Les grandes puissances du G20 se retrouvent, demain, en sommet à Cannes, en France, où l'Europe va présenter son plan anticrise réclamé, entre autres, par les Etats-Unis et demander aux pays émergents de faire leur part pour contrecarrer les risques d'une nouvelle récession. Les chefs d'Etat et de gouvernement des vingt principaux pays riches et émergents, qui se réuniront pendant deux jours sur la célèbre Croisette de la Côte d'Azur, doivent adopter un vaste "plan d'action" pour endiguer le ralentissement de l'économie mondiale. Ils doivent "impérativement" annoncer des "mesures énergiques" pour rétablir la confiance, a martelé, avant-hier, l'OCDE. Les Européens arriveront cependant avec le sentiment du devoir accompli: sous la pression des Américains mais aussi des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), la zone euro s'était engagée à trouver, avant ce sommet, une solution durable à sa crise de la dette. Les dirigeants européens ont abouti in extremis la semaine dernière à un accord pour créer une sorte de fonds monétaire européen censé empêcher que la crise n'emporte l'Italie puis le reste de l'Union monétaire, ce qui plongerait la planète dans le marasme économique. "Je crois que le résultat sera accueilli avec soulagement par le monde entier qui attendait des réponses fortes de la zone euro", a déclaré le président français Nicolas Sarkozy. Les marchés financiers et les partenaires de l'Europe ont salué son accord, sans pour autant lui donner quitus. Le président américain Barack Obama a appelé à sa mise en œuvre rapide, tout en précisant qu'il ne s'agissait que d'une "première étape". La France, qui transmettra en fin de semaine la présidence du G20 au Mexique, espère à présent obtenir des engagements des autres grandes puissances. Cela doit prendre la forme d'un "plan d'action de Cannes": chaque pays de ce club qui pèse 85% de l'économie mondiale présentera deux ou trois mesures pour participer à la relance de la croissance ou, au moins, à la résorption des déséquilibres internationaux. Sept grandes économies, mises sous surveillance au printemps pour leurs déficits ou excédents nuisibles à leurs partenaires, seront particulièrement attendues: Allemagne, Chine, Etats-Unis, France, Inde, Japon et Royaume-Uni. Le G20 va-t-il rééditer l'exploit de 2009, lorsqu'il avait su coordonner la lutte contre la récession? Les temps ont changé, et sa tâche s'est compliquée. La plupart des Européens n'ont aucune marge de manœuvre budgétaire, même si l'Allemagne, dont les finances sont plus solides, pourrait être incitée à donner un coup de pouce à la croissance. Quant aux Etats-Unis, l'adoption de leur plan pour l'emploi reste incertaine. Du coup, les regards se tournent vers les pays émergents, Chine en tête. Dans l'esprit de la présidence française du G20, le sommet de Cannes devait être l'heure de vérité pour définir la place de Pékin dans l'économie mondiale. Elle a fait de la réforme du système monétaire international sa priorité, dans l'espoir d'obtenir un calendrier en vue d'une convertibilité du yuan, la monnaie chinoise accusée par Européens et Américains d'être sous-évaluée pour favoriser les exportations chinoises à leur détriment. Si le contexte n'est guère favorable aux avancées sur ce point, de l'avis de Paris, la Chine sera néanmoins au centre de l'attention. Mais pour une autre raison: la zone euro a dû se résoudre à se tourner vers les Brics pour qu'ils prêtent de l'argent à ses maillons faibles. Le président chinois Hu Jintao arrive donc à Cannes en position de force. Il ne s'est engagé à rien de précis, son ministre du Commerce extérieur, Chen Deming, se bornant à promettre "un soutien réel". Le G20 discutera du meilleur moyen pour faire participer les émergents au sauvetage de l'euro, tandis que s'esquisse déjà une polémique en Europe sur les contreparties éventuelles exigées par Pékin. Les Russes, eux, envisagent d'apporter une aide allant "jusqu'à 10 milliards de dollars", mais par le biais du Fonds monétaire international (FMI). Le rôle du FMI sera donc au coeur des débats, ainsi que ses ressources, que Washington refuse d'augmenter. Une solution de compromis pourrait être trouvée afin que seuls les pays émergents volontaires remettent au pot, via un fonds spécial pour aider l'Europe. L'OCDE appelle le G20 à adopter des mesures énergiques pour rétablir la confiance Les chefs d'Etat et de gouvernement du G20 doivent impérativement adopter, demain, et après demain, des mesures énergiques pour rétablir la confiance, a déclaré, avant-hier, l'OCDE dans une note de synthèse publiée en prévision du sommet de Cannes (sud-est de la France). La faiblesse actuelle (de l'économie) est en grande partie due à une perte généralisée de confiance dans la capacité des décideurs à mettre en place des réponses appropriées, écrit l'OCDE. Il est par conséquent impératif d'agir de manière énergique pour rétablir la confiance et de mettre en œuvre les politiques appropriées pour retrouver une situation budgétaire soutenable, poursuit l'organisation au sujet du G20. Une première avancée importante a déjà été entreprise avec le plan de sauvetage de la crise bancaire et de la dette annoncé par les dirigeants de l'UE le 26 octobre 2011 mais ces mesures doivent être mises en place rapidement et vigoureusement, a déclaré, avant-hier, le secrétaire général de l'OCDE, Angel Gurria. L'OCDE appelle également les pays de la zone euro à clarifier leurs décisions en donnant notamment de plus amples informations sur les options permettant de renforcer le Fonds européen de stabilité financière (FESF). Une avancée rapide et ces clarifications sont nécessaires pour rompre le lien entre dette souveraine et détresse des banques (et) pour traiter le problème de la Grèce. Il s'agit aussi de s'assurer que la crise de la dette souveraine ne se répande pas dans d'autres pays ainsi que d'une capitalisation adéquate des banques. L'OCDE prévoit dans un scénario +dénué d'événements+ et en l'absence d'une action conjointe pour résoudre les problèmes actuels, un PIB réel pour l'ensemble du G20 en croissance d'environ 3,9% cette année, 3,8% en 2012 et 4,6% en 2013 dans les pays du G20. Mais la perspective pourrait être plus sombre si les engagements pris par les dirigeants de l'Union européenne ne parvenaient pas à rétablir la confiance (...) et/ou si une politique budgétaire trop restrictive se concrétisait aux Etats-Unis, avertit l'OCDE. L'OCDE préconise aussi une politique monétaire conciliante dans les économies avancées. Dans certaines régions où un resserrement de la politique monétaire a déjà été engagé, les taux d'intérêt devraient être abaissés, comme dans la zone euro.