La Banque du Japon a maintenu intacte sa politique d'assouplissement monétaire mais mis en garde contre les "fortes incertitudes" pesant sur l'économie mondiale, à l'issue d'une réunion de sa direction. Lors de sa réunion précédente mi-juillet, le comité de politique monétaire de la Banque du Japon (BoJ) avait modifié son plan d'achat d'actifs pour le rendre plus efficace, et les économistes prévoyaient qu'il se garderait cette fois de toute nouvelle initiative. L'institut d'émission a donc laissé en l'état son enveloppe de 70 000 milliards de yens (700 milliards d'euros), dont la taille est scrutée par le marché pour étalonner sa volonté d'assouplir les conditions de circulation de l'argent. Sur cette somme globale, 45 000 milliards sont consacrés à des achats d'actifs (bons du trésor à court et moyen terme, obligations d'entreprises, autres titres financiers) et 25 000 milliards à des injections dans le circuit interbancaire. Par ce biais, la BoJ octroie des liquidités aux banques et aux investisseurs, afin de fluidifier les conditions du crédit octroyé aux entreprises et aux particuliers et pour, in fine, d'encourager l'activité. Il s'agit du principal moyen que peut utiliser la BoJ pour rendre plus accommodante sa politique monétaire. L'autre levier d'importance, le taux directeur au jour le jour, est plus difficilement actionnable car il a déjà été abaissé dans une fourchette de 0,0% à 0,1% et peut difficilement être encore réduit. La BoJ a confirmé sans surprise son maintien au même niveau, ce qui revient pour elle à encourager un taux nul. Le gouvernement japonais presse régulièrement la BoJ, officiellement indépendante, d'assouplir davantage sa politique monétaire, au besoin en augmentant les fonds consacrés aux rachats d'actif. Il espère ainsi accélérer la fin de la déflation qui entrave depuis trois ans l'activité de la troisième puissance économique mondiale. Il pousse aussi l'institut d'émission à faire plus pour affaiblir le yen, dont la montée depuis cinq ans nuit aux exportations nippones. Valeur refuge pour les investisseurs en ces temps difficiles pour l'économie mondiale, la devise nippone a frôlé ces derniers mois des sommets face à l'euro et le dollar. La BoJ a pourtant souligné qu'elle jugeait "appropriée sa politique monétaire", à l'issue d'un conclave de deux jours de sa direction fini sans initiative majeure, à l'instar des dernières réunions de ses homologues américaine (Fed) et européenne (BCE). "L'économie japonaise a commencé à se reprendre de façon modérée, la demande publique restant solide en raison des besoins liés à la reconstruction" du nord-est du Japon dévasté par un séisme, un tsunami et un accident nucléaire en mars 2011, a souligné le gouverneur de la BoJ, Masaaki Shirakawa, lors d'une conférence de presse. L'activité a été vigoureuse en début d'année dans l'archipel, notamment grâce à des budgets publics de soutien à la remise en état des régions touchées et d'encouragement à la construction d'automobiles, particulièrement affectée par la triple catastrophe. Au premier trimestre, la croissance a atteint 1,2% en rythme trimestriel. Les statistiques officielles du deuxième trimestre, qui seront publiées lundi, devraient cependant indiquer un assez net ralentissement. M. Shirakawa a toutefois estimé que l'économie nippone devrait rester "sur la voie d'une croissance durable, la demande intérieure étant solide et les économies étrangères sortant d'une phase de ralentissement" particulièrement marquée en début d'année, lorsque la crise d'endettement européenne s'est emballée. Il a observé néanmoins que "de fortes incertitudes" continuaient de peser sur l'économie mondiale, "notamment autour du problème d'endettement européen, de la vigueur de la reprise aux Etats-Unis" et du rythme de la croissance dans les pays émergents. Or les exportations nippones à destination de ces pays, particulièrement dans les domaines stratégiques de l'automobile et des produits électroniques, constituent l'un des moteurs de la croissance nationale. La Banque du Japon a jugé par ailleurs que les prix à la consommation stagnaient actuellement dans l'archipel (hors produits périssables), alors qu'elle juge souhaitable une inflation de 1% par an en moyenne pour favoriser l'activité. Le recul des prix de gros s'accentue en juillet, à 2,1% sur un an Le recul des prix de gros sur le marché intérieur au Japon s'est accentué en juillet, à 2,1% sur un an, en raison d'une baisse marquée des tarifs de l'énergie et des matières premières, a annoncé, avant-hier, la Banque du Japon (BoJ). Ces prix ont augmenté à rythme modéré entre la mi-2010 et le début 2012 mais diminuent depuis. En juillet, les cours du pétrole et du charbon, qui avaient dopé la hausse des tarifs de gros pendant des mois, ont chuté de 8,5% sur un an. Ceux des métaux non-ferreux ont plongé de 12% et ceux du fer et de l'acier de 8,5% eux aussi. Les prix des équipements pour l'information et la communication se sont aussi réduits (-9,1%), comme ceux des machines électriques (-3,0%), des composants électroniques (-4,4%) et des matériels de transport (-1,2%). Calculés dans les devises stipulées par les contrats, les prix de gros à l'importation ont dévissé de 4,8% en juillet par rapport à ceux du même mois de 2011, et de 5,5% calculés en yens. A l'export, ils se sont effrités de 2,7% en devise contractuelle et de 4,1% en monnaie japonaise. La différence d'évolution entre les prix en monnaie contractuelle et les tarifs en yens s'explique par la hausse de la devise japonaise, considérée comme une "valeur refuge" par les investisseurs en temps de crise économique. La troisième puissance économique mondiale reste officiellement en déflation depuis plus de trois ans, les prix au détail continuant de souffrir d'un écart entre l'offre et la demande. Ce phénomène pernicieux décourage l'investissement des entreprises et affaiblit la consommation des ménages incités à patienter en espérant de nouveaux reculs des tarifs. La BoJ mène depuis des années une politique monétaire accommodante destinée à faciliter la circulation de l'argent, à encourager l'activité et à permettre une hausse modérée des prix. Elle considère qu'une inflation de 1% serait de nature à favoriser l'économie sans risquer la surchauffe. La banque centrale estime que les prix à la consommation hors produits périssables, actuellement en stagnation, pourraient légèrement s'élever de 0,2% lors de l'année budgétaire d'avril 2012 à mars 2013 et de 0,7% en 2013-2014. Le Parlement accepte de doubler la taxe sur la consommation Le Parlement japonais a approuvé, avant-hier, le doublement de la taxe sur la consommation d'ici 2015 pour contenir la dette colossale du Japon et garantir la pérennité du système de protection sociale. En échange du soutien des députés conservateurs dont il avait absolument besoin, le Premier ministre de centre-gauche, Yoshihiko Noda, s'est engagé à dissoudre la Chambre des députés et à organiser des élections législatives "dans un proche avenir". Dernière étape nécessaire à l'adoption de la loi, l'approbation du Sénat a été obtenue, avant-hier, avec une confortable majorité de 188 votes pour et 49 contre. Le texte prévoit l'augmentation de la taxe sur la consommation, appliquée sur l'achat de la plupart des produits et services au Japon, de 5% actuellement à 8% en avril 2014 puis à 10% en octobre 2015. L'adoption de cette réforme constituait l'objectif politique principal de M. Noda, afin de limiter la progression de la dette du Japon, qui représente déjà plus de 200% de son produit intérieur brut, soit la proportion la plus élevée parmi les pays développés. Les fonds dégagés doivent aussi permettre de financer de nouvelles places de crèche, d'améliorer le système de santé, de payer une partie des retraites et de prendre en charge leurs dépenses de santé. Le Premier ministre a souligné que ces financements étaient nécessaires pour maintenir la protection sociale des Japonais, dont l'équilibre financier est mis à mal par le vieillissement accéléré de la population. La loi avait été votée dès juin à la chambre des députés, où le Parti Démocrate du Japon (PDJ, centre-gauche) de M. Noda est majoritaire, mais de longues négociations ont été nécessaires avant son adoption au Sénat, dépourvu de majorité stable. Pour obtenir le soutien du Parti Libéral-Démocrate (PLD, droite) et du Nouveau Komeito (centre), le Premier ministre a dû promettre d'avancer le prochain scrutin législatif, qui devait normalement se tenir en août ou en septembre 2013. Avant d'affronter ces nouvelles élections, dont la date n'a pas encore été fixée, M. Noda devra franchir en septembre prochain l'étape délicate de sa réélection à la présidence du PDJ, dont la conquête l'année dernière lui avait offert le poste de chef du gouvernement. De nombreux députés du parti, qui craignent pour leur siège, pourraient faire payer à M. Noda le fait de leur avoir rendu la tâche encore plus ardue avec l'augmentation impopulaire de la TVA. Le PDJ a remporté en août 2009 une victoire électorale historique qui a mis fin à plus de 50 ans de domination quasiment sans partage du PLD sur la vie politique. Mais sa popularité initiale s'est largement érodée en raison de son incapacité à tenir la plupart de ses promesses électorales, notamment en terme de pouvoir d'achat, et le mouvement a été affaibli par de nombreuses défections.