Héctor Michel Mujica Ricardo* Nous présentons un bref parcours chronologique ayant marqué le devenir particulier du Venezuela depuis la mort de Gómez jusqu'à la victoire d'Hugo Chávez Frías aux élections présidentiables du 6 décembre 1998. Nous espérons que ça sera utile même si l'on sait que n'importe quelle chronologie est par définition évaluative dans le mode d'appréhender les faits dans le temps, de le réduire pour que la conscience puisse séparer, classer et hiérarchiser tout type de phénomène, dit politique, économique ou culturel parmi tant d'autres. 17/12/1982 - Création du Mouvement Révolutionnaire Bolivarien avec 200 autres officiers des Forces Armées Nationales. Organisation fondée en 1983 par les capitaines de l'Armée Hugo Chávez Frías, à l'époque Felipe Acosta Carlés, Jesús Urdaneta Hernández et Francisco Arias Cárdenas, ce dernier issu d'une promotion militaire antérieure, ont servi d'instructeurs de l'Académie Militaire. Vu que parmi leurs membres figuraient des officiers de grades moyens tels que des commandants, des majors, des capitaines, des lieutenants et des lieutenants-colonels, ledit mouvement fut connut sous le nom de Comacate. De même, une bonne partie de ses intégrants appartenait à la promotion Símon Bolívar, diplômée de l'Ecole Militaire en 1975. 27 et 28 février 1989 - Le Caracazo ou "le massacre de février 1989" Le 27 février 1989, un soulèvement populaire s'est produit, apparemment, en appui à une grève contre la hausse des prix des billets à Guarenas, une population proche de la ville de Caracas, située dans l'état de Miranda. Face à la répression sauvage, la protestation populaire dénommée le Caracazo du 27 et 28 février 1989 s'est généralisée, lorsque l'annonce du président de la république, Carlos Andrés Pérez, des mesures d'austérité économique, a entamé ce que l'on a appelé une période de protestations populaires ou sociales. La rébellion qui a commencé à Caracas s'est aussitôt étendue à huit autres villes de l'intérieur du pays, dans lesquelles la population a saccagé des centres et des établissements commerciaux, construit des barricades, fermé des rues, brûlé des transports en commun, des voitures et des pneus créant un chaos qui n'a pu être contenu que par un brutal déploiement répressif politique et militaire qui en une semaine, selon des chiffres officiels, a coûté la vie à plus de 400 personnes même plus selon les chiffres non officielles parlent de 2000 à 3000 morts. Mais une telle contention n'a pas arrêté le climat de rébellion et la mobilisation populaire dans les années suivantes : dans la période de 1980-90, 675 actes de protestation populaire ont été observés, un tel chiffre a été évalué chaque année pour atteindre jusqu'à 1.096 en 1993-94, et décliner à 561, 534 et 550 entre 1994 et 1997. Au moins jusqu'en 1994, les fermetures des rues, la prise d'établissements, et les marches étaient les expressions de lutte les plus observées. Ce fait a marqué la société vénézuélienne en particulier le groupe de militaires et de civils ayant participé au coup d'état qui a été déjoué en février et en novembre 1992. 04/02/1992 - Entre les 3 et 4 février 1992 une insurrection militaire déjouée a tenté de renverser le Président de la République de l'époque, Carlos Andrés Pérez. Plusieurs garnisons militaires s'étaient engagées dans les états d'Aragua, de Carabobo, Miranda, Zulia et le Distrito Federal. Le soulèvement -dénommé Opération Zamora - a commencé le soir du 3 et éclaté dans la nuit, au retour du président Pérez au pays, après sa participation au Forum Economique Mondial, à Davos (Suisse). Les responsables étaient des membres d'un regroupement clandestin existant au sein des Forces Armées, connu comme le Mouvement Bolivarien MBR-200. Parmi ses dirigeants, se trouve Hugo Chávez Frías qui se fait connaître à la population quand il assume, dans un bref discours, la responsabilité de la tentative de coup d'état. En ce qui concerne les raisons argumentées par les officiers putschistes, on trouve la gestion politique et économique du Président Pérez ; le mécontentement des secteurs moyens et bas des Forces Armées en raison des faits de corruption vérifiés dans les hauts commandements militaires ; la subordination des Forces Armées à un leadership politique qu'elles considéraient incapable et corrompu ; l'utilisation des Forces Armées, en particulier l'Armée et la Garde Nationale, dans la répression des émeutes du 27 février 1989 ; la remise en question de la position soutenue par le président Pérez dans les négociations relatives à la délimitation limitrophe avec la Colombie ; la détérioration des conditions socioéconomiques des officiers à grade moyens et bas des troupes, entres autres. 27/11/1992 - Concernant le coup de novembre 1992. Nous pouvons dire qu'il a connu une énorme popularité, ce qui s'est traduit par l'appui soudain de l'électorat de Caracas à Aristóbulo Istúriz, candidat de "La Cause R" (parti proche des putschistes selon l'opinion publique), comme maire de Caracas. Nonobstant la popularité obtenue par les insurgés, la population n'a pas appuyé le coup, en faisant la sourde oreille aux dénommés "se jeter à la rue" pour appuyer l'insurrection militaire. Bien que la seconde tentative semble plus puissante que la première, et qu'il y ait eu des combats plus intenses entre les forces loyales et les insurgés, les chefs du soulèvement n'ont pas donné l'impression de vouloir lutter jusqu'à la fin. Une conclusion peut être tirée des tentatives insurrectionnelles de 1992. Outre la crise des deux partis politiques les plus puissants du système politique vénézuélien, Action Démocratique et COPEI, les Forces Armées, avec les soulèvements militaires de 1992, ont démontré qu'elles avaient cessé d'être cet élément monolithe qui a fonctionné comme agent stabilisateur du système démocratique à partir de 1958. Un fait qui est resté corroboré dans le passé avec la défaite de la lutte armée dans les années 60. 04/12/1993 - Rafael Caldera avec son discours au Congrès National, suite aux faits du 4 février dans lequel il a signalé le manque de vision et de vigueur des partis politiques, qui présentaient devant l'opinion publique une image d'organisations sourdes face aux demandes sociales, était le point qui a mis en doute le Pacte de Punto Fijo. Le triomphe de caldera aux élections de 1993 avec Convergencia, un groupe politique créé pour de tels effets et certaines organisations de gauche, était déterminé par la crise des organisations politiques " traditionnelles " : Action Démocratique et le parti socio-chrétien COPEI. Dans un tel sens, suite aux événements de novembre 1992, les deux acteurs principaux du Pacte de Punto Fijo, Action Démocratique et COPEI, ont éprouvé de graves difficultés institutionnelles… Chávez et son mouvement ne participent pas au processus électoral. 26/03/1994 - Par une grâce du président Rafael Caldera à cette époque, Chávez est libéré et parcours tout le pays pour tenter d'arriver et de changer les relations du pouvoir, mais cette fois par voie légale et électorale. 31/05/1997 - Chávez annonce sa détermination de concourir aux élections présidentiables de décembre 1998 et crée un nouveau parti politique, le Mouvement Cinquième République. A ce moment là, il arrive à obtenir 8% d'intention de vote. 08/11/1998 - La coalition des partis et mouvements organisée par la direction politique qui soutient Chávez se présente aux élections pour des gouverneurs et des maires ainsi que pour le Congrès National de la République et obtient les divisions de huit des vingt trois états du pays et près d'un tiers des représentants au parlement. 06/12/1998 - Chávez est élu président avec une Alliance électorale conformée par différentes forces politiques et bat une alliance de dernière heure des différentes forces politiques du système dirigé par Salas Römer aux élections présidentiables de 1998 et obtient 3.673.685 des votes (56,20%) contre 2.613.161 (39,97%) de l'autre candidat. Il propose une "révolution démocratique bolivarienne" et convoque la Constituante. 02/02/1999 - Il assume la présidence pour un mandat de cinq ans et élabore un décret pour qu'une Assemblée Constituante soit convoquée via un référendum. 25/04/1999 - Plus de 80% des vénézuéliens de l'Assemblée favorisent la création d'une Assemblée Constituante. 25/07/1999 - Il conquiert la majorité de l'Assemblée Constituante, contrôle 121 des 131 représentants électoraux. 15/12/1999 - Une nouvelle constitution est approuvée avec 90% des votes. 30/7/2000 - Il est réélu président avec 59,7% des votes. 07/11/2000 - L'Assemblée nationale approuve la Loi Habilitante qui octroie de grands pouvoirs à l'Exécutif National. 27/2/2001 - L'ex-président Carlos Andrés Pérez, déclare que la situation d'anarchie que vit le pays, mènera à une explosion sociale qui renversera le gouvernement de Chávez en quelques mois. 09/7/2001 - Augmentation de 10% du salaire minimum pour le réajuster à l'inflation. 10/12/2001 - Une Grève Générale de 24 heures, convoquée par le patronat et la bureaucratie syndicale s'opposant au gouvernement constitutionnel, paralyse le pays. 23/1/2002 - Des sympathisants et des opposants de Chávez s'affrontent dans les rues de Caracas. 25/3/2002 - Des Hauts Fonctionnaires de la compagnie étatique pétrolifère (PDVSA) entament une grève en signe de protestation contre les changements dans la direction de l'entreprise étatique. 10/04/2002 - Fedecámaras (la plus grande association patronale du pays) et la CTV (Confédération Vénézuélienne des Travailleurs) décrètent une grève générale qui durerait initialement 24 heures et devient indéfinie par la suite. 12/04/2002 - Des membres du Haut Commandement Militaire obligent le président de la république, Hugo Chávez F., à renoncer et le font prisonnier, l'accusant des morts survenues - douze morts et plus de cent blessés- lors d'une manifestation de l'opposition dans la ville de Caracas. Pedro Carmona Estanga, président de Fedecámaras s'auto-désigne président par intérim du nouveau gouvernement de transition, son premier et unique décret supprime tous les pouvoirs institués et l'état de droit. Une répression brutale est initiée contre les forces politiques dirigeantes favorables au gouvernement d'Hugo Chávez F. 13/04/2002 - Appuyé par des sympathisants de Chávez et respectueux de la légalité et par une intense mobilisation populaire dans les principales villes du pays, le vice-président, Diosdado Cabello, assume la présidence comme l'établit la Constitution de la République Bolivarienne du Venezuela, jusqu'à ce que Hugo Chávez F. réapparaisse et assume ses fonctions constitutionnelles. 14/04/2002 - Dans la matinée, 48 heures après avoir renversé -le coup d'état le plus bref de l'histoire républicaine-, Hugo Chávez réassume la présidence du gouvernement du Venezuela par devant l'Assemblée Nationale. Il est soutenu et acclamé par les secteurs populaires. suite et fin. Sources de la chronologie: Conseil National Electoral, www.analitica.com; Miquel Izard. " Le pouvoir, le mensonge et la mort " (De El Amparo au Caracazo). " La protestation populaire vénézuélienne entre 1989 et 1993 (au seuil du néolibéralisme) ". Margarita López Maya (éditrice), " Lutte populaire, démocratie, néolibéralisme: protestation populaire en Amérique Latine dans les années d'ajustement. Maison d'Edition Nueva Sociedad, Caracas 1999 (Source utilisée pour "El Caracazo de 1989"); Marco Morandi. "Venezuela: Chronologie Politique." Siti e associazioni italiane contro la pena di morte; Frank Rodríguez, octobre 2000, "Liens d'Histoire du Venezuela". Source utilisée pour les rébellions militaires de février et novembre 1992. * Ambassadeur de la République Bolivarienne du Venezuela auprès de la République Algérienne Démocratique et Populaire et de la République Arabe Sahraoui Démocratique Sociologue et professeur universitair note Cet article a été écrit sans mentionner les événements du mois décembre 2002 et janvier 2003 où ait lieu le coup d'Etat pétrolier. Des événements qui auraient mérité une analyse postérieure, alors que certaines analyses auraient dû être revues.