L'ancien secrétaire général de l'ONU Kofi Annan a été nommé "émissaire conjoint des Nations unies et de la Ligue arabe sur la crise en Syrie". Une conférence internationale sur la Syrie, boycottée par Moscou et Pékin, devant avoir lieu, hier, à Tunis. M. Annan sera assisté par un "adjoint choisi dans la région arabe", précise le communiqué commun de Ban Ki-moon et de Nabil al-Arabi, respectivement secrétaires généraux de l'ONU et de la Ligue arabe. Le texte ne donne toutefois pas le nom de cet adjoint arabe. L'émissaire sera chargé "d'offrir ses bons offices afin de mettre un terme à toutes les violences et les violations des droits de l'homme, et à promouvoir une solution pacifique à la crise syrienne", poursuit également le texte. Ces questions étaient à l'ordre du jour d'une conférence réunissant plus de soixante pays au total, hier, à Tunis pour établir un plan d'aide humanitaire international au peuple syrien et accentuer la pression sur Damas. Plus de 7000 tués au total Organisée par la Ligue arabe, cette conférence internationale réunit tous les pays arabes et occidentaux impliqués dans le dossier, ainsi que les différentes composantes de l'opposition syrienne. Mais la tâche risque d'être ardue, Pékin et Moscou, alliés du régime Assad, continuant de rejeter toute ingérence en Syrie et refusant de participer à la réunion de Tunis, après avoir bloqué deux résolutions à l'ONU condamnant la répression. La conférence, qui devrait réitérer sa condamnation de la sanglante répression menée par le régime de Damas (plus de 7600 tués depuis onze mois, selon des ONG), réaffirmera son soutien au plan de la Ligue arabe, qui prévoit les étapes d'une transition démocratique en Syrie. Elle exhortera également l'opposition syrienne, fragmentée, à s'unir et se rassembler, et pourrait se diriger vers une reconnaissance a minima du Conseil national syrien (CNS), principale composante de l'opposition syrienne. Un plan d'aide humanitaire aurait été proposé à la réunion de Tunis Un plan d'aide humanitaire international aurait été proposé, hier à la conférence de Tunis sur la Syrie, a indiqué à Londres un haut responsable américain, en marge de la réunion sur la Somalie. Le régime syrien sera mis au défi d'y répondre, a ajouté sous couvert de l'anonymat ce responsable, précisant que la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton avait parlé, avant-hier, de ce plan avec plusieurs responsables étrangers. Parmi les choses qui sortiront demain (vendredi) de la réunion il y aura des propositions concrètes concernant la fourniture d'aide humanitaire dans les jours qui viennent, a-t-il ajouté, alors que la Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a lancé un appel à des trêves quotidiennes de deux heures pour acheminer de l'aide. Plus de 7 600 personnes, en majorité des civils, ont été tuées dans les violences depuis l'éclatement de la révolte en Syrie en mars 2011, a rapporté, mercredi, l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). La Chine n'assistera pas à la conférence de Tunis La Chine n'assistera pas à la conférence internationale sur la crise en Syrie qui devait se tenir, hier, à Tunis, a annoncé, avant-hier, la presse chinoise officielle. Citant le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Hong Lei, l'agence a indiqué que Pékin n'enverrait aucun représentant à la conférence. La Russie a déjà annoncé qu'elle ne participerait pas à cette conférence, qui doit réunir les Etats-Unis, les pays de l'Union européenne, la plupart des pays de la Ligue Arabe, la Turquie et des représentants des principaux mouvements de l'opposition syrienne. La Chine, traditionnellement très attachée au principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des pays, a opposé comme la Russie son veto à des projets de résolutions sur la crise syrienne au Conseil de sécurité de l'ONU. Après avoir ainsi mis son veto le 4 février au dernier en date de ces textes, la Chine a défendu sa position en déclarant qu'elle était prête à jouer un rôle constructif auprès de toutes les parties pour une résolution pacifique de la crise syrienne. Un influent quotidien chinois a averti cette semaine que le soutien des puissances occidentales aux rebelles syriens pourrait mener à une guerre civile en Syrie. A Washington, le département d'Etat a assuré que la décision de la Chine et de la Russie n'affaiblirait pas la conférence de Tunis. La situation n'est guère différente de ce qu'elle était après le vote du Conseil de sécurité, lorsque deux pays se sont isolés et que le reste du monde s'est prononcé en faveur du peuple syrien, a déclaré devant la presse le porte-parole de la diplomatie américaine, Mark Toner. Washington préférerait que ces deux pays se mettent du côté du peuple syrien et comprennent la gravité de la situation en Syrie ainsi que la nécessité que la communauté internationale parle d'une seule voix face à Damas, a ajouté le porte-parole. Réunion de coordination de l'aide humanitaire Une réunion de coordination de l'aide humanitaire à la Syrie a eu lieu, avant-hier, à Genève au sein de la mission suisse auprès de l'ONU, selon le département fédéral des Affaires étrangères suisses (DFAE). La Suisse en a pris l'initiative afin de préparer la conférence organisée vendredi à Tunis, selon le DFAE. A Tunis, les représentants de plus de cinquante pays, à l'exception notable de la Russie, et la Chine, sont attendus pour adresser, selon le pays hôte, un message clair au régime syrien, sommé de cesser les tueries, et exhorter l'opposition à s'unir en vue d'une éventuelle future reconnaissance. Un plan d'aide humanitaire international va par ailleurs être proposé à Tunis, a indiqué, avant-hier, à Londres un haut responsable américain. A Genève, des représentants du Bureau des Affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) et du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) ont participé à la réunion, selon la presse suisse citant des sources diplomatiques européennes. De son côté, le CICR a estimé que les discussions sur l'acheminement de l'aide en Syrie devaient rapidement aboutir car la situation humanitaire est urgente. On continue nos discussions avec les autorités syriennes et l'opposition, a dit un porte-parole de l'organisation, Hicham Hassan. On espère une solution le plus tôt possible car la situation humanitaire est urgente, a-t-il ajouté, sans pouvoir confirmer dans l'immédiat la réunion de Genève. Face à la situation humanitaire dramatique dans certaines villes, le CICR a appelé mardi à des trêves quotidiennes de deux heures. Selon la presse suisse, l'Union européenne a exprimé son soutien à l'initiative du CICR, mais s'interroge en revanche quant à la faisabilité d'une autre proposition, qui est de créer des couloirs humanitaires à partir des pays voisins. L'UE y serait opposée en raison de l'étendue géographique de la Syrie et de la difficulté à sécuriser le passage des convois humanitaires. Le 15 février dernier, le chef de la diplomatie française, Alain Juppé, avait souhaité que l'ONU discute de la création de couloirs humanitaires en Syrie, une idée déjà défendue par Paris en novembre et qui n'avait pas eu de suite. La Syrie sera au cœur des débats lors de la prochaine session du Conseil des droits de l'homme de l'ONU qui démarre lundi à Genève. Ces derniers jours, les diplomates mènent d'ailleurs des négociations à huis clos pour discuter de l'idée d'avoir une réunion urgente mardi au sein du Conseil, a indiqué un porte-parole de l'instance onusienne, Rolando Gomez. La commission d'enquête de l'ONU accuse les responsables syriens Des responsables syriens à haut niveau ont commis des crimes contre l'humanité, affirme la commission d'experts chargée par le Conseil des droits de l'homme d'enquêter sur la situation en Syrie. Ils ont donné l'ordre de tirer contre des femmes et des enfants désarmés. Dans son rapport publié, avant-hier, à Genève, la commission d'enquête indique avoir "des preuves crédibles et substantielles" que les ordres ont été donnés "au plus haut niveau" de l'armée et du gouvernement de Damas pour bombarder des zones résidentielles, tirer sur des manifestants désarmés et torturer des opposants. La commission demande que les responsables de tels crimes contre l'humanité soient traduits en justice. Elle a établi une liste d'officiers et de dignitaires du régime syrien soupçonnés d'avoir commis de tels crimes, une liste qu'elle garde toutefois confidentielle. Cas de tortures Plus de 500 enfants ont été tués depuis le début de la révolte, en mars, selon le rapport. La commission fournit une liste de 38 centres de détention dans 12 villes où elle a documenté des cas de torture. Des sévices ont aussi été pratiqués dans des hôpitaux. La commission, présidée par Sergio Paulo Pinheiro, accuse également les forces d'opposition de l'Armée de libération syrienne d'avoir commis des abus, dont des assassinats et des enlèvements, toutefois "à une échelle non comparable". Explosions "terrifiantes" Sur le terrain, les quartiers rebelles de la ville de Homs (centre) étaient violemment bombardés par les forces du régime syrien, avant-hier. Notamment à Baba Amr secoué par des explosions "terrifiantes" et où les communications étaient totalement coupées, selon une ONG et des militants. Ce 20ème jour de bombardements intervient au lendemain de la mort de deux journalistes occidentaux, l'Américaine Marie Colvin, grand reporter du Sunday Times, et le Français Rémi Ochlik, photographe à l'agence IP3 Press, dans le pilonnage d'une maison transformée en centre de presse pour les militants.