Les cours du pétrole tombés, hier, à des niveaux inédits depuis plusieurs mois, accentuaient leurs pertes mardi en Asie en raison de la situation toujours préoccupante en Grèce et des positions fragiles du secteur bancaire en Italie et en Espagne. Le baril de "light sweet crude" (WTI) pour livraison en juin perdait 47 cents, à 94,31 dollars, dans les échanges matinaux. Le baril de Brent de la mer du Nord à même échéance cédait 57 cents à 111,00 dollars. "Les derniers développements de la crise de la zone euro ont pesé sur les marchés des matières premières et le pétrole figure parmi les victimes les plus durement touchées", a relevé Justin Harper chez IG Markets Singapore. "Les facteurs baissiers sont nettement plus significatifs avec les craintes de contagion à d'autres économies fragiles de la zone euro, en particulier l'Espagne et l'Italie", selon lui. Les dirigeants des partis politiques grecs devaient se réunir mardi à Athènes pour tenter d'éviter au pays de nouvelles élections et rassurer la zone euro. Ils devaient notamment discuter d'une proposition du chef de l'Etat grec Carolos Papoulias de constituer un gouvernement de personnalités. Si cette dernière tentative échouait, la Grèce s'acheminerait vers de nouvelles élections mi-juin, qui pourraient voir les partis opposés à l'austérité obtenir la majorité et entraîner le pays vers une possible sortie de la zone euro. Parallèlement, la zone euro s'est un peu plus enfoncée dans la crise lundi après que l'agence de notation Moody's eut abaissé la note de 26 banques italiennes, dont les deux plus grandes du pays, UniCredit et Intesa Sanpaolo, qui contrôlent à elles deux un tiers des actifs des banques du pays. La situation en Espagne était également au centre des préoccupations. Madrid a été forcée de concéder des taux en hausse lors d'une émission obligataire à court terme sur fond d'inquiétudes sur son secteur financier. La dette des banques espagnoles envers la Banque centrale européenne a battu en avril le record déjà historique du mois précédent, pour atteindre 263,5 milliards d'euros. Le pétrole finit en repli à New York Les cours du pétrole ont terminé en net repli la veille à New York, plombés par le renchérissement de la monnaie américaine qui était favorisée face à l'euro par le chaos politique en Grèce où d'ultimes tractations étaient menées pour dénouer l'impasse. Le baril de référence pour livraison en juin a perdu 1,35 dollar par rapport à vendredi dernier, clôturant à 94,78 dollars sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), après être tombé à 93,63 dollars, un plus bas en séance depuis le 19 décembre. En deux semaines, les prix du brut texan coté à New York (WTI) ont ainsi perdu quelque 10 dollars. A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en juin a fini à 111,57 dollars, en baisse de 69 cents par rapport à la clôture de vendredi, tombant même brièvement à 110,04 dollars, un plus bas depuis près de quatre mois. La Grèce, la Grèce ... c'est tout ce qu'il y a à dire, a résumé Tom Bentz, de BNP Paribas. Le marché pétrolier continue de subir les effets des bouleversements en Grèce et en Europe. Face à l'impasse politique à Athènes, le chef de l'Etat grec Carolos Papoulias a proposé aux chefs des trois partis souhaitant éviter une sortie de l'euro de la Grèce la constitution d'un gouvernement de personnalités non politiques soutenu au parlement. Les dernières rencontres dimanche soir entre les dirigeants des petits partis parlementaires grecs et le président Carolos Papoulias n'avaient pas permis d'aboutir à la constitution d'un gouvernement de coalition. Et s'il était impossible de parvenir à un accord, la Grèce se dirigerait vers l'organisation de nouvelles élections législatives qui pourraient avoir lieu fin juin. Dans ce contexte, les investisseurs se détournaient de l'euro, qui se négociait à 1,2846 dollar la veille, au profit de la monnaie américaine, valeur refuge. On se dirige vers un bain de sang sur le marché des matières premières, a ironisé Matt Smith, de Summit Energy (groupe Schneider Electric). Le renforcement de la devise américaine rend en effet moins attractifs les achats de matières premières libellées en dollar, comme l'or noir, pour les investisseurs munis d'autres devises. De plus, les perspectives d'une croissance mondiale terne renforçaient les inquiétudes sur la vigueur de la demande énergétique mondiale alors que l'offre restait abondante. La Chine a abaissé les obligations de fonds propres de ses banques pour la troisième fois en six mois (essayant de stimuler le crédit) dans une démarche visant à négocier en douceur l'atterrissage de la croissance du moteur de l'économie mondiale, a rappelé M. Smith. L'inquiétude est grande pour la demande mondiale avec les signes de ralentissement en Chine, a insisté de son côté Tom Bentz, de BNP Paribas. Les cours de l'or noir ont également reculé après les déclarations du ministre saoudien du Pétrole qui s'est dit favorable à une baisse supplémentaire des prix. Nous avons besoin de cours autour de 100 dollars le baril. Aujourd'hui, ils sont encore hauts, a déclaré Ali al-Nouaïmi, cité, dimanche, par l'agence Dow Jones Newswires, au sujet du Brent, la principale référence pour les investisseurs dans le monde. Ces propos illustrent une nouvelle fois le fait que l'Arabie saoudite fait tout son possible pour faire baisser le marché, en ajoutant des paroles à une politique de production ample, ont expliqué les analystes du cabinet viennois JBC Energy.