient que saper encore plus une discipline déjà très aléatoire, sans soutenir les prix étant donnés des stocks toujours importants et des perspectives modestes pour la reprise de la demande mondiale", soutenait JBC Energy. Les membres de l'Opep réunis aujourd'hui à Vienne respectent aussi très inégalement leurs quotas, selon les données de l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Depuis le 1er janvier 2009, l'Opep s'est fixée un objectif global de production de 24,84 millions de barils par jour (mbj), valable pour 11 des 12 pays membres du cartel. L'Irak est dispensé de quota depuis 1990 en raison de la situation dans le pays. La répartition des quotas n'est pas communiquée par l'Opep mais calculée par l'AIE, organisation qui représente les intérêts des pays consommateurs. Selon son dernier rapport publié mercredi, la production de l'Opep-11 (donc sans l'Irak) a atteint en septembre 26,77 mbj, dépassant donc de 1,93 mbj sa cible de 24,84 mbj. Les coupes dans la production décidées fin 2008 ne sont donc respectées qu'à 54%, dit l'AIE. La plupart des pays arabes du Golfe respectent à peu près leur objectif, appliquant les baisses de production qui leur sont imparties à hauteur de 81% pour l'Arabie saoudite, 90% pour les Emirats arabes unis ou 83% pour le Koweit. Parmi les membres les plus laxistes, le Nigeria n'applique pas du tout les réductions de production décidées par l'Opep, l'Iran ne les respecte qu'à hauteur de 23%, l'Angola de 25% et le Venezuela de 41%. De leur côté, le Qatar, l'Algérie, la Libye et l'Equateur appliquent 49% à 72% des baisses qui leur avaient été demandées.