La France, qui prend la présidence du Conseil de sécurité de l'ONU en août, va demander d'ici la fin de la semaine une réunion d'urgence de cette instance sur la Syrie au niveau des ministres des Affaires étrangères, a annoncé, hier, le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius. Invité de la radio française RTL, le ministre a précisé qu'il devrait présider lui-même cette réunion, convoquée dans l'urgence pour faire arrêter les massacres en Syrie. Puisque la France prend la présidence du Conseil de sécurité des Nations unies a partir de demain 1er aout, nous allons donc demander avant la fin de cette semaine la réunion du Conseil de sécurité, probablement au niveau ministériel à la fois pour essayer d'arrêter les massacres et pour préparer la transition politique, a déclaré le ministre. Il faut tout tenter, a-t-il fait valoir à propos de la Russie et de la Chine qui ont refusé jusqu'à présent toute résolution contraignante à l'ONU, en mettant en garde contre une extension du conflit syrien aux pays voisins. On ne peut plus dire que c'est une affaire intérieure, a-t-il martelé. Laurent Fabius a ajouté craindre un massacre à Alep, la deuxième ville du pays. C'est un martyr que subit le peuple syrien et le " bourreau " s'appelle Bachar al-Assad, a-t-il dit. Les rebelles prennent un poste stratégique à la frontière turque Les rebelles syriens ont pris, hier, après dix heures de combat, un poste de contrôle stratégique au nord-ouest d'Alep qui leur permet désormais de relier cette grande ville du nord à la frontière turque. Le poste de contrôle d'Anadan, à cinq km au nord-ouest d'Alep, a été pris à 05H00 (02H00 GMT) après dix heures de combats, a affirmé sur place le général Ferzat Abdel Nasser, un officier qui a déserté il y a un mois des rangs de l'armée régulière. Avec la prise de ce poste, les rebelles contrôlent désormais une voie directe entre la frontière turque et Alep, selon ce général. La ville syrienne est distante de 45 km de la frontière turque. L'armée régulière a lancé samedi une offensive contre Alep pour déloger les combattants de l'Armée libre syrienne (ALS, composée de déserteurs et de civils ayant pris les armes). Six soldats ont été tués et 25 ont été fait prisonniers, a indiqué le général selon lequel les rebelles ont perdu quatre hommes. Un passage libre vers la Turquie est vital pour les rebelles, le quartier général de l'ALS se trouvant dans ce pays. Et si les opposants parviennent à s'emparent d'Alep ils auront créé de fait une zone sécurisée dans le nord syrien qui leur permettra notamment d'acheminer des armes. Armée et rebelles revendiquent la victoire à Alep L'armée syrienne et les forces de l'opposition ont chacune affirmé soir avoir le contrôle du quartier de Salaheddine, à Alep. Au deuxième jour de violents combats, ces affrontements suscitent dénonciations et inquiétudes de la communauté internationale. Quelque 200 000 personnes ont fui ces deux derniers jours les violences qui secouent cette ville située au nord de Damas, selon la responsable des opérations humanitaires de l'Onu, Valerie Amos. Celle-ci demande que les organisations humanitaires puissent avoir accès à Alep. "Beaucoup de gens ont trouvé provisoirement refuge dans des écoles et d'autres bâtiments publics dans des zones plus sûres et elles ont un besoin urgent de nourriture, de couvertures et d'eau potable", a-t-elle déclaré. Sur le terrain, les versions se contredisaient, avant-hier, à l'issue d'une nouvelle journée marquée par de violents combats, notamment dans le quartier de Salaheddine, dans le sud-ouest de la ville. Les forces rebelles affirmaient avoir repoussé une offensive de l'armée tandis que les forces loyalistes se félicitaient de leur victoire. Le chef militaire rebelle d'Alep réclame une zone d'exclusion aérienne Le chef du conseil militaire rebelle d'Alep a appelé, avant-hier, l'Occident à instaurer une zone d'exclusion aérienne au-dessus du nord de la Syrie et accusé le régime de préparer un massacre dans cette ville où ses hommes sont retranchés. Nous ne demandons à l'Occident qu'une zone d'exclusion aérienne. Nous sommes prêts à faire chuter ce régime, a affirmé le colonel Abdel Jabbar al-Oqaidi dans un entretien avec dans le nord de la Syrie. Le colonel Oqaidi a affirmé que l'armée régulière avait essayé d'attaquer Salaheddine avec des chars, mais l'Armée syrienne libre (ASL), formée de déserteurs et de civils ayant pris les armes, a résisté et leur a fait subir des pertes importantes. Nous avons détruit huit tanks, des véhicules blindés et tué plus de 100 soldats, a dit l'officier. Il n'était pas possible de vérifier ces informations de source indépendante. Le Conseil national syrien (CNS), principal groupe de l'opposition, a réclamé, avant-hier, une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU pour empêcher les massacres de civils que le régime s'apprête à commettre, selon lui, à Alep. Dans une conférence de presse à Abou Dhabi, le président du CNS Abdel Basset Sayda a affirmé samedi soir que l'armée de l'air syrienne avait recours au MiG 21 et MiG 23 pour bombarder les civils. 25 morts, avant-hier, dans de nouvelles violences Les violences en Syrie ont fait 125 morts, avant-hier, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), qui effectue un décompte quotidien des victimes: 46 civils, 45 soldats et 24 rebelles. Cette organisation a fait état de violences à Deraa, ayant fait 17 tués pour la seule journée de dimanche. Selon elle, un combattant qui faisait office de correspondant pour une chaîne satellitaire arabe y a été tué, hier. "L'Offensive contre Alep ne fait que creuser la tombe du régime" L'offensive des forces syriennes contre Alep et la violence aveugle contre la population ne contribuent qu'à creuser la tombe du régime de Bachar al-Assad, a jugé, avant-hier, le secrétaire américain à la Défense Leon Panetta. Il est assez clair qu'Alep constitue un nouvel exemple tragique de la violence aveugle à laquelle a recours le régime d'Assad contre son propre peuple Au bout du compte, il creuse sa propre tombe, a déclaré le patron du Pentagone à bord de l'avion militaire qui l'emmenait en Tunisie, première étape d'une tournée qui doit également le mener en Egypte, Israël et Jordanie. Pour le ministre américain, Bachar al-Assad a perdu toute légitimité et plus il s'enfonce dans la violence, plus il s'assure que le régime touche à sa fin. La question n'est plus de savoir si le régime va tomber, mais quand, a estimé M. Panetta. La Jordanie ouvre son premier camp de réfugiés La Jordanie a ouvert, avant-hier, son premier camp pour les réfugiés syriens fuyant les violences dans leur pays, les autorités estimant que l'augmentation importante de leur nombre ne leur laissait pas d'autre choix. Les autorités d'Amman étaient réticentes à l'ouverture de ce camp, qui compte pour l'instant quelque 2 000 tentes blanches, probablement pour ne pas irriter le régime de Bachar el-Assad en concentrant les images de civils fuyant les attaques de ses forces militaires. Mais avec 142 000 Syriens cherchant refuge chez leur voisin du Sud, les autorités jordaniennes ont annoncé qu'elles étaient obligées de réagir. D'autant qu'il peut y avoir, chaque jour, jusqu'à 2 000 nouveaux candidats à l'exil. "La réalité nous a poussés à ouvrir ce camp", a déclaré le ministre de l'Intérieur Ghaleb Zoubi devant des responsables d'organisations humanitaires lors de l'ouverture du camp dans le hameau de Zataari, à environ 11 kilomètres de la frontière syrienne. "Nous avons accueilli des Syriens dans nos maisons, en nombre même plus important que quand ils étaient hébergés dans des centres de rétention", a-t-il affirmé.