Un important général proche du président du Yémen, Ali Abdallah Saleh, a annoncé lundi son soutien aux opposants et, selon Al Djazeera, plusieurs cadres de l'armée et du régime ont fait de même. Depuis que des tireurs d'élite ont tué 52 manifestants dans la capitale Sanaa vendredi, plusieurs ministres, ambassadeurs et cadres du parti au pouvoir ont démissionné. Cette hémorragie autour du président Saleh accroît les risques de guerre civile au Yémen, allié des Occidentaux dans la lutte contre Al Qaïda. Le président Saleh a limogé son gouvernement dimanche soir. Depuis le début de la contestation il y a deux mois, il a annoncé qu'il quitterait le pouvoir en 2013 et promis des réformes politiques, ce qui n'a pas fait taire l'opposition dans ce pays de 23 millions d'habitants. Dans les rangs politiques, l'ambassadeur du Yémen en Syrie, le vice-gouverneur d'Aden, épicentre d'un mouvement sécessionniste, et le vice-président du parlement ont également démissionné ou annoncé leur soutien au mouvement populaire. Le plus important chef tribal au Yémen, cheikh Sadek al-Ahmar, a appelé hier le président Ali Abdallah Saleh à une "sortie honorable", dans une déclaration à la chaîne satellitaire Al-Jazeera. Il a demandé au président Saleh, au pouvoir depuis 32 ans, "d'éviter l'effusion de sang et d'opter pour une sortie honorable". Cette annonce intervient alors que les défections de responsables du régime se sont accélérées au Yémen, où les manifestants réclament depuis fin janvier le départ de Saleh. Un groupe de 60 officiers de l'armée originaires de la province de Hadramout, dans le sud-est du Yémen, ont décidé de se joindre à la protestation contre le régime du président Saleh. Dans le nord du pays, des rebelles chiites ont pris le contrôle d'une installation militaire dimanche lors de combats contre des combattants pro-gouvernementaux qui ont fait au moins vingt morts, ont indiqué lundi des sources militaires et tribales. Les affrontements ont eu lieu dans la région d'al-Jawf, proche de la frontière avec l'Arabie saoudite, selon ces mêmes sources. Ils ont opposé des combattants de la rébellion houthie active dans cette région et des soldats et des éléments des tribus soutenant le président Ali Abdallah Saleh, confronté à une contestation politique sans précédent. "La bataille a commencé dans l'après-midi de dimanche et s'est poursuivie jusqu'au soir", a indiqué une source tribale. "Les houthis ont été en mesure de prendre le contrôle de la position, où étaient déployés deux chars d'assaut et des véhicules militaires", a ajouté cette source qui a assuré que d'autres affrontements ont eu lieu ces derniers jours. Selon cette source, un avion militaire a tenté d'intervenir mais il a été abattu par les rebelles, et son pilote a été tué. Dimanche, les autorités yéménites avaient assuré qu'un avion d'entraînement militaire s'était écrasé dans la région d'al-Jawf. Ces affrontements interviennent alors que le président Saleh, 68 ans, est de plus en plus isolé face à une contestation sans précédent qui demande son départ. Les rebelles appartiennent à la branche zaïdite du chiisme, et sont opposés au pouvoir central de Sanaa. Ils sont dirigés par Abdelmalek al-Houthi. Cette rébellion qui dure depuis 2004 a fait des milliers morts et plus de 250 000 déplacés. Elle inquiète l'Arabie saoudite par sa proximité, et en août 2009 les troupes saoudiennes étaient intervenues pour soutenir l'armée de Sanaa. Un cessez-le-feu est intervenu en février 2010, mais des combats avaient de nouveau éclaté en juillet près du fief des rebelles dans la province d'Amrane. Cette trêve avait mis fin à la "Sixième guerre" entre les rebelles, qui dénoncent une marginalisation politique, sociale et religieuse, et l'armée. R. I.